La terre verte est un album édité chez Delcourt de plus de deux-cent-cinquante pages. J’ai découvert son existence dans la revue dBD. Le fait d’être scénarisé par Alain Ayroles me l’a rendu immédiatement attractif. Je suis en effet tombé sous les charmes de nombre de ses créations. Garulfo, De capes et de crocs, Les Indes fourbes ou encore L’ombre des lumières… Pour la réalisation de ce nouvel opus, il a collaboré avec Hervé Tanquerelle dont je découvre le travail à cette occasion.
L’histoire se déroule au Groenland durant le Moyen-Âge. On y découvre les autochtones, descendants des vikings, tentant de survivre dans cette contrée hostile. Lors d’une expédition, arrive un homme au passé empli de zones d’ombre. En tant que soldat, il accompagne l’installation d’un clergé local. Rapidement, il semble voir d’un œil intéressé cette « terre verte » et cherche à s’investir dans son fonctionnement. Pour le meilleur ou pour le pire ?
L’intégralité de l’histoire se déroule au Groenland, coupé du monde. Le petit nombre d’habitants fait qu’on a parfois le sentiment d’assister à un « Robinson Crusoé en équipe ». La dureté du climat accentue ce sentiment d’isolement et de huis clos. Je trouve le travail sur l’ambiance assez exceptionnel. En ce sens, je me dois de mettre en lumière le travail d’illustration remarquable d’Hervé Tanquerelle. Il possède un trait original qui peut surprendre au premier contact. Néanmoins, je dois bien avouer qu’à travers ses dessins, il m’a complètement happé. Je me suis senti immergé dans ce village. Cela a rendu ma lecture d’autant plus investie et intense.
À la manière d’une pièce de théâtre, la narration est partagée en actes et en scènes. Vu le nombre important de pages, ce découpage facilite la lecture. En effet, cela la structure et permet ainsi de s’approprier plus facilement le temps qui passe ou les conséquences des différents actes et décisions qui alimentent l’intrigue. C’est d’autant plus important que la narration est dense. Les rebondissements sont nombreux.
L’évolution dramatique du propos est joliment construite. On sent la montée en puissance de la folie d’un homme au fur et à mesure que les pages défilent. Le héros devient incontrôlable et génère une forme d’angoisse tant on a le sentiment qu’il est en train de perdre toute humanité. Son ambition, sa paranoïa, son désir de vengeance dictent chacune de ses décisions au détriment des membres de sa communauté qui l’avait accueilli avec bienveillance…
Ne souhaitant pas vous gâcher la découverte de l’album, je me garderai d’entrer davantage dans les méandres de l’histoire proposée par Ayroles et Tanquerelle. Je ne peux néanmoins insister une nouvelle fois sur la qualité de l’ensemble. Le scénario et les dessins s’associent parfaitement pour offrir un voyage immersif intense et passionnant. Je ne peux donc qu’inciter tout le monde à partir à la rencontre de cet album qui vaut incontestablement le détour.