L’Aimant
7.2
L’Aimant

BD (divers) de Lucas Harari (2017)

Cette bande dessinée raconte l'histoire d'un jeune homme qui par le passé a étudié les thermes de Vals (énigmatique bâtiment dessiné par le semble-t-il fameux Zumthor, évoqué ici comme un fantôme) pour son doctorat d'architecte ; son étude trouva son terme sous les coups d'une frénésie, d'une intuition soudaine : foudre d'une compréhension, caresse d'une épiphanie (en mode ostéo cela dit), en une nuit il se sentit percer les mystères de son sujet, en une nuit rédigea sa thèse... puis la brula. Il a gardé le Zippo, c'est sentimental probablement.


Il s'appelle Pierre, la BD s'appelle L'aimant, les thermes sont en Suisse, rien à voir avec le lac Léman, quoique Pierre décide de se remettre dans le bain, à terme ; et il y retourne, à Vals, en Suisse.


Pierre a tant retourné son sujet, encore et encore, tant manipulé le mystère dans les limites de la réflexion rationnelle, qu'il est maintenant possible pour lui, et surtout temps, tentant, voire irrésistible, de revenir au papier à dessin, là où les choses parlent plus vite que les mots, et en disent davantage, d'autant davantage que le mystère de cette intrigue est architecturale.


La compréhension doit trouver une partie de sa résolution dans la sensualité, sous peine sinon, peut-être, d'être un peu vaine. La sensualité, d'un dessin, d'une femme, finit toujours par dépasser la compréhension, par la sublimer du moins, par lui donner un sens donc, parfois soudain, dans l'allusion d'une utopie, d'une porte dérobée, par apporter quelques dernières pierres à l'édifice insondable, par apporter la perspective...


Les dessins sont fascinants, le grand format aide, et les cases sans bordures, certaines même communiquent en sautant une étape,


les perspectives à angles droits géométriques, labyrinthiques, architecture cubique, dans la montagne sauvage chaotique qui découpe le ciel. Nouvelles perspectives dans le contraste, la perspective est polysémique, comme l'est la profondeur, avant arrière, avant après, traversée en esprit du décor, profondeur du papier plat par l'art graphique, profondeur de l'avenir par l'impulsion. Illusion. Perspectives.


Tout est bleu et rouge, comme dans les vieux magazines en trois dimensions, c'est le bleu et rouge de l'enfance, mais les teintes se lisent sans lunettes spéciales, mettent en perspective les reflets de l'eau, et l'âme... c'est une promesse intenable, mais belle, et bien foutue, d'assaisoner le panorama.

Vernon79
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 25 sept. 2018

Critique lue 455 fois

6 j'aime

Vernon79

Écrit par

Critique lue 455 fois

6

D'autres avis sur L’Aimant

L’Aimant
MaraDes_Bois
7

Un goût d'inachevé

L'intrigue de cet ouvrage ne peut pas laisser indifférent quelqu'un qui adore l'architecture. Les dessins, qui décrivent plusieurs univers assez différents, m'ont paru intéressants et, même si les...

le 30 juin 2019

4 j'aime

L’Aimant
habibaelb
8

Critique de L’Aimant par habibaelb

Je ne suis pas sûre d'avoir saisi tous les tenants et les aboutissants de cette histoire. Cela dit, elle remarquable d'un point de vue graphique. La palette de couleurs est ramenée à l'essentiel et...

le 21 avr. 2019

3 j'aime

L’Aimant
elrenardo1
7

Géométrie variable

Superbe premier ouvrage de cet auteur. Une bande dessinée au scénario très travaillé, au graphisme en lien avec le thème abordé, c’est à la fois réaliste et fantastique, bref, un livre qu’on dévore...

le 25 mars 2018

2 j'aime

Du même critique

Les Goonies
Vernon79
9

C'est pas parce que l'on est grand que l'on doit rester assis

Dans le premier tome des "Scènes de la vie de provinces", Balzac tentait de nous expliquer comment "durant la belle saison de la vie, certaines illusions, de blanches espérances, des fils argentés...

le 20 mai 2012

25 j'aime

15

Fitzcarraldo
Vernon79
10

Qu'est-ce que le luxe ?

Une gazelle, c'est exotique dans un zoo à Montreux, pas dans la savane. Un labrador, c'est exotique sur l'Everest, mais pas sur une plage bretonne à faire chier les crabes. Et bien voilà c'est un peu...

le 25 juin 2018

22 j'aime

17

The Leftovers
Vernon79
10

Le nihilisme c'est fun!

Spoiler Quand je pense à la mort, ça me fait toujours un truc. Un truc toujours imprévisible. Parfois je me sens serein, comme quand j'ai bien dormi et qu'il fait beau dehors. Parfois je panique,...

le 17 mai 2017

19 j'aime

6