Rapaces, tome 3
6.8
Rapaces, tome 3

BD franco-belge de Jean Dufaux et Enrico Marini (2001)

L'action ne se limite plus à une série de meurtres, et l'intrigue trouve un second souffle en s'élargissant :

* les bagarres mettent en présence non plus seulement les "Rapaces" et leurs victimes, mais des groupes plus importants : ainsi le combat de la soeur Rapace contre un groupe significatif de policiers (planches 6 à 13), occasion pour Marini de nous montrer un joli cul féminin dans différentes postures qui intéresseront les mecs
* l'introduction de nouveaux personnages bien typés : un faux pasteur aux méthodes musclées, qui semble être un allié de Lenore et Spiaggi (planches 2 et 7);
* un thème très considérable est mis en scène planches 14 et 15, et l'on s'étonne de n'en avoir pas eu connaissance plus tôt, car il évoque une situation qui semble être établie depuis longtemps : la disparition progressive de l'espèce humaine devant la gent vampire qui contamine peu à peu tout le monde. Mais, comme on n'est pas dans"Walking Dead", ici, les vampires sont maîtres du jeu, et choisissent de parquer les humains survivants dans des zoos; on soulignera toute l'ironie de la situation. On évitera malgré tout de surestimer la portée philosophique de ce renversement.
* l'introduction planches 16 à 18, du thème souvent utilisé de la ville souterraine des enfants cherchant à échapper à leurs prédateurs. Ceci amplifie la surprise du lecteur, qui se rend compte brutalement que la cité est dans un stade apocalyptique, ce qui n'était pas vraiment perceptible dans les deux premiers albums, qui se limitaient à des histoires de flics new-yorkais nocturnes et d'égorgeurs d'outre-tombe sexy.
* un flashback, planches 47 à 57, explique après coup la scène de crémation indienne qui apparaissait dans un tome précédent; de même, le dragon courbé récurrent, emblème de la série, voit son origine expliquée.

Vicky Lenore subit les pires outrages dans cet album : battue, torturée, violée... elle éveillera les instincts pervers des lecteurs sadiques, secrètement affriolés par son impuissance face à la violence masculine. Belle scène de partouze perverse et incestueuse planche 41, Dufaux nous gâte et ne s'en tient pas à la suggestion...

La deuxième moitié de l'album est orientée vers la confrontation entre le bel Aznar Akeba et les Rapaces; on en laisse les surprises au lecteur. Tout au plus peut-on dire que le beau mec n'est pas si clair que ça.

Dufaux maintient l'attention en jouant avec ses récitatifs : rien que dans la planche 1, ses textes, sagement casés dans de quasi-carrés disposés à distance l'un de l'autre, comme c'est la coutume dans les comics, émanent de locuteurs différents, et l'on passe de l'un à l'autre sans crier gare. Manière de capter l'attention du lecteur dès la première planche; ici, en effet, les premiers récitatifs sont de Dufaux lui-même, où l'on retrouve son lyrisme épris de surprises, tandis que la vignette de bas de page propose en fait des messages radio de police.

L'ordre des vignettes contribue au même effet de sollicitation de l'attention du lecteur : la disposition rhapsodique de l'action dans les planches 2 et 3 oblige le lecteur à suivre alternativement le déroulement de deux séquences simultanées mais sans rapport entre elles.

Beau plan bleu nuit sur New York, planche 1; métro dans un souterrain un peu gothique planche 3. Belle séquence diabolique située en Inde planches 47 à 57.

En progressant, la série sait renouveler ses contenus, en résolvant des énigmes en suspens, et en en introduisant d'autres. On est dans le baroque expressionniste sado-vampirique, et le surnaturel, bien présent, est habilement chaperonné par la violence des sentiments et le caractère sombre et torturé de plusieurs personnages.
khorsabad
8
Écrit par

Créée

le 5 sept. 2013

Critique lue 224 fois

2 j'aime

khorsabad

Écrit par

Critique lue 224 fois

2

D'autres avis sur Rapaces, tome 3

Rapaces, tome 3
666Raziel
8

L'avis de 666Raziel sur la série (4 tomes)

Rien que grâce à ses couvertures, Rapaces est une série qui fait, de suite, très bonne impression. Certes il faut adhérer au côté "gothico-fétichiste" du titre mais cet aspect est presque un...

le 9 mai 2016

Du même critique

Gargantua
khorsabad
10

Matin d'un monde

L'enthousiasme naît de la lecture de Gargantua. Le torrent de toutes les jouissances traverse gaillardement ce livre, frais et beau comme le premier parterre de fleurs sauvages au printemps. Balayant...

le 26 févr. 2011

36 j'aime

7

Le Cantique des Cantiques
khorsabad
8

Erotisme Biblique

Le public français contemporain, conditionné à voir dans la Bible la racine répulsive de tous les refoulements sexuels, aura peut-être de la peine à croire qu'un texte aussi franchement amoureux et...

le 7 mars 2011

35 j'aime

14