J'écris surtout pour garder une trace de mon avis sur les films que je mate. Ces lignes sont issues de mes notes et je ne prétends pas avoir quelque chose de fondamentalement intelligent à dire. J'essaye d'analyser le film en utilisant mes simples connaissances. Contient sûrement des spoilers.


Encore un film bouleversant de Godard...


Michel (Belmondo comme je l'avais jamais vu) est un personnage fascinant : jeune, menteur, voleur, criminel, con, misogyne ("les femmes au volant c'est la lacheté incarnée" tout ça pour se rendre compte qu'il a tort) énigmatique et ridicule, plein de charme et impertinent. La vie est un terrain de jeu pour lui, la réalité, le temps, l'argent, n'ont pas d'emprise (ou au contraire trop?) sur son mode de vie marginal. Il regarde la caméra : "Si vous n'aimez pas la mer. Si vous n'aimez pas la montagne. Si vous n'aimez pas la ville. Allez vous faire foutre!"


La mise en scène et le filmage de Godard sont comme d'habitude très travaillés. Ils s'affranchissent des codes mais toujours avec talent et réflexion. Le film accompagnant la naissance de la nouvelle vague et c'est une belle mise en abîme de la liberté évoquée dans le film ainsi que de l'opposition entre réalité et fantasme.
On peut toujours admirer un effort ou déceler une métaphore dans sa manière de filmer, ses plans, sa photo : Belmondo sort d'un bâtiment, la caméra recule, des flics rentrent, on joue avec la transparence d'une baie vitrée ou un plan sur les champs élysées qui signifie tout l'écart entre le monde et le personnage de Michel, "insaisissable", que l'on retrouve de l'autre côté de cette immense rue ce qui défie la logique ou encore une scène dans un cinema ou il admire Bogart et ou on voit a l'extérieur les flics à sa poursuite, paumés (encore une fois, fantasme vs réalité, ses crimes vs l'art, le cinéma, l'échappatoire).
Difficile de tout analyser en un seul visionnage, mais un montage parfois abrupt et mal fichu, qui donne un chaos de faux raccords. J'aime cependant les scènes avec des jump cuts successifs à chaque fin de phrase car cela donne un effet rythmé assez moderne, en décalage.


Le couple Patricia/Michel sort de l'ordinaire, godard s'intéresse aux relations hommes femmes de manière originale. Il y a tout un mélange : entre candeur, légèreté et brutalité ou encore détachement...ce qui tranche tragiquement avec la réflexion du réal sur la jeunesse (le centre du film), décrite comme dans le vertige d'une perdition ou la mort rode à chaque instant, ni crainte ni considérée, nihiliste et résigné,et qui joue de l'opposition (et des ressemblances) du couple, avec un rapport de force assez juste emprunt de fatalité. Une jeunesse en quête de sens, dans tous les sens du terme (les nombreuses question sur les sens des mots de patricia, étrangère..)
Il y a aussi un peu de branlette intellectuelle arrogante avec un discours confus (et que je cautionne pas sur les femmes, de ce que j'ai compris) à travers notamment l'itw que fait Patricia d'un écrivain (qui arrive à la charmer en étant un goujat, godard est dur parfois).


Bien contrebalancé par une vision de l'acting pleine de poésie et des phrases magnifiques : "Ma plus grande ambition? Atteindre l'immortalité, puis mourir." Une phrase clef qui sonne le glas et qui capture toute la vision de la jeunesse et de la vie de godard. Phrase que s'approprie patricia pour décider de son destin le temps d'un battement de coeur, et qu'elle aura le courage (ou la lacheté?) de rejeter ensuite...


Phrase qui amène une fin amère et tragique, ou Patricia, bien qu'ayant mené Michel a une mort certaine s'approprie son tic de la lèvre...ou comment atteindre l'immortalité.

Sevanimal
8
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le 29 janv. 2016

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Sevanimal

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