Au micro, Roland Dordhain, qui donne le départ de votre émission, "Route de nuit"!

- « Pilou pilou pilou hé ! Moi, j'attends le jour ou j'irai... Au pays qu'a un joli nom... Au pays qu'a un joli nom ! » C'est sur cette jolie chanson que prend fin une heure agréable passée en votre compagnie !... Ici José Arthur qui vous parlait depuis le bar de l'escale, près des Champs-Elysées ! Et maintenant, à vous Roland Dordhain, à vous "Route de nuit" ! Merci José Arthur !... Ici France I ! Au micro, Roland Dordhain, qui donne le départ de votre émission, "Route de nuit"! Pendant toute la nuit, jusqu'à 6 heures 30 du matin, nous allons vous tenir compagnie. Nous vous parlerons de l'état des routes, vous communiquerons des messages personnels et vous tiendrons en éveil en passant les disques que certains d'entre vous ont demandés !... Des informations, des histoires drôles, et des conseils pour ceux qui roulent ! Et n'oubliez pas que vous pouvez nous téléphoner 24 heures sur 24 ! Voici notre numéro : R.T.F. 78.00... Je répète : R.T.F. 78.00 !
- Bonne idée cette émission ! J'espère qu'ils vont passer des disques de Jazz !


Un quatrième tome qui signe déjà un renouveau de la licence



"Route de nuit", le quatrième tome de la série Michel Vaillant créée par Jean Graton, offre une aventure captivante et singulière qui élargit l'horizon de la franchise. Dans cette intrigue, l'action se déroule en dehors des circuits de course automobile habituels, avec Michel Vaillant prenant une année sabbatique loin du Grand Prix de Monaco, tout en restant actif dans sa carrière. Ce renouvellement précoce dans la saga témoigne de la volonté de Graton de développer son héros au-delà des schémas narratifs conventionnels, offrant ainsi au lecteur une expérience enrichissante. « Je tenais à ce que Michel vive des aventures en dehors des circuits. Ça tombait bien, depuis longtemps, je voulais raconter une histoire de routiers. » Expliquant son choix, Graton exprime son désir de narrer une histoire différente, celle des routiers, ouvrant ainsi "déjà" de nouvelles perspectives dans cette jeune série. Bien que cette approche puisse surprendre ceux qui s'attendent à des courses effrénées, "Route de nuit" révèle le génie de son auteur en présentant un récit mature et riche, explorant divers aspects de l'univers de la route à travers une intrigue captivante. Je ne peux que louer ce choix de conception pour la richesse qu'il apporte à l'album. En effet, celui-ci explore avec brio trois éléments distincts qui en font une lecture incontournable, que nous allons explorer en détail ici.



1) Premièrement, « l'immersion dans l'univers des chauffeurs routiers. »

Pour coller au plus près de son récit, Graton a entrepris un voyage de nuit en camion entre Paris et Marseille, démontrant ainsi son engagement à offrir une expérience authentique qui se reflète directement dans les pages de cette bande dessinée. Nous sommes introduits à la richesse de ce métier à travers un personnage essentiel : Benjamin Vaillant, figure importante du clan Vaillant, frère d'Henri Vaillant ainsi que oncle et parrain de Michel. Il dirige à Marseille, le "carrefour du monde", une compagnie de transport routiers qui porte son nom, des modèles "Vaillant". Un homme intègre et réservé qui se consacre entièrement à sa profession qu'il affectionne profondément. Il dirige avec dévouement une équipe de routiers, prenant soin d'eux au point de solliciter l'aide de Michel lorsqu'un problème survient avec "Gavroche", le fils de quinze ans d'un de ses employés décédé dans un accident de camion il y a huit ans. Benjamin a pris sous son aile ce jeune nommé Yves Douléac ainsi que sa mère, depuis lors, mais il semble maintenant s'égarer dans de mauvaises voies. C'est dans ce contexte que nous sommes plongés au cœur de la profession de routier et des mécanismes techniques qui la sous-tendent. Accompagnés de Michel Vaillant et de Steve Warson, désormais membre officiel de l'écurie Vaillant, nous embarquons à bord d'un camion 12 tonnes évoquant le modèle emblématique "Galibier" de la marque Unic pour un trajet aller-retour entre Paris et Marseille. Cette plongée méticuleuse dans l'univers des transports nous révèle avec stupéfaction la précision et l'habileté requises pour manœuvrer un tel véhicule.

" - Regarde, Steve ! Il y a cinq vitesses ! Mais grâce au "relais" chaque vitesse est double ! C'est-à-dire que tu as une petite première et une grande première, une petite seconde et une grande seconde ! Ceci pour chaque vitesse, et aussi pour la marche arrière ! Ce qui te fait en tout douze vitesses !

- All Right ! Compris ! A chaque fois deux vitesses différentes sans toucher au levier du changement de vitesses !

- C'est cela même !... Voici maintenant le ralentisseur ! C'est un frein magnétique dont les mâchoires agissent sur l'arbre, avant le pont arrière. Il y a cinq crans différents. Ou tu ralentis légèrement, soit dans une descente, ou bien plus énergiquement, pour aborder un virage ! De cette façon, tu gardes tes autres freins intacts. Ils ne chauffent pas et sont toujours prêts pour le coup dur !

- Epatant ! Je dois encore m'habituer à ce relais ! J'ai peur de mélanger mes 12 vitesses.

- Tu reconnais que c'est du "boulot" !? "

En parallèle, nous explorons également toutes les étapes d'une tournée de transport de marchandises : la livraison, les arrêts, les longs trajets de nuit et de jour... Tous les aspects qui façonnent ce métier sont exécutés avec minutie et attention. C'est dans ce contexte que l'on découvre le second élément distinctif faisant de cet album une œuvre enrichissante.


2) Deuxièmement, « la station radio "Route de nuit". »


Je suis toujours enthousiaste lorsque qu'un auteur s'efforce de mettre en valeur la richesse de notre patrimoine, à l'instar de ce qu'a toujours si judicieusement fait André-Paul Duchâteau avec sa série Ric Hochet. Dans ses œuvres, telles que "Rapt sur le France" ou "Suspense à la télévision", nous avons pu découvrir des éléments qui ont été autrefois importants pour la France. De même, dans cette nouvelle création de Graton, nous explorons le monde des routiers de nuit à travers la station "Route de nuit" (R.T.F. 78.0.), qui a été lancée en 1955 sur les ondes de la RTF, la Radiodiffusion-télévision française (ancêtre de l'ORTF). Cette station était animée par une personnalité emblématique de la radio française, Roland Dhordain. L'émission "Route de nuit" était bien plus qu'une simple diffusion radiophonique. Elle incarnait un véritable compagnon de route pour les conducteurs nocturnes, particulièrement les routiers, offrant un service complet qui alliait musique, bulletins météo et informations vitales sur l'état des routes. Conçue comme un réseau d'entraide, elle permettait aux chauffeurs routiers de partager des données cruciales pour leur travail, contribuant ainsi à améliorer leur sécurité et leur efficacité, tout en leur offrant une bouffée d'air frais dans la routine assoupissante de la conduite nocturne. Des mises à jour en temps réel sur les travaux routiers, les accidents ou les embouteillages, permettant ainsi aux conducteurs de planifier leurs itinéraires de manière plus stratégique. De plus, les présentateurs de l'émission étaient des compagnons virtuels, partageant des anecdotes, des blagues et des nouvelles avec leurs auditeurs, créant ainsi un sentiment de camaraderie dans l'obscurité de la route. Quant aux chansons, la plupart étaient choisies par les auditeurs eux-mêmes. Dans cette bande dessinée, nous avons ainsi le plaisir d'entendre "Pilou Pilou... Hé" interprétée par Gilbert Bécaud et Dalida, ainsi que l'annonce d'une chanson par Yves Montand. Au cœur de cette émission se trouvait une symbiose entre utilité et divertissement. Graton illustre avec adresse le fonctionnement quotidien de "Route de nuit", en dépeignant de manière astucieuse les studios de l'émission, nous plongeant ainsi dans l'atmosphère de cette radio d'époque. Cette représentation habile joue un rôle central dans la résolution de l'intrigue principale, centrée sur un trafic d'armes orchestré par des routiers. Cette intrigue captivante constitue le troisième élément distinctif qui fait de cet album un véritable bijou de lecture.


3) Troisièmement, « la gestion de la tension autour d'une course poursuite haletante. »


Dans ce quatrième tome, Graton nous livre une intrigue policière astucieuse où Michel Vaillant démontre, au-delà de son talent exceptionnel de pilote, qu'il est un homme responsable prêt à aider ceux dans le besoin. En plus de faire preuve de sa capacité à manœuvrer n'importe quel engin motorisé, il montre également son habileté à se défendre contre les malfrats en maîtrisant l'art du judo. L'intrigue est finement tissée autour d'une dimension psychologique dans son fond qui est explorée à travers le destin tourmenté d'Yves, qui, après la mort de son père, tente de se construire une vie grâce à de l'argent facile pour échapper à la misère. La première partie est intelligemment construite, prenant son temps pour poser de véritables enjeux et susciter de l'affection pour les personnages, tout en nous impliquant dans le récit en explorant les motivations et les enjeux. De plus, une dimension psychologique saisissante se dégage de la longue course poursuite nocturne sur les routes désertes du sud de la France. Cette direction surprend par la maturité de l'action, évitant de présenter Michel seul face à l'ennemi dans des poursuites rocambolesques, mais plutôt en le voyant agir dans le cadre de ses capacités, en collaboration avec la police, les routiers et la station "Route de nuit" pour traquer la tête du trafic d'armes en fuite après une tentative de capture avortée. Ce qui en découle est une chasse à l'homme captivante, superbement illustrée par les dessins de Graton qui parviennent à intensifier la tension à travers un jeu de couleurs saisissant, les phares perçant les ténèbres à grande vitesse. Nous sommes entraînés dans cette traque et nous nous laissons aisément emporter jusqu'à une conclusion des plus satisfaisantes.



CONCLUSION :



Michel Vaillant tome 4 : "Route de nuit", représente à l'époque un véritable défi pour Jean Graton. En décidant de s'éloigner de l'univers de la compétition automobile, il prend le risque de décevoir ses lecteurs. Mais, au lieu de cela, il crée un véritable hommage au métier de routier, tout en mettant en valeur la richesse de notre patrimoine français à travers la station radio Route de nuit. Cette décision est soutenue par une intrigue policière soigneusement élaborée, aussi captivante dans son fond que dans sa forme. Cette audace se révèle payante et apporte un renouveau bienvenu aux aventures de Michel Vaillant alors que ce n'est encore à ce moment-là qu'une jeune série BD.


Une description du monde des routiers qui offre une lecture captivante, dépeignant un univers empreint de camaraderie, d'altruisme et de chaleur humaine, où l'intégrité est une vertu essentielle pour ces héros de la route.



- Alors, patron ! Content de revoir votre famille ?
- Hé oui ! Cela va faire 2 ans que j'ai vu Michel !
- Peuchère ! C'est un "crack", votre neveu ! Il va surement remporter le Grand Prix, dimanche, à Monaco...
- Je ne pense pas... Il ne court plus cette année !
- Bonne mère !? C'est une galéjade ? Michel Vaillant ne courant pas à Monaco !? Patron, racontez cela à d'autres, pas à moi !
- Je t'assure, Titin ! C'est sérieux !

B_Jérémy
9
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le 20 mars 2024

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