Les éditions Akata ont à cœur de proposer des mangas autobiographiques touchants qui abordent des thèmes dur avec beaucoup d'honnêteté.
L'éditeur a eu la bonne idée de lier l'œuvre à l'association « Les petits frères des pauvres » en leur reversant 5% des bénéfices du manga. (Il me semble que cette opération dure jusque début 2022).
Shikanabe (l'auteur) est un jeune homme qui viens de perdre sa grand-mère alors qu'elle souffrait de démence sénile. Le livre s'ouvre sur un prologue montrant la relation douce et aimante entre les deux personnes malgré les difficultés amenées par la maladie. La scène a eu lieu peu de temps avant le décès de la grand-mère et l'on voit le jeune homme tourmenté par les remords et la tristesse.
On découvre ensuite l'enfance de Shikanabe, son adolescence et les débuts de la maladie de la personne qui l'a élevé. L'auteur a en effet grandit seul avec sa grand-mère. Ses parents ayant tout les deux quitté le domicile laissant une grand-mère et un enfant seul avec très peu de revenus.
On voit combien cette vieille dame fut un pilier et un grand secours pour ce petit garçon seul et mis en difficulté par l'absence de parent et la pauvreté.
Cette enfance remplie de frustration malgré l'amour reçu de la grand-mère explique les agissements de Shikanabe une fois adulte sans pour autant les justifier et c'est je trouve une des belles force de ce manga.
En effet Shikanabe s'est éloigné de sa grand-mère en se focalisant sur son petit boulot et sa petite amie une fois qu'il est devenu un jeune actif. Il vivait toujours chez sa grand-mère mais lui accordait peu d'attention. La personne âgée s'est mis à avoir des agissements étranges et des peurs irraisonnés. La maladie était là mais elle ne fut pas tout de suite découverte. Le besoin de s'occuper de soi et la difficulté à admettre la maladie d'un proche font parties des raisons courantes de la découverte tardive d'une maladie.
On ressent bien les tourments par lesquels Shikanabe est passé et c'est difficile de lui pardonner mais aussi de lui en vouloir.
Tout le long du manga, l'auteur parle de la difficulté à aider sa grand-mère et à être présent pour elle. Le témoignage sur ces difficultés vécues est vraiment intéressant et pertinent. On ressent pleinement la culpabilité de l'auteur mais aussi la souffrance de voir sa grand-mère souffrir tout en n'ayant plus le même lien avec elle.
Graphiquement l'œuvre est assez surprenante. Le dessin pique un peu les yeux quand on ouvre le manga. Un dessin simple est parfois le meilleur moyen de véhiculer un propos, pourtant, il faut bien avouer que le dessin est ici assez repoussant en apparence. On s'y habitue malgré tout après quelque pages et l'ensemble se montre assez inventif. Les métaphores visuelles sont légions et fonctionnent très bien pour expliciter le ressentit et les pensées de l'auteur. La mise en page est très simple mais la narration est hyper efficace et nous plonge dans ce récit tout sauf drôle au point qu'il est difficile de décrocher malgré le visuel peu attractif.
On s'attache très rapidement aux bouilles de Shikabane et de sa grand-mère. Une énième preuve qu'un dessin n'a pas besoin d'être « beau » et virtuose pour fonctionner et rendre un récit intéressant.
Je pourrai juste reprocher au manga de ne jamais adopter le point de vue de la grand-mère ou de la tante aidante. Bien sur je comprends que c'est un manga cathartique visant à montrer la difficulté d'être aidant pour une maladie si complexe au quotidien mais j'aurai personnellement trouvé l'œuvre plus profonde et intéressante en s'ouvrant à d'autres point de vue et réflexion.
Là, on a parfois l'impression que l'auteur continue de regarder son nombril et de s'autoapitoyer comme dans certaines scènes du manga justement.
Le souvenir ému d'un sourire.. cette histoire met en avant un souvenir aussi beau qu'émouvant montrant toute la tendresse que ressent Shikanabe pour sa grand-mère.
Souvenirs en bataille est un bel hommage de la part d'un auteur qui verse toutes ses tripes sur ses planches à dessin.
Une œuvre qui montre avec justesse combien il est difficile d'aider ses proches quand ils sont atteints d'une maladie telle que démence sénile.

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le 6 juin 2021

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nolhane

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