Le Marsupilami passe au dark mode : bienvenue dans la jungle... émotionnelle

La Bête n’est pas votre Marsupilami d’enfance. Oubliez les “houba houba” joyeux et les cocotiers dansants. Ici, Zidrou et Frank Pé vous attrapent par la queue préhensile pour vous balancer dans un univers où la jungle, c’est aussi l’âme humaine. Et croyez-moi, on n’en ressort pas indemne.


Visuellement, Frank Pé livre un travail titanesque. Chaque planche est une fresque foisonnante où le Marsupilami, plus réaliste que jamais, devient un animal sauvage, imposant, presque intimidant. On est loin des dessins colorés de l’époque Franquin. Ici, tout est plus brut, plus sombre, et plus viscéral. Le pelage de la fameuse créature devient le théâtre d’ombres et de lumières qui racontent à elles seules une partie de l’histoire. C’est magnifique, mais aussi un brin oppressant, comme un documentaire animalier réalisé par David Fincher.


Côté scénario, Zidrou s’attaque à un défi audacieux : offrir au Marsupilami une nouvelle peau, à la fois symbolique et littérale. Il plonge l’animal dans un contexte humain où les traumatismes, les relations compliquées, et les marges de la société prennent le pas sur la légèreté des aventures d’antan. On suit une intrigue qui oscille entre conte écologique et drame social, tout en flirtant avec un certain lyrisme.


Mais attention, La Bête n’est pas pour les âmes sensibles ou les nostalgiques acharnés. Ce n’est pas un Marsupilami qu’on adopterait volontiers dans notre salon. Zidrou explore des thèmes complexes, et parfois, l’histoire semble se perdre dans sa propre ambition. Certains passages sont si lourds de symbolisme qu’on a envie de leur dire : “Détends-toi, Marsu, prends un fruit exotique et souffle un coup.”


Pourtant, malgré quelques lenteurs et un sérieux presque trop pesant, La Bête réussit à toucher une corde sensible. Ce Marsupilami-là n’est pas juste une icône revisitée, mais un miroir tendu vers nos instincts les plus profonds et notre rapport à la nature. L’émotion est là, discrète, mais puissante, comme un souffle dans les branches.


En conclusion, La Bête est une relecture audacieuse et profondément marquée par la patte (et la griffe) de ses auteurs. Frank Pé et Zidrou transforment une figure de notre enfance en un symbole plus complexe et adulte, qui ne plaira pas à tout le monde, mais qui mérite qu’on s’y attarde. Et franchement, qui aurait cru qu’un Marsupilami pourrait nous faire philosopher sur la sauvagerie de l’Homme ? Houba houba, mais en mineur cette fois.

CinephageAiguise
8

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Créée

le 27 janv. 2025

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