Il est rare de se dire à la lecture d'une Bd qu'on tient là quelque chose d'énorme.
C'est indescriptible mais c'est ce que j'ai ressenti en lisant Seraphim.

Il faut dire que la promesse était alléchante. L'association de 2 grands noms de la japanimation (le 1er en pleine gloire et le second en devenir) ne pouvait que faire rêver.
Mamoru Oshii et Satoshi Kon sont des auteurs dans le sens noble du terme. Des créateurs avec des univers propres qu'ils ont construits et rendus tangibles au fil de leurs créations.

Dans Seraphim, c'est surtout l'univers d'Oshii qui ressort. Scénariste du manga, c'est aussi le plus expérimenté des 2 à cette époque.
Un peu comme le Opus de Satoshi, on prend un réel plaisir à retrouver les thématiques chères au réalisateur de Ghost in the shell : Seraphim brasse des tas de sujets , ésotérisme, politique, religion (et même le basset est de la partie avec un rôle plutôt actif ).
Cela donne une oeuvre avec un démarrage un peu lent (les 2 premiers chapitres se concentrent sur les 2 protagonistes masculins), bavard mais très vite passionnante à condition qu'on rentre dans le rythme Oshiien (même si celui-ci est largement compensé par le travail de Satoshi Kon)
Le voyage est intense, l'atmosphère étrange ( la maladie des anges est une excellente trouvaille qui rend le tonalité du récit très chargée voire étouffante dans certaines scènes ), les personnages classiques prennent peu à peu forme, leurs passés se dévoilent, l'intrigue prend et petit à petit , on se rend compte qu'on ne peut plus lâcher le bouquin.

Et Satoshi Kon dans tout ça ? Et ben il illustre ça à la perfection. Son dessin est déjà très solide, dans la droite lignée d'un Otomo (avec qui il a travaillé) et la narration casse très largement les codes qu'on a l'habitude de voir dans les animés d'Oshii. Les plans sont plus dynamiques, diversifiés mais aussi moins mélancoliques.

L'osmose entre les 2 auteurs a l'air de fonctionner, l'histoire est lancée et les diverses intrigues nous promettent une saga immense , une sorte de mixe entre Akira et Nausicaa.
Et pourtant, tout s’arrête à la fin du chapitre 16.
Partant d'une réelle envie de collaboration et d'échange, il semblerait que les univers des 2 auteurs se soient entrechoqués. Il faut dire que quand on connait bien le travail de ces 2 monstres, on se rend assez vite compte qu'ils ont peu de choses en commun (surtout dans le traitement des idées) et peut être que Kon s'est senti de plus en plus en décalage avec cette histoire et les envies d'Oshii surtout que je le répète, l'oeuvre était prévue pour durer

Au final, ça donne l'impression d'avoir un embryon de chef d'oeuvre et ça en rend d'autant plus la frustration du lecteur immense.
On gardera de tout ça , un univers riche, une ambiance pesante et puissante et le superbe travail graphique de Satoshi.
C'est déjà beaucoup mais sans doute pas assez pour nous consoler.
Stephane_Hob_Ga
6
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le 30 nov. 2013

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