Conquêtes aurait pu être une grande fresque de science-fiction : cinq missions humaines vers cinq planètes différentes, autant d’occasions d’explorer la diversité du cosmos et des civilisations. Sur le papier, tout y est : l’exil, la survie, le choc des cultures, la quête d’un nouveau monde. Mais à la lecture, la promesse s’évapore vite.
Oui, il y a un certain plaisir à découvrir, tome après tome, une planète nouvelle, un décor inédit, une situation de crise différente. L’idée de varier les intrigues fonctionne, et la série évite la linéarité. On ne sait jamais tout à fait où l’on va, et c’est, pour un temps, sa principale qualité.
Mais très vite, la mécanique se voit. Les récits, sous leurs habits d’exploration, restent prisonniers d’un classicisme poussiéreux. Conquêtes aligne tous les poncifs de la science-fiction sans jamais en raviver la flamme : militaires exaltés, civilisations déchues, trahisons politiques, rivalités internes, dieux cachés, virus hostiles… rien n’est faux, mais rien n’est neuf. Les thèmes sont plaqués, les symboles forcés, comme si chaque tome suivait un cahier des charges : un conflit, un sacrifice, un twist. L’ensemble finit par sonner creux, comme une partition bien apprise mais jamais habitée.
Le dessin, lui, fait le travail , sans éclat. Correct, efficace, mais dépourvu de souffle. Le chara design est interchangeable : muscles, mâchoires serrées, héroïnes uniformément sculpturales. Tout sent le modèle 3D poli pour séduire un lectorat en quête d’action. Il n’y a pas de véritable regard d’auteur, seulement une esthétique de catalogue.
Les personnages, eux, ne respirent pas. Archétypaux jusqu’à la caricature, ils récitent leur rôle de soldat, de chef, de traître ou de victime sans jamais exister autrement. On chercherait en vain une ambiguïté, une faille, une émotion sincère. L’univers semble peuplé non d’humains mais de clichés en armure.
On ne passe pas un mauvais moment, non. Mais on n’en sort rien non plus. Conquêtes est une lecture tiède : agréable à feuilleter, aussitôt oubliée. Une série qui coche les cases du genre sans jamais en comprendre l’essence. Car la science-fiction, même populaire, devrait être un laboratoire d’idées, pas un showroom d’images.
Conquêtes, au fond, ne raconte pas la découverte de nouveaux mondes : elle illustre la fatigue d’un imaginaire qui tourne en orbite autour de lui-même.
Lu en 2025, du tome 1 à 10