Une bande annonce à l'origine d'un engouement général


Début janvier, alors que le monde entier a encore les yeux braqués sur Star Wars VII, J.J Abrams programmait tranquillement la sortie de sa prochaine production. Alors que personne ne l'attend, la bande annonce de 10 Cloverfield Lane débarque sur la toile suscitant l'engouement général des internautes.


On y découvre 3 personnages, tranquillement installés dans un bunker, faisant passer le temps avec des puzzles et des parties de Monopoly, le tout écoutant un air de Tommy James And The Shondells ironiquement appelé I Think We're Alone Now . On comprend vite qu'on ne va pas faire des puzzles très longtemps, la situation dégénère, et on s'aperçoit que le danger n'est pas où il devrait être. Le monde extérieur et intérieur se confondent jusqu'à créer la confusion dans l'esprit du spectateur. Ce jeu tacite avec le spectateur, censé être la force du film, disperse plus qu'il ne transporte malheureusement...


Forces ...


10 Cloverfield Lane place le spectateur au même stade de connaissance que Michelle, l'héroïne du film. Comme elle, on se réveille dans ce bunker, ne sachant ni pourquoi, ni comment, nous sommes arrivés là. Comme Michelle, ce qui se trouve à l'extérieur nous intrigue, l'extérieur nous happe. Comme Michelle on a très envie de mettre notre tête au hublot pour regarder dehors ! Et puis, il y a Howard, l'hôte du bunker, celui qui a recueilli Michelle, lui offrant l'hospitalité face au chaos qui règne à l'extérieur. Et les interrogations de Michelle font échos aux nôtres : qui est Howard ? Pourquoi lui doit-on la vie ? Et pourquoi avons nous tant de mal à lui faire confiance ? Les mystères que recèlent 10 Cloverfield Lane se trouvent-ils vraiment à l'extérieur du bunker ? L'enjeu du film ne se trouve t-il pas sous nos yeux ?


... et faiblesses


Lorsqu'une bande annonce fait le buzz sur internet, l'exigence des spectateurs est telle que la déception peut arriver bien vite. 10 Cloverfield Lane à su créer une attente avec de l'invisible, la bande annonce laisse au spectateur le libre choix d'imaginer ce qui peut bien se trouver à l'extérieur. Cette place de choix donnée au spectateur est une stratégie marketing qui fait ses preuves, encore faut-il que la qualité du film soit à la hauteur. Le spectateur est tellement libre d'imaginer son propre film qu'il peut vite se retrouver en déroute une fois que "l'extérieur" est enfin révélé. D’où cette sensation mitigée en sortant de la salle...


Et pendant ce temps, dans un bunker...


Ne nous voilons pas la face, la majorité des spectateurs de 10 Cloverfield Lane veulent voir le film pour découvrir ce qui se cache dehors ! Et beaucoup de spectateurs ignorent que 10 Cloverfield Lane est le prequel de Cloverfield sortie en 2008. Cette information anodine, donne pourtant un indice très précieux sur l'origine du chaos.. Cloverfield racontait l'attaque de New-York par une grosse bébête venue d'on ne sait où pour ravager la ville. Evidemment une fois que l'on sait ça, on devine vite ce qui met le bordel dehors... Ça tombe bien, puisque ce qui se cache dehors, n'est pas le plus important.


En réalité 10 Cloverfield Lane passe plus de temps à se questionner sur ce qui peuple le bunker, et non ce qui sévis dehors.. Plutôt ironique quand on voit la bande annonce... Pas étonnant que les spectateurs qui ignorent tout du film, passent les 3/4 du temps à se demander quand est-ce qu'ils vont enfin mettre un pied dehors ! Certains crieront au scandale commercial. Et ils ont raisons, 10 Cloverfield Lane découle d'une bande annonce qui nous a clairement vendue du vent. Mais finalement, n'est-ce pas là que se trouve le génie du film ? Faire venir des milliers de spectateurs en salles pour s'enfermer dans un bunker (ironique) et essayer de percer un secret qui se cache à l'extérieur pour finalement se retrouver à vouloir découvrir ce qui se cache à l'intérieur ? Aussi déroutant que fascinant.


Alors c'est vrai que 10 Cloverfield Lane souffre de sa parenté avec Cloverfield 2008. Un simple film avec 3 personnes enfermées dans un bunker aurait peut-être suffit.


C'est vrai qu'il faut quand même pas trop se foutre de nous quand Michelle débarque dehors avec sa combinaison en rideau de douche, ses bouts de scotches et ses cul de bouteille en guise de masque à gaz.


Oui, 10 Cloverfield Lane reste une production hollywoodienne, mais à tout de même le mérite, d'avoir osé donner le rôle titre à une héroïne qui a un cerveau,


(elle fait quand même exploser un Alien avec un cocktail molotov)


et qui ne passe pas les 3/4 de son temps à poil, ce qui est malheureusement rare dans les productions hollywoodiennes... Malgré son statut,10 Cloverfield Lane fait au moins l'effort de jouer avec la perception du spectateur, la où nombre d'autres productions hollywoodiennes vous laissent à l'état de légume et vous impose de laisser votre cerveau à l'entrée de la salle.


Finalement, la confusion qu’entraîne 10 Cloverfield Lane n'est pas simplement narrative, elle est humaine, on vous fait voir ce que ne veniez pas voir. 10 Cloverfield Lane, ose, et c'est peut-être ça qui le rend si unique.


Malheureusement 10 Cloverfield Lane risque d'être touché par une envie abusive de suite, même si rien n'est annoncé pour le moment, il y a des chances qu'un 2ème opus voit le jour...

pollly
8
Écrit par

Créée

le 25 mars 2016

Critique lue 307 fois

1 j'aime

pollly

Écrit par

Critique lue 307 fois

1

D'autres avis sur 10 Cloverfield Lane

10 Cloverfield Lane
JimBo_Lebowski
6

Monstre intraterrestre

Le principal intérêt de 10 Cloverfield Lane réside évidemment dans cette perspective d’extrapolation de l’univers du film d’origine de Matt Rieves, ayant connu son petit succès en 2008,...

le 17 mars 2016

108 j'aime

7

10 Cloverfield Lane
Behind_the_Mask
6

Golo-golo dans la cave

Inutile de tourner autour du pot pour vous dire que ce 10 Cloverfield Lane laisse, après la séance, un sentiment mitigé. Je ne regrette pourtant pas mon argent. Mais le film est symptomatique d'une...

le 16 mars 2016

98 j'aime

12

10 Cloverfield Lane
Sergent_Pepper
3

♫ Michelle rebelle sont des mots qui vont très bien ensemble...♫

(Regorge de spoils) Howard est un mec prévoyant. Genre Curtis, voyez, le gars de Take Shelter : on sait jamais, des fois que, un appart en sous-sol, ça peut aider. Provisions, filtration de l’air,...

le 8 juin 2016

73 j'aime

18

Du même critique

Vortex
pollly
8

Naître pour mourir

Vortex débute comme un Gaspar Noé classique, générique de fin en introduction de film, encart coloré, petite citation mi-choc, mi-poétique, mi-lyrique "la vie est une courte fête qui se termine...

le 18 juil. 2021

68 j'aime

7

Sans filtre
pollly
9

Avis de tempête

La croisière s’amuse Puisqu’il s’agit ici d’évoquer un film qui ne fait pas de la dentelle, allons droit au but : Triangle of Sadness est un film qui vous explosera à la tronche. Ruben Östlund...

le 2 juin 2022

64 j'aime

France
pollly
5

Dumont loin d'être au sommet

Après une incursion de deux films (Jeanne et Jeannette) dans le sous genre de la comédie musicale historique, Bruno Dumont s'attaque désormais à la satyre contemporaine et délaisse un peu (mais pas...

le 19 juil. 2021

8 j'aime

5