La fille du vent est sans conteste mon album préféré de la série, sans doute à cause des souvenirs d'adolescent qui s'y rattachent, de tendre souvenirs lointains auxquels le charme de la belle japonaise n'est pas étrangère.
Mais viens le temps aussi où il est nécessaires d'interroger ces souvenirs alors voici ci joint une fiche de lecture.
Titre : La fille du vent


Auteur : Roger Leloup


Publication : Spirou
Publication album : Dupuis 1979


Sources :


Album utilisé : Réédition dupuis 2004 sans modifications


Éléments de critique externe :
Prépublier par dans « Tintin » environ un an avant la publication en album.


Éléments d'analyse :
L'album s'ouvre sur l'atterrissage d'un DC 10 à l'aéroport d'Hong Kong et agit comme un lever de rideau (cf: fiche transport paquebot et avions).


Spatialement l'album fonctionne d'abord comme une descente par étape, une chute contrôlée du ciel vers les abysses (P 3-30)
– P3 Atterrissage d'un avion de ligne à Hong Kong.
– P6-7 Yoko et ses amis (Vic et Pol) embarque d'une jonque dans un hydravion, appareil hybride qui s'élève dans les airs tout en restant rattacher à l'élément marin.
– P8-9-10 Yoko saute de l'hydravion en parachute pour retourner sur l'ile de son enfance.
– P26-27-28 Yoko, Vic et Pol descendent dans une cloche de plongée pour rejoindre la base secrète sous marine de Kazuky.


suivit d'une remonté plus rapide (P 36-44).
– P36-37 Le trio s'échappe de la base en sous marin.
– P40-41-42-43 Yoko et Aoki embarquent dans des avions fusées pour détruire le cyclone.


Ce parcours géographique se double d'un confrontation au passé, Yoko retrouve d'abord le monde de son enfance, puis se confronte à l'histoire du japon.
La confrontation du passé prend la forme d'une répétition rédemption, le passé revit pour être corrigé. Yoko l'annonce dès le début.
P 5 4/2 :
Yoko Tsuno : « Ce serait retomber dans les erreurs du passé... Mon père s'y opposera !... »
et le répète plus tard.
Yoko Tsuno : « Je suis bien éveillée père ! Trop même pour constater que l'honneur de ma famille aurait dû s'effacer devant l'intérêt du Japon »


Sur l'ile (dont elle est tombé du ciel) Yoko revit des épisodes de son enfance, elle se rend d'abord au temple Boudhiste puis chez Aoki qui correspond à une nounou, et reproduit un accident dans le laboratoire de son père.
P17 3/2 :
Yoko : « Je me souviens, j'avais alors quinze ans, avoir vu cette machine s'affoler !... »


Ce parcours se double également d'un lecture mythologique du monde.
– Yoko et ses compagnons apparaissent comme des anges descendu des cieux pour rétablir l'équilibre des éléments. Déséquilibre qui prend sa source dans l'orgueil et l'histoire des hommes mais qui influe jusqu'au climat.
P 6 1/1 :
Colonel Tagashi : « … ces expériences influencent le climat des régions côtières du Japon et de la Chine, où les récoltes sont menacées... Le vent en colère n'a pas de frontières!... »


Si le thème de cet album peut faire écho à des préoccupations écologiques, il propose surtout une série de correspondances symboliques et d'interactions entre psyché humaine / histoire / mécanisme des éléments.


– Les profondeurs sous marines apparaissent comme le repère du mal, créant un lien entre le mal d'hier et celui du jour (la base secrète de Kazuky est amarrée à l'épave du cuirassé Yamato coulé en 1945).
– Yoko apparaît comme un ange exterminateur
– Elle endommage les installations de Kazuky.
P36 3/1, 2, 3 :
Yoko : « Avant de remonter je veux régler mes comptes avec Kazuky !...
Vic : Que veux tu faire ?
Yoko : Frapper Kazuky dans son orgueil... saboter ses fusées !... »
Une fois la chose accompli elle conclut :
P37 1/1 :
Yoko : « Les griffes du tigre sont limées !... »


La trajectoire d'Aoki résume ce parcours ancien kamikaze ayant raté sa mission en 1945 il se sacrifie pour préserver le japon d'un typhon.
P43 2/4 :
« Sans hésiter, Aoki replie l'autre aile et allume la postcombustion, transformant son appareil en torpille humaine... Réalisant enfin son idéal inassouvi, l'ancien kamikaze offre sa vie au Japon...
Aoki : Banzaï ! »
L'histoire arrêtée reprend son déroulement pour s'accomplir dans un sens qui va permettre de dépasser le traumatisme passé qui stop toute évolution. Le principe dramatique de l'histoire racontée repose sur le principe de retour vers un traumatisme ancien qui est alors revécu pour réorienter le déroulement historique.
Il revient aux nouvelles générations de corriger les erreurs de celle des parents.


L'histoire de l'héroïne rejoint là l'histoire général, en perdant Aoki Yoko apprend à grandir en renonçant à son enfance.
P46 4/1 :
Yoko : « Je croyais retrouver dans la joie tous mes rêves d'enfant et maintenant, ils se voilent de tristesse...
Sa mère : Avec le temps, ils prendront un autre sens »
Tout comme le Japon affronte ses anciens démons.
P46 2/2 :
Pr Tsuno : « […] Il est surprenant que ''la bombe'' [atomique] n'ait suscité aucunes protestations !...
Colonel Tagashi : L'holocauste d'Aoki, se jetant dans le typhon pour sauver le Japon, a soulevé l'enthousiasme des écologistes les plus tenaces ! »


Un regard porté sur l'ailleurs :
Cette aventure est aussi l'occasion d'illustrer la fascination qu'exerce la réussite japonaise sur l'occident à une époque où celui ci est qualifier de « 3° grand » et E.P.Jacobs a déjà utilisé le Japon comme cadre des aventures de Blake et Mortimer « Les trois formules du Professeur Sato ».


La fascination s'illustre d'abord par la profusion des moyen de transport et de communication technologiques (Avions, Navires, Parachute, sous marins, TV, etc...).


Mais l'album trahit aussi une incompréhension vis à vis de la civilisation japonaise.
Le bouddhisme est assimilé à la religion chrétienne
– Yoko lui demande aide.
P 11 2/2, 3 :
Yoko : « Oh ! Tu m'impressionneras donc toujours autant !... Il est vrai que je ne viens jamais te voir que pour demander !... // … Mais cette fois, Bouddha, j'ai vraiment besoin de ton aide !... »


– On invoque le bouddha comme un dieu équivalent à celui des chrétien
P 42 1/1 :
Aoki : « Ne défie pas Bouddha Yoko !!... Ce n'est pas le moment !!... »


– Bouddha est montré comme un dieu punisseur.
P 45 2/2, 3 :
Yoko : « Je ne pensais qu'à humilier Kazuky !... Me croyant « La fille du vent » // … J'ai défié Bouddha !... il m'a punie en m'enlevant Aoki !... »


Pour l'essentiel le Japon présenté correspond aux cliché que s'en font les occidentaux :
– Les villes sont absente (alors qu'on aperçoit Hong Kong au début de l'abum P 3, 4, 5)
– Le peuple japonnais n'apparait pas
– Le paysage de l'ile ressemble à un paysage d'estampe (P13 4/3 & P14 1/ 2).
– Les habitations sont de style traditionnel où le raffinement est de mise (P 15 3/1).
– Les femmes vivent dans l'ombre des hommes
P 15 3/3 & P 16 1/1 :
Yoko : « Et … Ma mère Aoki ?...
Aoki : Comme toujours à l'ombre de ton père et de son équipe scientifique ! »
Le mère de Yoko n'apparait qu'à la toute fin du récit (P 46) confinée dans un rôle de femme d'intérieur (à table, elle passe les plats tandis que les hommes discutent des conséquences de l'aventure). A l'exception de Yoko qui se revendique autant européenne que japonaise les femmes sont absente de l'aventure .
P 8 1/3 :
Yoko : « Je me sens de cœur aussi européenne que japonaise... »


– La mentalité japonaise continue à être présenté comme étrangère et difficile à comprendre pour les occidentaux.
Le caractère des japonnais est présenté comme axer sur l'orgueil et le sens de l'honneur, il correspond au clichés que possède les occidentaux sur le Japon.
P 2/2, 3 :
Yoko : « Je commence à comprendre l'attitude de mon père !... // s'il tente publiquement de dévoiler les aspirations politiques de Kazuky , on l'accusera d'échec et d'avoir gaspillé l'argent qui lui a été offert... Il est donc condamné à vaincre techniquement son adversaire !
Pol : C'est insensé !...
Vic : Non ! Japonais ! »


P 36 1/ 2 :
Vic : « Vous allez lancer cette fusée Kazuky !...
Kazuky : Un japonais meurt plutôt que de céder à votre race !... »


Même si l'auteur se plait à parodier les clichés que les occidentaux véhicule sur le Japon, comme en témoigne la salutation dont Pol gratifie le père de Yoko.
P 37 2/1 :
Pol : « Le méprisable ver de terre que je suis s'incline devant votre inestimable grandeur !... »


L'album plaide finalement pour un rapprochement des cultures Occident / Orient qui s'illustre dans le couple Yoko / Vic.
P 45 2/1 :
Vic : « Je ne suis pas japonais Yoko, mais je partage ton désarroi... ce qu'Aoki vient de faire l'avait prévu et désiré de longue date... »


Une nouvelle héroïne :
Yoko Tsuno incarne un nouveau modèle de héros, elle ne cherche pas à se ranger sous la protection de figure parentale mais s'affirme clairement par rapport à elles, en l'occurrence ses parents biologique. Il est clairement dit que les parents sont faillible et commettent des erreurs. Erreurs que la génération des enfants doit réparer.


Yoko fait la leçon à son père.
P 31 4/3 & P 32 1/1, 2 :
Yoko : « Je suis bien éveillée père ! Trop même pour constater que l'honneur de ma famille aurait dû s'effacer devant l'intérêt du Japon !.. // Vous avez voulu vaincre..et vous risquez d'être vaincu ! … Pardon,Père, je vous fais de la peine!...
Pr Tsuno : C'est dur d'être jugé par sa fille et de lui avouer qu'elle a raison. »


et veille à tenir sa mère à l'écart de sa vie d'aventure.
P 46 4/2, 3 :
La Mère : « Tu parlais d'un voyage … Fais-le et reviens-nous guérie !...
Yoko : Oui … Dans les étoiles, où une petite fille à la peau bleue et aux cheveux d'or m'attend !...
La Mère : Tu vois ! Tes rêves reviennent
Yoko : Ce n'est pas un … (en pensée) Non ! … Me savoir partie pour une nouvelle aventure l'inquiéterait ! »


Les parents n'apparaissent plus comme des modèles à imiter et à servir mais comme des personnes qu'il faut apprendre à remplacer.

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le 11 oct. 2020

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