À ma lecture il y a eu une peur qui ne m’a pas quitté, avant même d’ouvrir le bouquin, puis pendant, et qui a fini par se confirmer à la fin. Ce choix graphique si particulier, cette vue aérienne omnisciente qui réduit tout à des cercles et des schémas, c’est clairement original, ça tente de renouveler le langage de la BD… mais encore aujourd’hui, j’ai du mal à savoir quoi en penser.
Attention, je n’ai pas passé un mauvais moment pour autant! On suit un gamin maltraité qui va se retrouver embarqué dans une drôle d’aventure, entre road movie, polar familial et comédie noire, et le récit tient bien la route. Il y a des rebondissements maîtrisés, une narration qui accroche assez pour qu’on ait envie d’aller au bout. Ce qui est déjà beaucoup, puisque quand je décroche d’un livre, je le sens tout de suite, je peine à tourner les pages.
Là, même si l’histoire n’a rien de révolutionnaire, elle m’a quand même tenu en haleine...
Mais le problème n'est pas à ce niveau là...
Le format réduit est aussi un bon point, pratique en main, moins cher à l’achat, et ça rend la lecture plus simple. Depuis sa sortie, cette BD me faisait de l’œil et je ne regrette pas de l’avoir enfin lue. Alors 10euro et un format plus compact, comme on retrouve souvent l'été, c'était juste idéal pour en profiter.
Mais voilà… au bout d’un moment, une question n’a pas arrêté de me trotter dans la tête... POURQUOI ? Pourquoi ce format graphique si bizarre ? Certains vont trouver ça ludique, moi je n’y ai pas vu de jeux de piste cachés, ni de double sens, juste une lisibilité étrange qui fatigue un peu.
Oui, c’est audacieux de sortir des codes de la BD traditionnelle, mais quand ça bascule vers l’infographie ou le PowerPoint, j’ai du mal à trouver ça beau, et surtout je n’arrive pas à comprendre le sens du geste.
à contrario, pour le récit en lui-même, je ne le trouve pas plat ni convenu comme certains le disent. On pourrait tout à fait imaginer cette histoire adaptée au cinéma ou en roman.
Certes, ça ne révolutionne pas le genre et les personnages ne marquent pas durablement, mais ça ne me gêne pas. Ce qui me gêne, c’est que le style graphique, une fois passé l’effet de surprise des premières pages, m’a donné plusieurs fois envie d’abandonner. Cette façon de lire, un peu trop expérimentale pour une histoire somme toute assez simple, crée une distance.
Et ça me ramène toujours à la même interrogation... Bon sang, pourquoi ?!
Pourquoi réduire les personnages à des petits ronds, pourquoi choisir une vision haute et schématique qui, au lieu de dynamiser les scènes d’action, les désamorce ? Pourquoi nous priver d’un attachement aux personnages ? Si au moins ce choix avait été lié au récit, par exemple une voix divine qui observerait tout, ou une expérience sociale supervisée par une machine omnisciente, j’aurais trouvé ça cohérent. Mais là, rien. Pas d’explication, pas de justification, juste un gimmick qui fait son effet dix pages, avant de me faire soupirer.
Peut-être que l’auteur voulait prouver qu’une BD n’a pas besoin de réalisme ou de figuration pour être forte, que l’abstraction pouvait ouvrir un espace inédit de lecture. Personnellement, je pense que ça rate sa cible. Ça crée de la distance là où j’aurais eu besoin de chair, ça empêche l’émotion de passer là où elle aurait pu être vive. En voulant montrer autre chose, il m’a surtout perdu.
Si c'était pour mettre les dialogues et les silences en avant, comme j'ai pu le lire ailleurs... Une BD classique, ou un roman l'aurait tout aussi bien fait ressentir, alors expliquez moi pourquoi...