Sans nul doute le film coup de poing de ce début d'année 2014, abordant de manière frontale et sans fioritures le thème de l'esclavage et ce à travers le destin incroyable mais vrai de Solomon Northup, jeune homme noir originaire de l’État de New York, enlevé et vendu comme esclave, qu'il demeurera durant 12 ans avant de pouvoir finalement revenir chez lui parmi les siens. Ne vous attendez pas à voir un film fun tel que le fut « Django Unchained » (abordant aussi l'esclavage, mais d'une toute autre manière) l'année dernière : ce « 12 Years a Slave » fait mal et ne vous laissera pas indemne, et c'est tant mieux. Steve McQueen, réalisateur britannique plus que talentueux (« Hunger », « Shame ») n'est pas là pour amuser la galerie, mais pour mettre l'Amérique (mais aussi le reste du monde, l'esclavage ne s'étant pas uniquement déroulé de l'autre côté de l'océan) face à sa propre Histoire et ce qui constitue l'une de ses périodes les plus sombres. Un thème qui, étonnement, ne fut jusque-là que très rarement abordé par le cinéma, mais qui connait enfin un regain d'intérêt ces dernières années. Une époque sombre de l'Histoire donc et pas si lointaine que ça (l'abolition de l'esclavage aux USA fut ordonné en 1865. En France en 1848) : une époque où un homme pouvait acheter un autre homme et disposer de lui comme il le voulait, sous prétexte de sa couleur de peau, de sa "race". Ce qui, de nos jours et dans notre société occidentale, nous paraît impensable. Voilà la raison pour laquelle McQueen a fait ce film : pour nous souvenir, ne jamais oublier et nous faire ressentir, par le biais de l'écran, ce que subissait ces esclaves, ces hommes et femmes quotidiennement. Une violence physique (chaque coup de fouet, qu'il soit visible à l'écran ou non, fait mal, transperce la chair et l'esprit), mais aussi psychologique (cette tendance des maîtres à vouloir rabaisser sans cesse leurs esclaves en les comparant à des animaux, au Diable), qui transparaît dans chacun des plans du réalisateur, qui englobe tout ceci dans une mise en scène tout aussi sublime que brutale, preuve que les évènements les plus horribles peuvent aussi se produire dans les endroits les plus beaux de la planète. Certains plans, fixes et sans paroles, suffisent à faire comprendre cette violence omniprésente. Le casting, quant à lui, excelle, de Benedict Cumberbatch à Brad Pitt, en passant par Paul Giamatti, Sarah Paulson, Paul Dano et en particulier Michael Fassbender dans le rôle d'Edwin Epps, un propriétaire brutal et sans états d'âme, attiré par l'une de ses esclaves (interprétée par une Lupita Nyong'o touchante) et Chiwetel Ejiofor dans le rôle d'un Solomon Northup tentant de survivre à tout prix pour un jour pouvoir revivre à nouveau, libre. Le tout est accompagné d'une partition tout en finesse signée Hans Zimmer, comme pour nous faire comprendre qu'un espoir est toujours possible. « 12 Years a Slave » : une réalisation impeccable et un casting irréprochable pour un film indispensable, à côté duquel il serait inconscient de passer. Vous voilà prévenus.

Raphoucinévore
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le 25 juil. 2015

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