Second tome de la trilogie Nikopol, ce tome souffre du déséquilibre lié à toutes les sagas en 3 parties. Si la première offre à la fois une introduction et une histoire complète sans apporter toutes les réponses, cela afin de plaire au spectateur et lui donner envie de continuer, et que la dernière se doit d'être une fin en apothéose, la seconde elle, le milieu doit à la fois faire avancer et pas trop, elle doit mettre en place les éléments nécessaire pour le dénouement.
Or ces éléments, quels sont ils ? Ramener Horus sur Terre et le faire passer un pacte avec Nikopol, permettre à Jill et Nikopol de se rencontrer ... Et après ? Nikopol fils à la tête de Paris ? Les Dieux égyptiens qui débarquent ? Tout n'est que la suite logique de ses 2 premiers éléments. Malheureusement, l'histoire est plus creuse que le premier volet.
Pourtant Enki Bilal fait des efforts, il nous amène à Londres et à Berlin et veut nous montrer que le fascisme puant de Paris n'est pas le seule endroit de dégout de l'humanité. Une guerre religieuse entre musulman et chrétien sévit à Berlin par intermittence. Des extra-terrestres accros au crack font des attentats terroriste à Londres ... Certes, cet univers de dégoût et de saleté que Bilal aime peindre est de retour, mais avec Paris du premier volume on est déjà habitué, et on a le sentiment qu'on veut nous faire avaler la même pilule.
Le personnage principal, Jill Bioskop est le type même de LA femme pour Bilal, on retrouve fréquemment ce stéréotype dans chacune de ses oeuvres. A la fois femme fatale et douce, sentimentale sans être dénué d'un rationalisme déshumanisé, on peut se questionner sur ce que vient foutre une femme de cette trempe dans un monde où tout est si paumé ? L'histoire suit son exile de Londres pour Berlin, la perte de son amant et les meurtres qu'elle va devoir accomplir sur des hommes tous plus pervers les uns que les autres ... Mais où commence la réalité et où s'arrête la fiction engrangé par une drogue d'un genre nouveau qu'elle teste sur elle ?
Jill ne me plait pas. Elle correspond exactement au stéréotype qui m'agace, peu active et sur d'elle, elle ne comprend rien aux puissances qui ont lieu autour d'elle, plus adolescente qu'adulte et totalement déconnecté des autres elle est pourtant d'un nombrilisme rare. Bref, elle m'énerve.
Les autres personnages sont cependant plaisants, ou plutôt, tous les personnages sont plaisant, mais on n'est pas forcé de tous les aimer (moi, c'est Jill qui me dérange). Nikopol est de retour, c'est un plaisir de le revoir. Horus aussi, encore plus mégalo si c'était possible.
John, l'autre personnage important est très intéressant, un extra-terrestre. Le seul de sa race semble-t-il ? On peut supposer mille et une chose sur son sujet. Ma version à moi est que John est un Dieu, comme Horus ou Anubis.
Bien entendu, Bilal a apporté d'autres réponses avec son films, notamment sur le lien entre Horus et Jill, mais j'aime à penser que tout n'est pas semblable dans les réponses de la BD et celle du film.
En dehors de ça, c'est bien, c'est même très bien. Histoire prenante, personnage intéressant, univers passionnant, graphisme fabuleusement hors-norme. Bref du grand Bilal. La raison qui m'a donc poussé à argumenter négativement est de prouver que même si ce tome est très bon, par rapport au précédent (et au suivant) il reste le vilain petit canard qui n'a d'intérêt principalement que parce qu'il est dans la trilogie Nikopol. Certes, on peut le lire tout seul, de coté, mais son potentiel artistique reste moindre que les deux autres tomes.
Malgré tout, l'aisance de l'écriture à la première personne de Jill, l'aspect très intimiste (encore plus que le tome précédent) de l'histoire, et le graphisme magnifique, moins sombre et sale, mais plus porté vers l'individu que le premier, saura séduire les lecteurs.
Je le recommande à vos yeux.
Mais je me demande quand même si attendre 6 ans pour sortir le tome 2 n'est pas la preuve que l'histoire devait être un one-shot à l'origine ?
