Deniz Camp et Javier Rodríguez signent ici une relecture du Martian Manhunter qui délaisse le super-héros pour s’immerger dans la psyché d’un homme en décomposition. John Jones, agent du FBI, voit sa réalité se fracturer après l’intrusion d’une conscience extraterrestre dans son esprit. Le récit devient alors un long glissement : un polar qui se dissout peu à peu dans l’hallucination, où chaque scène semble tiraillée entre lucidité et délire.
Camp joue brillamment sur cette ambiguïté : l’album avance moins par action que par rupture perceptive, et la véritable inquiétude vient de ce que le personnage ne maîtrise plus sa propre narration. Quant à Rodríguez, il offre l’une de ses prestations les plus impressionnantes. Sa mise en page mouvante, ses couleurs acidulées, ses distorsions quasi organiques donnent aux visions de John une puissance sensorielle rare, qui rend palpable son effritement intérieur. Cette approche radicale peut parfois paraître démonstrative, mais elle sert un propos cohérent : traduire en images la perte progressive de soi.
Résumé
Un thriller psychique en clair-obscur, beau et dérangeant, qui préfère l’introspection au spectaculaire.
🟣 Une plongée hallucinée où l’identité se trouble autant que les contours du monde.