Luisa, ici et là
7.4
Luisa, ici et là

BD franco-belge de Carole Maurel (2016)

Carole Maurel est l’une de mes dessinatrices préférées. Je l’ai découverte par son blog où elle publie les chapitres de « Luisa ici et là ». Puis, elle a cessé de mettre en ligne cette histoire, la réservant au format papier. Deux ans plus tard, j’ai enfin pu connaître la destinée de Luisa. Pourquoi si longtemps ? Parce que le pavé de 270 pages, publié par La Boîte à Bulles, est vendu au prix prohibitif de 32 euros…


Luisa a 15 ans. Elle s’endort dans le bus et se réveille à Paris, 18 ans plus tard. Complètement perdue, elle va finir par retomber sur son moi du futur. Commence alors les quiproquos, mais aussi l’occasion de faire le point sur sa vie… Pour la Luisa ado et la Luisa adulte !


Par ce procédé fantastique, Carole Maurel questionne avant tout un personnage à deux époques de sa vie. « Que dirais-je à l’ado que j’étais si je la rencontrais ? » Voilà l’idée du livre. Mais ça fonctionne dans l’autre sens : « Que dirait l’ado à l’adulte ? » La confrontation des deux Luisa est explosive, chapeauté par une voisine au caractère bien plus doux…


Les 270 pages du livre s’expliquent par un rythme très lent et pas de multiples scènes de discussion plus ou moins pertinentes. Cependant, ce sont tous ces dialogues qui font les personnages et qui nous amène à nous les rendre touchants. La longueur de l’ouvrage permet de les faire évoluer. Quelques trouvailles, disséminées ici et là relancent l’intérêt régulièrement. Bien que les Luisa passent leur temps à se crier dessus, la présence de l’une et de l’autre les fait évoluer. Au final, j’ai été très touché par la fin de l’ouvrage. Même si tout est finalement assez classique (consensuel même ?) dans le scénario de Carole Maurel, il parvient à nous émouvoir et c’est tout ce que l’on demande.


Au-delà de l’histoire, l’auteure joue beaucoup sur la nostalgie. L’histoire se passant en 2013, Luisa vient donc de l’année 1995. Du coup, tous ceux qui ont été adolescent à cette période verront leur nostalgie se réveiller. Carole Maurel appuie fortement sur le bouton des souvenirs. C’est une des parties les plus réussies de l’ouvrage. Mais pour en profiter pleinement, il faut être dans la bonne tranche d’âge. Un livre prévu pour les trentetaires ?


La réussite de l’ouvrage tient donc aussi beaucoup du dessin. J’adore le trait de Carole Maurel, ce n’est pas un secret, et elle parvient à montrer les émotions de ses personnages avec subtilité. C’est son trait relâché qui lui permet aussi de dessiner autant de pages sans laisser de côté la qualité d’ensemble. Les couleurs sont particulièrement réussies et renforcent les ambiances mais surtout la douceur de l’ensemble. On appréciera aussi les quelques planches plus inventives graphiquement, qui annoncent déjà certaines réussites futures de l’auteure.


« Luisa, ici et là » est un ouvrage assez classique dans ses thèmes traités. Cependant, porté par un très beau dessin et des personnages touchants, il réussit dans sa mission. Si les histoires de trentenaires qui font le point sur leur vie ne vous intéressent pas, passez votre chemin. Sinon, courrez chez votre libraire.

belzaran
8
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le 26 avr. 2018

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belzaran

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