Gantz:G
5.7
Gantz:G

Manga de Hiroya Oku et Keita Lizuka (2015)

Il faut croire que Gantz ne se bornait pas à la bête trame d'une chasse aux extra-terrestres ; qu'il y avait un «quelque chose» de plus ayant justifié l'engouement des lecteurs. Mieux qu'un «quelque chose», un substrat, le socle de l'œuvre. En un sens - et en un sens seulement - je suis reconnaissant à cette collaboration de nous avoir offert cette suite bâtarde de Gantz. Reconnaissant parce que je sais maintenant un peu plus précisément ce qui m'avait fasciné dans le manga de Hiroya Oku en constatant toutes les carences de Gantz:G.


Si l'on soustrait Gantz:G à Gantz, on en retire la moelle épinière ayant suscité chez moi et tant d'autres la fascination pour la série originale.


Première surprise, agréable celle-là, nous ne perdons pas vraiment en qualité au niveau du dessin. Oku a laissé la place à un autre dessinateur et ce dernier nous offre un rendu de très bonne facture. Rien qui ne vaille ce que le Oku des grandes années avait pu nous servir, mais ça s'en rapproche en tout cas dangereusement. La méthode de dessin assistée par ordinateur n'a pas été abandonnée ; c'eut été un scandale dans l'éventualité contraire. J'ignore d'ailleurs si Gantz aurait connu le même succès avec des dessins plus conventionnels. Avec du recul, le réalisme de ses réalisations jouait beaucoup dans l'atmosphère angoissante qui nous sautait à la gueule dès lors où l'on ouvrait un volume relié.


Le scénario n'a pas été trahi si tant est que scénario il y avait eu du temps de Gantz. Soyons francs, Gantz tient plus d'un concept précis qui servira plus tard de prétexte à l'atrocité que d'une intrigue à proprement parler. On meurt, on apparaît dans un appartement où se trouve la sphère noire et on est partis pour une chasse à l'alien macabre. Le manga n'a jamais eu à tenir la moindre promesse en dehors de ce simple postulat. Sur le plan de l'intrigue en tout cas.


Pour savoir ce qui a foiré - pas nécessairement dans les grandes largeurs - avec Gantz:G, il faut s'imaginer un film d'horreur. Mieux, s'imaginer le film The Thing. Un chef d'œuvre de l'horreur, Carpenter s'étant surpassé pour nous offrir la terreur ultime agrémentée de toutes les psychoses inhérentes au genre (la paranoïa surtout), la mise en scène s'était alors alliée à l'idée principale développée au court du film au point de l'épouser en tout point. Puis il y eut une suite en 2011. Un préquel pour être précis. L'idée initiale se veut la même, la créature qui s'attaque à une expédition dans le même environnement. Quel échec ce fut (j'encourage les lecteurs de cette critique à comparer les notes des deux films).
Le réalisateur de la version de 2011 s'en était tenu à l'idée principale et s'imaginait qu'en se contentant de cela, tout le reste irait de soi. Peut-être a-t-il compris plus tard que le film de Carpenter était plus que ça.


Comment voulez-vous nous faire frissonner avec le sort de personnages dont le lecteur n'a strictement rien à carrer ? L'erreur de The Thing (2011) est de Gantz:G tient principalement à ça. Ce n'est pas tant une histoire de personnages en réalité, mais de la manière dont ils sont exploités. En clair, la mise en scène de ces derniers se veut absolument différente.
Oku, avec Gantz, pouvait nous faire aimer un personnage sans avoir à lui donner de ligne de dialogue, en tout cas, à susciter un intérêt le concernant. Et cela, il le faisait sciemment en sachant que ce personnage prometteur auquel le lecteur s'intéresserait finirait pas mourir bien assez tôt. Chaque personnage était à ce titre précieux pour le lecteur et le voir mourir un déchirement.


Avec Gantz:G, non seulement les personnages marquants ne risquent jamais d'y passer, mais le reste du cheptel est marqué du sceau de l'indifférence générale. On tue du figurant sans aucune prise de risque ou sans bousculer le lecteur. En clair, on rompt avec l'audace de Gantz.


Qui plus est, les extra-terrestres chassés n'auront pas vraiment laissé quoi que ce soit en mémoire pour le lecteur que je suis. Entre une resucée des dinosaures ici appliquée à des animaux d'un zoo et des créatures aquatiques qui auraient pu être bien mieux développées dans l'idée, aucune des deux chasses ne nous reste à l'esprit.
Car Gantz:G, c'est uniquement deux chasses pour une série de trois tomes seulement. Aucun des survivants n'a vraiment le temps d'être développé d'une chasse à l'autre si ce n'est avec quelques bric-à-brac, histoire de dire que. Mais je défie quiconque de revenir de cette lecture en s'étant dégoté un personnage favori ; tous sont aussi insignifiants les uns que les autres quand ils ne sont pas tirés du Gantz original au niveau de la personnalité (je pense au pendant féminin de Izumi).


Au moins, ça aura eu le mérite d'être court, mais après ces trois tomes, on se demande à quoi bon relancer la série avec des personnages dérivés si ce n'est pas pour se-réinventer. Poser la question, c'est y répondre.... on a cherché à capitaliser sur le succès d'antan de Gantz mais sans prendre la peine de réellement s'investir ou renouer avec ce qui faisait à l'origine la renommée du manga. Une bonne chose que pareille tentative ait échouée.

Josselin-B
3
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le 28 nov. 2019

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Josselin Bigaut

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