« Une bande dessinée expérimentale »
Ce fut ma première impression en tombant par hasard sur cette BD et en faisant rapidement défiler ses pages sous mes yeux.
Beaucoup de cases noires, des textes de passages, des images fugaces et une histoire dont la découverte promettait d’être lente mais continue. Et c’est un produit qui ne ment pas sur sa marchandise.
En effet, notre personnage, semblant répondre au nom de « Adam », est dans un état physique et psychique fort peu enviable. Prisonnier d’une paralysie totale l’empêchant de voir, de bouger ou de parler, tout en étant occasionnellement plongé, volontairement ou non, dans le sommeil, il en est réduit à ne pouvoir qu’écouter et penser.
Plongé en lui-même, étendant son ouïe au monde qui l’entour, il cherche à se rappeler de son passer des plus trouble et à comprendre son présent on ne peut plus incertain, tant par sa condition que par son environnement.
Malgré cette obscurité complète, des images viennent parsemer ce gouffre, aidant à l’éclaircissement de l’intrigue à travers une narration prenante.
Avant d’aller plus loin, Sachez que je risque de trop en dévoiler sur le contenu de cette bande dessinée, ce qui pourrait nuire à la qualité de votre lecture.
Vous êtes à présent prévenu.
Entre mes mains, et sans précipitation, les pages ont défilé à une vitesse étonnante. Paradoxalement, j’éprouvais une impatience grandissante envers le délivrant dénouement et ses réponses que cette vitesse de lecture peinait à maîtriser.
J’ai malgré tout pris une ou deux pauses en chemin, ne pouvant m’empêcher de réfléchir à ce qu’une telle situation pourrait impliquer si je devais la vivre.
Comment supporter une telle impuissance ?
Comment faire face au temps qui passe en étant ainsi mis de côté ?
Que pourrions-nous ressentir, si nous en avons les capacités, face à nos proches ?
Face à des décisions des plus importantes qui devraient être prises, autant pour nous que pour eux, lesquelles préférerions-nous ?
Sommes-nous capable d’appréhender tout cela alors que nous imaginons avec grande peine une telle existence ?
Je vous avoue qu’à l’heure où j’écris ces lignes, je n’ai trouvé réponse à ses questions aussi difficilement concevables qu’importantes, comme bien d’autres d’ailleurs.
Mais, pour en revenir à la BD de Marc-Antoine Mathieu, je dois avouer que sa fin fut particulièrement inattendue et bien loin de ce que j’avais pu imaginer durant ce parcoure. L’histoire se termine au passage avec biens d’autres questions en suspends.
En conclusion, ma lecture m’a conforté dans ma première impression.
Deep Me est, de mon point de vue, une œuvre expérimentale. Sa narration diverge, sans trop s’éloigner, de celle classique à la bande dessinée tout en proposant une certaine réflexion durant son histoire. Loin d’être une lecture se limitant à un divertissement, ne nous présentant aucun héros ou méchant à proprement parler et sans être destiné à s’étendre au-delà de sa proposition de base.
Je dirais simplement que cette œuvre est « autre ».
Elle se place dans un espace trouble et troublant entre l’appréciation et la détestation. Dans un angle mort des genres littéraires bien connu. Dans cet interstice menant à l’inhabituel.
Tel un passage mystérieux vers l’inconnu, le choix vous est offert de vous y aventurer.