12 Years a Slave fait partie de ces films coup de poing que l’on prend en plein visage sans s’y attendre. De ces films trop rares, qui nous font ressentir toute la beauté du cinéma. Qui nous rappellent pourquoi, de semaines en semaines, nous parcourons sans cesse les salles obscures à la recherche de la perle rare. De ce moment indéfinissable, suspendu dans l’air et le temps qui parvient à nous faire voyager vers d’autres pays, d’autres époques. Dans un monde parfois réel ou totalement fantasmé sans que la différence ne soit visible pendant la moindre seconde.
Comment peut se résumer la qualité d’un film ? Certains diront par la qualité de l’histoire, d’autres diront par la talent des acteurs ou encore de la mise en scène. Car oui, lorsque tous ces éléments sont réunis, le résultat est souvent magique. Mais, à mon sens, un élément essentiel différencie les très bons films des autres, ceux qui vous marquent au fer rouge pour le restant de vos jours.
Cet élément est simple, connu de tous et pourtant d’une infinie complexité : l’identification. Cet état d’esprit si particulier qui nous transporte dans un monde totalement étranger au notre. Qui nous force à réfléchir. Qui provoque en nous un impact physique, émotionnel si fort qu’on en vient à repenser les choses. De se rendre compte que ce qu’on croyait acquit au plus profond de nous, ne l’est en fait pas. Qu’un autre point de vue est possible. Que les réponses ne sont pas toujours aussi immuables qu’on aurait pu le croire.
Car, oui 12 Years a Slave fait partie de cette seconde catégorie. Il a profondément et radicalement changer tout ce que je croyais connaître sur le sujet.
Comme beaucoup d’entre vous surement, j’ai cru comprendre par les quelques cours que j’ai pu suivre lors de mon parcours scolaire, ce qu’était l’esclavage. De ce qu’était la dure et misérable vie des travailleurs des champs de coton. Mais malgré un sentiment d’une profonde injustice, je n’en avais jamais vraiment perçu la véritable inhumanité. J’en avais inconsciemment une image idéalisée, amoindrie par les stéréotypes véhiculés par une société et une époque qui ne veut pas reconnaître les horreurs sur lesquelles elle s’est pourtant construite. Vous voyez j’en suis certain de quoi je parle. Cette image vue et revue de travailleurs subissant l’assaut implacable du soleil dans un immense et immaculé champ de coton blanc. Le dos voûté par l’effort, mais qui, malgré tout, gardent un léger sourire au coin des lèvres comme heureux du sort qui est le leur.
Comme souvent, la réalité est bien loin des clichés que nous pouvons avoir hommes modernes, avides de savoir et de connaissances, qui croyons tout connaître de ce qui a existé avec la plus grande certitude. Pourtant notre monde actuel n’est-il pas le prolongement civilisé de ce qu’à pu être à l’époque l’esclavage ? La seule différence est qu’il s’est mondialisé, qu’il est rentré dans l’inconscient collectif pour finir par ne plus choquer personne.
Car c’est bien là tout le talent de Chiwetel Ejiofor ( Solomon Northup dans le film) et tout le génie de son réalisateur Steeve McQueen. Simplement s’attacher à retranscrire la réalité, à raconter les faits tels qu’ils ont pu exister. Sans le moindre ajout, le moindre oubli.
Car oui l’esclavage ne se limitait pas à simplement ramasser le coton du lever au coucher du soleil et ce quelque soit le temps. Si la récolte n’atteignait pas le minimum requit, le fouet était la. Si la récolte du jour était inférieure à celle de la veille, le fouet était la. Si la fatigue ralentissait le rythme de la récolte, le fouet était encore la. Le soleil couché, il faut encore nourrir les bêtes pour le lendemain, se nourrir soi même pour tenir une journée de plus. Et si jamais dans un excès de bonté, le maître demande à ces esclaves de danser pour lui toute la nuit, alors il faut danser, car le fouet n’est pas loin.

Peut être ces quelques lignes vous auront donné envie d’aller voir ce film, peut être au contraire vous auront-elles donné envie de tourner la tête et les yeux vers un sujet plus joyeux. Je ne chercherais pas ici à vous convaincre davantage, je terminerais ce texte par ces simples mots :

N’ayez pas peur. Laissez-vous enchaîner.
Maître_Caesar
9
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le 14 févr. 2014

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Maître Caesar

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