Ce film est un piège. Un piège magnifiquement ficelé qui vous embarque là où le synopsis ne vous l’indiquait pas. The Three Billboards prend place dans un paysage typique de l’Amérique rurale au beau milieu du Missouri. Dans une ville où tout le monde se connait, tout le monde s’observe et surtout, où tout se sait. Dans son troisième long-métrage, en tant que réalisateur et scénariste, Martin McDonagh nous fait assister à un combat, celle d’une mère désirant trouver l’identité du meurtrier de sa fille, morte après avoir été violée quelques mois auparavant et qui dans ce but, loue et utilise 3 panneaux à l’entrée de la ville dénonçant l’incompétence de la police locale et notamment du chef respecté par la communauté, William Willoughby.


C’est principalement ici que le piège prend racine. On pourrait croire, en lisant ce rapide aperçu, que l’on va assister à un véritable thriller policier dans lequel la police et la mère endeuillée font front commun à la recherche du meurtrier dans une vision assez manichéenne des choses. Or, on se rend vite compte que ce film se rapproche davantage d’une œuvre de Quentin Tarantino que de M. le Maudit. En effet, la violence physique et morale se confondent avec un humour inattendu mais terriblement efficace. Preuve de cette étrange cohabitation, une scène réussit à allier drame personnel et la fameuse chanson du groupe suédois ABBA « Chiquitita ». Le résultat peut dérouter mais fait l’identité de ce film : un curieux mélange entre drame et humour mais aussi entre fait divers et étude d’une Amérique divisée.


Encore une fois, le réalisateur nous surprend avec sa capacité à aller plus loin et totalement autre part que là où on l’attendait. Bien que la trame prenne racine autour de l’enquête (ou plutôt la non-enquête) sur le meurtre et le viol d’Angela Hayes, Martin McDonagh nous amène sur des problématiques à échelle nationale. Violences policières, racisme, The Three Billboards peut nous faire penser à une fresque des frasques et dérives de l’Amérique contemporaine à travers des scènes frappantes qui nous pétrifient. On peut vous citer cet extrait d’une extrême violence où un policier fou de rage défenestre un civil, sans véritable raison valable, dans un passage d’une rapidité et d’une simplicité insolente, l’absence de musique et le cadrage aidant.


Mais là où le piège se renferme sur les spectateurs et là où réside la beauté de ce film, c’est à travers la complexité des deux étincelles que sont les personnages de Milred Hayes, la mère endeuillée magnifiquement interprétée par Frances McDormand et de l’agent de police Dixon interprété par Sam Rockwell. Ces personnages brisent totalement un manichéisme qu’on aurait pu suspecter aux premiers abords du film, l’une en tant que victime se battant pour venger la mort de sa fille et l’autre en tant que policier violent, raciste et peu habile. Tout au long de ces deux heures, nous les voyons briser les limites des stéréotypes de leurs personnages, de manière souvent violente mais particulièrement juste.


Martin McDonagh signe ici, une grande œuvre, démontrant la duplicité de l’être humain tout en arrivant à briser les tabous, les attendus et surtout les stéréotypes. Bien que The Three Billboard puisse dérouter et laisser perplexe par sa grande originalité, rien n’est moins sûr qu’elle laissera une trace dans l’œuvre cinématographique de cette année et annonce pour les futurs long-métrages du réalisateur, une curiosité accrue.

Fabien_Louchard
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le 22 avr. 2018

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Fabien Louchard

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