Man Machine Interface - Ghost in the Shell, tome 4 par 0eil

J'aime vraiment beaucoup Ghost in the Shell. C'est un fait, je suis tombé (un peu grâce à GITS) dans la grande marmite du cyberpunk fut un temps et depuis, j'en suis jamais vraiment ressorti. Je me relis régulièrement du Gibson, à qui j'ai fait des infidélités du côté d'autres auteurs tout aussi bons, mais faut avouer, ce qui me rend tout fou, c'est quand même les aventures de Motoko et de sa team. Je suis fan à jamais de la série animée, les deux saisons, une perle rare dans l'horizon du manga, une bonnassitude totale, intelligente, proche du matériel originel. Du coup, devant la faible qualité d'Arise (ô rage, ô désespoir !) et pour faire face à mon appétit insatiable en la matière, il me fallait bien me rabattre sur quelque chose et ce quelque chose fut la seconde partie des aventures de Kusanagi. Ce volume s'ouvre donc après que le Major ait fusionné avec le Puppet Masta (si je me souviens bien). Son identité s'en est donc allée dans la toile et l'on suit un cyborg ayant reçu une partie de sa personnalité, travaillant pour un grand groupe pharmaceutique et qui va devoir révéler un complot complexe caché derrière des agissements terroristes.

Le moins que l'on puisse dire, pour débuter, c'est que Shirow a découvert qu'en fait, Kusanagi était un personnage ultra-sexy et a décidé de mettre tout son talent à exposer son corps bien comme il faut. Résultat, les plans se permettent souvent de faire pointer le tissu le plus intime couvrant la plastique du Major, au point que la tenue qu'elle arborait dans la première saison de SAC pourrait presque passer pour parfaitement décente. Bon, Shirow sait tenir un crayon, alors avouons que cela n'a rien de désagréable, même si je n'avais pas le souvenir que cet aspect ait été aussi appuyé dans le précédent volume - quoiqu'on y ait fait la mention d'une sexualité bien débridée de la part du Major, disparue dans la série. Bref, ça s'assume, même si ça surprend un peu.
Au milieu de toutes ces petites culottes affichées sans complexe en plein milieu de scènes de baston, on prend violemment le graphisme mu par ordinateur dans la tronche. Entre-temps, Shirow a apparemment découvert aussi photoshop et tout un tas d'effets cools pour mettre en image la matrice de façon un peu plus visuel, visuel repris d'ailleurs dans les séries après coups. Résultat, c'est plutôt sympa, mais force est de constater que malheureusement, l'auteur en use et abuse au point que les deux tiers de l'intrigue se passe dans la matrice, où Motoko hacke, contre-hacke, check, analyse, fait des trucs super pointus aidée de ses I.A. dans des duels virtuels... pas toujours très lisibles, mais on y reviendra. La petite déception vient surtout du fait que cela réduit, graphiquement, la portée de l'histoire : la matrice, même joliment mise en forme, ça reste quand même un utilisateur qui flotte dans l'espace, immobile, avec de grands cercles futuristes autour de lui. Même si le découpage des planches tentent de réduire la répétitivité de l'action, au bout d'un moment, ça commence à se sentir. Dommage, parce que les passages hors de la matrice sont bien sympas (tout le passage dans l'usine où un des corps de Kusanagi court partout pour limiter la casse des hackers ennemis est bien classe).
Maintenant, mettons quand même le doigt sur ce qui m'a quand même vraiment terrassé. Je ne suis pas un novice en matière de cyberpunk et je sais combien cela peut parfois être très obscur, mais ici, Shirow a réussi le pari de créer une intrigue particulièrement hermétique. Mais vraiment hermétique. Résultat, on est souvent laissé en plan, ne comprenant réellement ce qui vient de se passer qu'une fois que le personnage l'explique clairement, en conclusion à une action. En gros, on voit l'héroïne faire des trucs très classes, dire des trucs trop cools, déployer des I.A., des virus, des attaques, des anticorps, on imagine bien une bataille épique mais... aucun moyen de saisir les enjeux. Jusqu'à ce que Motoko lance "Ah merde, ils sont forts, on se fait avoir" et là, on imagine que l'ennemi a le dessus. C'est particulièrement gênant lorsque cela cache un rebondissement dans l'action (du genre, le hacking du Stabat Mater, où je n'ai toujours pas bien saisi ce qu'il se passait). D'autaut plus qu'au final, l'histoire, une fois arrivé à son terme, n'a rien de bien compliqué et aurait pu être réellement écrite de façon plus claire et bien moins édifiante. En laissant, par exemple, l'héroïne enquêtait sur le terrain, comme elle le faisait par le passé, plutôt que de la laisser constamment connectée, même si on voit bien où l'auteur veut en venir, soulignant l'ultra-connectivité d'un univers où finalement, on peut pratiquement mener une guerre secrète sans quitter son fauteuil. Why not, mais cela aurait mérité une approche moins frontale.

En conclusion, un tome trop obscur, trop hermétique, trop centré sur la cohésion de son univers et pas assez sur sa lisibilité. Ce qu'il y a d'intéressant, c'est finalement de voir tout ce qui a servi d'inspiration pour SAC, tout ce qui a été exploité de façon bien plus saisissante et intelligente dans la série animée. Peut-être que Shirow aurait dû prendre davantage son temps et développer sur davantage de volumes son histoire d'une grande densité pour qu'elle puisse prendre le temps de se rendre compréhensible. Ou peut-être a-t-il simplement voulu faire comprendre au lecteur que cet univers est trop différent du nôtre pour être facilement appréhendé. Dans ce cas, c'est réussi : je ne suis même pas convaincu d'avoir bien compris la fin !
0eil
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le 9 févr. 2014

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