Pour les adeptes d'expérience qui ne laisse pas indemne...

Lors de sa sortie le vingt-deux janvier dernier, « 12 years a slave » a été accompagné de critiques élogieuses de toute part. Les compliments étaient nombreux et variés. Cet enthousiaste unanime s’est d’ailleurs concrétisé lors de la cérémonie des Oscars avec trois récompenses dont celle du meilleur film. Cet opus est réalisé par Steve McQueen dont le « Shame » était loin de m’avoir conquis. D’une durée supérieure à deux heures, « 12 years a slave » est arrivé dans nos salles accompagné d’un avertissement indiquant que des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs. Cette indication n’est pas inutile car la séance s’avère éprouvante tout au long de son déroulement.

Le site Allociné propose le synopsis suivant : « Les Etat-Unis, quelques années avant la guerre de Sécession. Solomon Northurp, jeune homme noir originaire de l’Etat de New York, est enlevé et vendu comme esclave. Face à la cruauté d’un propriétaire de plantation de coton, Solomon se bat pour rester en vie et garder sa dignité. Douze ans plus tard, il va croiser un abolitionniste canadien et cette rencontre va changer sa vie… »

Ce film est une adaptation d’une histoire vraie, celle de Solomon Northurp. Ce dernier a écrit ses mémoires suite à ses douze années à être soumis à l’esclavage. La réalisation de McQueen a permis de mettre en lumière cette ouvrage qu’il est facile de trouver pour les lecteurs intéressés dans beaucoup de librairie. Je ne suis pas un grand adepte des biopics quand il s’agit de conter la vie d’une personne célèbre ou marquante. Le genre impose alors beaucoup de codes et de passages obligés qui fragmentent souvent le récit. Mais dans le cas qui nous intéresse, ce n’est pas un souci bien au contraire. Le héros nous est inconnu et la dimension biographique ne fait alors que renforcer le réalisme et l’intensité des émotions ressenties par le spectateur.

L’histoire nous est contée à travers le regard et le quotidien de Solomon. La réussite du film réside donc en grande partie dans le lien qui se crée ou pas entre le héros et spectateur. Le charisme de Chiwetel Ejiofor et la justesse de son jeu d’acteur fait que l’empathie à son égard est immédiate et d’une rare intensité. La souffrance qu’il vit sur l’écran est partagée dans la salle. Le film est intense et la dureté de son destin ne laisse jamais indemne. L’enchainement des scènes ne nous laissent pas le temps de souffler tant on est inquiet pour le devenir du personnage principal.

Comme le titre l’indique, l’histoire se déroule sur une douzaine d’années. Néanmoins, à aucun moment, la narration ne fait apparaître de dates ou de durées. Cela donne l’impression d’une situation qui dure et éternelle. Je trouve ce choix très pertinent. Cela fait que le spectateur ne sait jamais si le héros en est au début ou à la fin de son calvaire. Chaque toute petite lueur d’espoir est souvent rapidement éteinte avec brutalité et violence. Le sentiment d’être enfermé dans une pièce sans fenêtre transpire de l’écran. C’est une sensation forte qui participe à la réussite du film.

La qualité du casting ne se réduit pas à la performance de l’acteur principal. En effet, les nombreux personnages secondaires qui croisent son parcours sont tout aussi bien construits et justement interprétés. Que ce soit du côté des esclaves ou de leurs tortionnaires, la dureté est de sortie et ne laisse pas indemne. Les prestations de Michael Fassbender en esclavagiste malade et sadique et de Lupita Nyong’o comme petit bout de femme torturée au caractère fort sont les plus marquantes. Mais cela n’empêche pas Benedict Cumberbatch ou Paul Dano par exemple de confirmer tous leurs talents.

Je n’ai pas envie de vous lister la succession d’épreuves que doit surmonter Solomon. Cela vous empêcherait de les découvrir et surtout de les appréhender. L’inhumanité qui entoure son quotidien fait que l’appréhension de voir les limites de la douleur tout le temps repoussé fait partie du plaisir masochiste du spectateur. C’est pourquoi, il est important de connaître le moins de détails possibles en découvrant ce film. Cela permet une fusion absolue avec le héros et cela permet de vivre une expérience intense qui habite encore une fois les lumière de la salle rallumées…
Eric17
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le 6 juil. 2014

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