On ne parle pas de ces choses-là, Marine Courtade, Alexandra Petit, Casterman/La revue dessinée
Marine a été victime d’inceste. Le violeur c’est son grand-père, "le père de mon père" comme elle l’appelle. Il a également violé d’autres de ses petites-filles. Devenue journaliste, Marine décide d’enquêter au sein de sa propre famille pour comprendre comment et pourquoi ses membres qui savaient n’ont rien dit et pourquoi c’est toujours un non-dit familial.
Marine va interroger ses oncles et tantes, ils sont, en comptant son père, 7 enfants. Elle n’est pas toujours bien reçue. Le déni familial est très ancré, la volonté de laisser enfouie cette histoire, de ne pas salir l’honneur et le nom de la famille. Les tentatives de justification de tels actes arrivent : l’enfance du grand-père, parler de cela c’est faire plus de mal que de bien donc laissons enfoui…
C’est un album édifiant et important, nécessaire même. Il montre clairement les dégâts que provoquent, des années après les agressions sexuelles, le silence des adultes qui pourtant savent. Il expose également ce qu’explique dans le dossier qui le suit l’anthropologue Dorothée Dussy, le fait que l’inceste se transmet dans les familles de génération en génération.
Marine Courtade, si elle est parfois découragée, parfois en colère ne juge personne ni n’accuse, elle veut comprendre comment on peut en venir à oublier, comment le non-dit détruit, comment l’incesteur instaure un climat de peur, de dégoût tel qu’il empêche beaucoup de gens à réagir.
Le dessin d’Alexandra Petit, particulièrement beau et soigné, parfois muet ou peu disert est très marquant et souligne en douceur le propos.