The Wake
7.1
The Wake

Comics de Scott Snyder et Sean Murphy (2014)


Mini-série comics en deux grandes parties,



The Wake plonge deux héroïnes dans le grand bain glacial de deux époques distinctes, et propose, dans un ancestral barbotage, une plausible origine extraterrestre de l’humanité, et le développement de son pendant aquatique.


La première baignade suit les derniers jours de Lee Archer, biologiste marine spécialisée dans le chant des cétacés. Menée dans une base secrète et illégale sous les profondeurs des côtes de l’Alaska, elle est confrontée à la veillée funèbre de l’humanité : un spécimen de sirène agressif, aux dents acérées et aux larmes hallucinogènes, ouvre les écoutilles et sème la mort sur son passage. Il n’est que le premier d’une impressionnante attaque qui inondera le monde. L’enfermement, la certitude de ne pouvoir s’échapper, l’isolement, le froid et l’omniprésence de la menace aquatique, trop fluide, trop rapide pour les hommes, insaisissable. Tous ces éléments rappellent fortement The Thing de John Carpenter. Entre autres.


Scott Snyder, connaissant son métier et sachant où il va, n’oublie pas de disséminer un peu partout les bribes d’un passé néanderthalien, de catastrophes sidérales, et d’un humide futur post-apocalyptique sous le soleil.


La seconde ablution s’articule autour de Leeward, héroïne aquatique débrouillarde et curieuse, qui n’hésite pas à servir elle-même d’appât pour pêcher les sirois (ces hommes sirènes qui ont tué tout le monde quelques pages et quelques deux cents ans plus tôt). Traquée par la Gouvernante des 13 territoires, reliquat des gouvernances humaines, elle rejoint le vaisseau pirate du capitaine Sainte-Marie, en quête de réponses, et devient le témoin privilégié de l’éveil de l’humanité face à sa propre histoire autant que face à sa possible survie. L’aventure, ambiance Waterworld, prend les allures d’un épisode d’Albator, et Scott Snyder en profite pour nous gratifier d’un



laïus complexe sur les origines de l’homme.



C’est plus chaotique et moins abouti. S’éparpillant un peu trop, c’est surtout loin d’être aussi prenant.


Pour lier le tout, le dessin sombre et vif de Sean Murphy colle parfaitement à l’ambiance angoisse et horreur de la première partie, un peu moins à l’aventure gloriole de la seconde. De même les couleurs de Matt Hollingsworth, décor sombre, dense, pesant, qui colle au récit horrifique inaugural, puis mélange improbable et déséquilibré d’atmosphères brouillonnes et vives. Comment leur en vouloir quand le scénario ne leur offre pas les repères nécessaires ?


Alfred Hitchcock aimait rappeler qu’un bon méchant fait une grande part de l’intérêt d’un récit. Si le monstre humanoïde de la première partie joue parfaitement son rôle, le mystère qui cerne les motivations de la Gouvernante dessert grandement la suite de l’histoire.


The Wake a reçu l’Eisner Award de la meilleure mini-série 2014, gageons que c’est la première partie angoissante qui est ici récompensée, et l’Eisner Award du meilleur dessinateur, bravo à Sean Murphy : le dessin n’est pas toujours des plus clairs ni des plus séduisants, mais le montage et l’unité du volume sont son œuvre et participent essentiellement au plaisir d’aller au bout de la série, boire le calice jusqu’à…
Et bien, jusqu’à ce qu’il soit vide, ce n’est que de l’eau.



Inégal,



The Wake aurait mérité de s’en tenir à cette première immersion en eaux profondes, très réussie, ou de s’étendre sur une troisième pour ne pas noyer son sujet comme c’est le cas.
Pour ne pas rester vague sur la vague.


Matthieu Marsan-Bacheré

Matthieu_Marsan-Bach
6

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Créée

le 3 déc. 2015

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