Un pur régal, inespéré.

Quelle belle surprise ! L'ambiance du Dernier voyage de l'Amok m'avait fait supputer que nous avions là l'ultime tome que nous livererait Franck Le Gall. Or il n'en est rien, et mon Dieu que j'aime ce Aro Satoe.

Joseph Conrad, Stevenson... Soyez heureux, la belle littérature d'aventure n'est pas morte, elle vit dans cette bande dessinée.

L'intrigue est simplissime : Un major, Anderson, se lance à la poursuite de Poussin, qui se cache sur l'île d'Aro Satoe, qui appartient à sa maîtresse également appelée Aro Satoe. Forcés à fuir, les amants accompagnés d'un guide indonésien s'enfoncent dans la jungle, où des signes montrent qu'ils ne sont pas seuls.

Certains dessinateurs ont un trait qui se dégrade en vieillissant (pauvre Mézière !). Ce n'est absolument pas le cas de Franck le Gall, qui flirte ici beaucoup avec Milton Caniff. Les couleurs, par Robin le Gall, sont très réussies. Le découpage me fait complétement fondre, avec un côté très désuet qui va parfois vers le roman photo, parfois vers l'illustration de roman d'aventure. (quelle joie, au passage, d'avoir trouvé un ex-libris dans l'édition que je me suis procurée).

Il y a dans le petit miracle que constitue cet album tout un monde de la bande dessinée franco-belge à son meilleur, dans sa capacité à créer cette ambiance onirique et poétique, à tutoyer l'absolu sur un mode mineur, à travers de la pacotille. A laisser de côté l'intrigue pour aller vers l'essentiel.

Encore merci, M. Franck Le Gall. Merci pour tout ce que vous nous donnez. Je pourrais évidemment aller bien plus loin dans l'analyse, mais je voulais surtout fixer un ressenti. Je n'ai pas trop envie d'intellectualiser. Les références sont évidentes et le savoir-faire patent.