En voilà une bonne chose de faite. J'ai désormais lu l'intégralité de la série Alias de Bendis et Gaydos grâce à l'omnibus qu'à sorti Panini il y a quelques années et qui était trouvable à un prix honnête (comprendre, moins cher que le prix d'origine) sur le net. C'est sur que si on met pas une tronche connue sur l'omnibus, les gens ne viennent pas. Et ils ont tord, surtout ici.

L'intérêt premier de la série Alias c'est qu'elle parle du monde des super-héros Marvel avec un autre angle de vue. Plutôt que celui innocent ou grandiloquent des aventures des vengeurs ou de spidey, on se retrouve ici aux côtés de Jessica Jones, une ex-super héroïne que personne ne connaît, qui est désormais détective privée. Elle vit à New-York, dans un monde de super-héros qu'elle est amenée à côtoyer régulièrement et qu'elle a côtoyé par le passé, mais même si elle a quelques super pouvoirs, elle ne porte plus le costume, n'aime pas se battre et utilise très peu ses capacités hors norme. Elle nous fait donc rentrer dans l'univers des super héros du côté de l'homme de la rue, et c'est très agréable. Surtout que la série se veut réaliste, que ce soit dans les dialogues de Bendis, toujours très crédibles, dans les dessins de Gaydos, qui sont un peu dans le même genre que ceux de Maleev, ou dans les thématiques abordée.

Ça fait du bien de lire une série Marvel où les personnages, notamment Jessica Jones, jurent comme des charretiers sans censure de gros mot d'un autre âge (qui a encore lieue de nos jours !), où ils peuvent parler de leur sexualité (de manière adulte hein, on est pas ici pour faire du voyeurisme adolescent), de drogue et d'un tas de trucs de la vraie vie. Je remercie le label MAX de Marvel pour ça, surtout que la série ne se passe pas dans un univers parallèle comme d'autres séries du label.

Dans cette série en 28 numéros, on retrouve Bendis à ses débuts chez Marvel dans un domaine où il excelle et où je regrette qu'on ne le voit plus aujourd'hui : les super héros intégrés dans un quotidien réaliste. C'est tellement bon de lire des histoires comme ça, et avec les dialogues ciselés de Bendis, ça donne de l'épaisseur, de la crédibilités aux personnages, c'est vraiment bon. Les vengeurs ont l'air ridicules dans leurs costumes au lieu d'avoir toujours l'air classe, les personnages ont tous des défauts et des moments où ils sont un peu minables, où ils se loupent et la relation de Jessica avec Scott Lang et Luke Cage le montre très bien et est une belle réussite.

Quand on lit ces X-Men actuels et qu'on lit Alias ensuite on a envie de dire à Bendis de réinjecter un peu de réalité dans ses histoires actuelles. Il est tellement bon pour ça ! En plus, le côté on ne peut plus street level de la série, on ne plus proche des gens normaux, permet, outre une bonne identification aux personnages et aux situations, de bien approfondir la relation qu'on les civils avec les super héros, ce qu'ils en savent, ce dont ils ont peur, etc. On a rarement eu la sensation d'évoluer autant au sein d'un monde de super héros. Surtout que Bendis mutiplie les clins d'oeils, les passages de personnages plus ou secondaires et plus ou moins paumés de l'univers Marvel et c'est un vrai plaisir. Et il n'hésite pas à confronter le réalisme de sa série avec les aspects les plus absurdes de l'univers Marvel comme Ka-Zar (oui le mec de la terre sauvage), Rick Jones qui a réglé le conflit Krees-Skrulls ou encore Madame Web. Si vous êtes fans de Marvel et de tous ses personnages bigarrées, et/ou que vous avez feuilletés un jour ou l'autre les pages d'une encyclopédie Marvel, c'est un régal de voir ces petites références. Mention spéciale au flash-back qui rend hommage à Amazing Fantasy #15.

Au cours de ses arcs, la série arrive à brasser un large éventail de thèmes et de situations différentes sans jamais lasser. Si le premier épisode est un peu rude, avec une traduction française un peu maladroite qui n'aide pas et des dessins de Gaydos encore maladroits, on s'attache progressivement à Jessica Jones, à ses galères, à son tempérament et c'est rapidement un vrai plaisir de la suivre. C'est une héroïne forte comme on en croise pas si souvent et on retrouve bien ici l'habilité de Bendis. La série monte en puissance tout du long pour terminer en apothéose avec l'arc Purple qui est une putain de réussite. En plus, dans cette série Bendis arrive à conclure tous ses arcs de manière correcte et on a pas son éternel défaut des montées en puissance pour ensuite une retombée de soufflée sur les 10 derniers mètres. Certainement dû au fait que ce ne soit pas tout à fait des histoires classiques héros vs méchants.

Gaydos aux dessins n'est peut être pas le dessinateur le plus habile, il a quelque fois des visages assez grossiers/moches, mais sa Jessica Jones a une bonne tête (sauf sur la photo d'elle jeune dans le premier numéro, ça on oublie) et sa narration est habile. J'adore les doubles pages où les clients racontent leur histoire à Jessica, le procédé est réutilisé dans chaque arc et ça rend vraiment sympa. Il découpe vraiment intelligemment ses planches pour coller au style réaliste et surdialogué de l'intrigue de Bendis et s'en sort vraiment bien. Alors, bien entendu, il ne faut pas être allergique aux cases copiées-collées (qu'on pardonne aisément quand on connaît les délais de production des comics), mais c'est vraiment du bon boulot. La colo n'est pas hyper réussie, mais le style de Gaydos est particulier et c'était le début des années 2000, donc on excuse facilement. C'est de tout manière loin d'être moche à mon goût et il y a même certains passages plutôt réussis.

Au final, Alias est vraiment une série à lire, assurément. Certainement l'une des plus belles réussites de Bendis dans l'univers Marvel avec son run de légende sur Daredevil. Si vous aimez les récits réalistes un peu polar et les super héros Marvel, c'est vraiment faits pour vous. En plus l'omnibus de Panini est un beau livre. Le dos rond évite l'impression de fragilité des gros bouquins d'Urban et son format non agrandi permet d'avoir un ouvrage pas trop encombrant. Après, Panini a quand même réussi à faire le con en superposant texte Vo et texte Vf sur une page rendant le tout illisible (bravo les gars !) et il y a un ou deux passages (très peu heureusement) qui ont des traductions bizarres (Geneviève Coulomb est responsable d'une partie de la traduction, ceci explique peut être cela), mais à part ça, c'est du tout bon. Donc ne laissez pas ça vous arrêtez et tentez le coup, vous ne le regretterez pas !
arnonaud
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le 12 avr. 2014

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arnonaud

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