Il arrive que certains réalisateurs, comme certains auteurs, décident de s’éloigner de leur genre de prédilection… Takashi Miike, par exemple, a abandonné l’action sanglante et un peu gore au profit du drame historique et réaliste le temps de réaliser son remake de Hara-Kiri (très bon, au passage). Ici, c’est donc Roland Emmerich qui a délaissé la SF et le film catastrophe le temps de s’attaquer à l’une des plus grandes énigmes de l’Histoire de la littérature : qui se cachait vraiment derrière le nom de William Shakespeare ?

Car, oui, l’identité de Shakespeare fait débat. Comment ce simple fils de gantier, relativement illettré, a-t-il pu devenir quasiment du jour au lendemain le génie littéraire que l’on connaît ? Don, pseudonyme, prête-nom ? Toutes les hypothèses sont ouvertes, encore aujourd’hui. Et Emmerich a décidé, ici, d’en choisir une.

Mais point de biopic pompeux ou hagiographique, non. L’idée retenue pour le scénario s’inscrit dans un projet bien plus vaste que simplement parler de Shakespeare (et peut-on « simplement » parler de lui et son œuvre ?). Pendant deux heures, Emmerich nous plonge au cœur de la société élisabéthaine, sa censure, son écriture, son pouvoir.
Il en résulte un drame psychologique intense, avec une pointe de thriller politique, qui nous parle de la beauté de l’art, de son souffle vital pour les artistes, de faux semblants, et de recherche de pouvoir.

Emmerich livre une belle reconstitution historique, bien qu’il se permette de réécrire l’Histoire sur quelques éléments… Ce film est en effet de la pure fiction, certes plausible, où l’art d’écrire se met au service de la révolte sociale, dans tous les milieux de la société élisabéthaine.
Alors, certes, les réécritures de l’Histoire sont énormes, les références à Shakespeare et autres citations parfois maladroites, mais c’est visuellement superbe, bien réalisé, bien interprété, et l’intrigue est vraiment prenante.

Si vous êtes prêts à découvrir une interprétation du mythe autour de l’identité de William Shakespeare, sans être pointilleux sur les faits, Anonymous sera alors un grand, voire un très grand film. Pari osé, mais réussi pour Emmerich, qui montre qu’il est capable de faire autre chose que ce dans quoi il s’est régulièrement enfermé (même s’il avait déjà un peu tenté avec The Patriot).
Lonewolf
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le 24 mars 2014

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