La passion cinéphilique, elle se nourrit bien sûr de ces séquences où la magie des images et le talent des comédiens atteignent une dimension rare. De ce point de vue, "Angel heart" est un vrai bonheur.
Cela tient au style très esthétisant, agaçant parfois, d'Alan Parker. Cela tient surtout à la présence inouïe des deux acteurs face à face. Délectation de voir Robert De Niro "prendre un malin plaisir" à suggérer son personnage maléfique, le temps d'une scène d'anthologie. Regard lointain, cheveux d'un noir luisant tirés sur la nuque, bouc et doigts aux ongles démesurés, il fait s'éterniser l'épluchage d'un oeuf dur en notant qu'on peut y voir le symbole de l'âme ! Plaisir ému de voir le plus souvent Mickey Rourke en solitaire pathétique. Dans un bar miteux, une rue de ghetto aux sordides aspects...
Sordide... L'ambiance dans laquelle tout le film baigne. Au fil de cadavres qui, eux, baignent dans leur sang. Meurtres rituels. Pourtant, au départ, dans le Harlem des années 50, il y a juste un épisode banal pour Harry Angel, détective privé sans envergure. Un type, plus bizarre qu'inquiétant, lui offre plein de fric pour retrouver un musicien voyou... Une histoire de contrat non honoré, a priori...
Rupture avec le polar classique dès les contacts avec ceux qui ont connu le fugitif. Se cherchant lui-même, le privé se retrouve vite "aux portes de l'enfer" (sous-titre du film), dans une hallucinante spirale de mort et de sexe au nom du culte vaudou. Réalisant enfin que le magnétisme hors normes de ce Louis Cypher qui l'a engagé s'appelle aussi "La beauté du Diable" !
Malgré des longueurs, ce film mérite une belle postérité. Pour sa richesse d'évocation sur le plan historique, musical. Mais surtout comme oeuvre où les thèmes de l'obsession et de la possession riment et priment de façon inouïe. Le jeu allumé des deux acteurs est à la mesure de la démesure de l'histoire. De Niro est fascinant sans aucun... mal ! Rourke restitue les fêlures de son personnage avec son instinct de jeu prodigieux.
Donc, pour les inconditionnels de l'un et de l'autre, (re)voir ce film, c'est comme être au Paradis !

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le 12 déc. 2015

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Ticket_007

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