Sept personnages
5.4
Sept personnages

BD franco-belge de Fred Duval et Florent Calvez (2011)

Seconde tome de cette nouvelle saison de la saga Sept, Sept Personnages offre un pitch pour le moins surprenant, puisqu'en 1673, au lendemain de la mort de Molière, 7 personnages du célèbre écrivain décide de découvrir qui est à l'origine de la mort de l'illustre artiste. L'idée est pour le moins surprenante mais pas désagréable pour autant, avouons le. Malheureusement Fred Duval offre au lecteur un scénario d'une qualité plus que faible qui ne convainc pas et dégoutera même les amoureux de l’œuvre littéraire de Molière.

Le scénario étant déjà posé, je ne peux me permettre de le développer plus sans risquer de spoiler. On va donc en rester là. Et pour ne pas écrire un paragraphe pour ne rien dire, soulignons les quelques points positifs. Le récit offre un vrai récit, une vraie histoire, un vrai scénario. On a pas une simple petite idée expédiée en 54 planches. Non, on a bien le sentiment d'assister à une histoire complète. Cela entraine cependant un soucis : une narration un peu indigeste par moment tant les éléments se pressent les uns à la suite des autres. Forcément, vu le format, faire autrement paraissait difficile. A voir si Duval a fait le bon choix, personnellement j'ai pris sur moi.
Le problème étant que derrière toute la construction, on a quand même une histoire franchement moyenne pour ne pas dire très mauvaise. Car le hic est que les personnages (Scapin, Dom Juan, Harpagon, etc …) ont un statut qui nous est inconnu. Ils semblent être des personnages bel et bien réel, à propos des quels Molière aurait simplement énoncé les faits, rien de plus. Pourtant Molière apparaît comme un génie, quel est le génie là où il ne fait que dire ce qui fut fait ? Le travail de l'historien deviendrait il celui de l'artiste ?
Je pensais voir des personnages qui auraient inspirés les œuvres de Molières ou alors, au contraire, les personnages fictifs venir dans la réalité pour venger leur créateur. Ni l'un ni l'autre, le statut des personnage est tellement complexe qu'on ne comprend pas certaines paroles. Ainsi, un complot vise à les assassiner, mais pourquoi ? Ils sont nommés comme étant « les personnages de Molière », pourtant, tout leur traitement apparaît pour les rendre réels. Même Dom Juan qui revient des enfers pour l'occasion. Ce point là est bigrement mauvais tant on ne sait où on navigue. Le problème n'est pas tant que ça n'aille pas à ma convenance que l'impression que Fred Duval ne sait pas lui même quoi en faire. Enfaite, plutôt que d'être un avantage et de créer un scénario original, on assiste à une enquête plutôt banal où les protagonistes apparaissent comme des poids. Nous avons une ligue des gentlemen extraordinaires au rabais !

D'autant plus que l'avancé de l'enquête renvoie aux petits détails habituels des intrigues se déroulant lors du siècle de Louis XIV, rien de bien novateur donc. Encore plus à cause d'une narration, une nouvelle fois, lourde. Certes, on sait que c'est pour entrer de nombreuses informations, mais ça rend la lecture encore plus complexe. Lecture qui n'est pas aidée par le statut changeant des personnages, une nouvelle fois.
Je dois dire que la tension va et vient assez allégrement, et j'ai bien eu du mal à sentir le dynamisme. Au final, qu'est ce que cherché Molière ? Pourquoi a-t-il été assassiné ? Même ces réponses, on ne les a pas vraiment.
Quant aux personnages, je dois avouer qu'ils apparaissent comme une relecture simplifié des œuvres originales. Tant mieux, car les autres manquent de charismes, de prestance ou même de caractéristique. Même le lieutenant De La Reynie semble si peu charismatique … Le pauvre !
Pour ce qui est du dessin et de la couleur, sans être mirobolant, le style de Florent Calvez est bien placé. Il a préféré respecter les tenues d'époques plutôt que rendre sa glamour, bon choix. Malheureusement les expressions faciales de ces personnages apparaissent comme trop peu développés et certaines nuances manquent clairement. Dans certaines scènes, on passe du visage de la joie à l'énervement sans transition et c'est vraiment regrettable. Surtout pour une BD où les gros plans sont légions.

Malgré une idée vraiment originale et un dessinateur qui ne l'aurait pas ralenti ou baissait la qualité de son œuvre, Fred Duval offre un récit très moyen. Se confrontant à la difficulté d'un scénario développé en seulement 54 pages, il amène une grande lourdeur, qui n'aide pas du tout vu la médiocrité du traitement scénaristique. L'idée d'origine aurait pu donner une BD magnifique, vraiment splendide et amenant des réflexions intéressantes sur le rapport entre le scénariste et ses créations. Malheureusement, nous avons à la place une BD très médiocre. J'espère pour Duval qu'il ne croit pas à la vie après la mort, sinon il doit déjà préparer ses excuses à Molière.
mavhoc
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le 9 juin 2014

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