Le projet Avengers Infinity War avait de quoi donner des sueurs froides : la simple idée de produire un film avec plus d'une vingtaine de personnages principaux semblait vouée à l'échec (ou à l'inverse alimentait les fantasmes). Néanmoins, cette promesse d'un film ponctuant 10 ans de long-métrages Marvel et installant un bad guy teasé depuis des lustres suffit à donner de l'intérêt à l'ensemble. Le projet est fou, l'ambition démesurée, la foule en liesse : Infinity War doit être, sur le papier, le blockbuster de l'année.
En terme de ressenti, on sort lessivé du cinéma mais surtout comblé. Le pari fou de faire cohabiter cette multitude de personnages en un seul film tout en leur laissant la place d'exister, de s'exprimer, d’interagir, est remporté haut la main. Il est surtout agréable de voir que leur évolution se fait dans la continuité de leurs aventures précédentes. Ce sentiment de cohérence dans le MCU n'en sort que renforcé.
Néanmoins, ceci se fait au prix d'une durée... difficile à avaler. Autant le dire, c'est long, extrêmement riche en événements et, surtout, en arcs narratifs. Si ceci contribue à donner de l'ampleur au conflit, qui se déroule par ailleurs aux quatre coins de la galaxie (super travail au niveau des décors au passage), le revers de la médaille se trouve dans le fait que cela peut vite devenir confus et pénible à suivre. La fin du film va cumuler 3 événements importants se déroulant en même temps et dont les cuts de l'un à l'autre ne sont pas super inspirés. Au final, même si les intrigues convergent toutes vers le même point, on ressort avec le sentiment d'avoir vu plusieurs films en 1. Un peu frustrant...
Depuis le temps que Thanos est évoqué dans le MCU, on était en droit d'attendre un grand méchant. On pouvait craindre un monstre en CGI générique aux motivations manichéennes et on obtient au final le meilleur méchant de cet univers cinématographique. Son introduction dans la scène d'ouverture est brillante et ce qu'il s'y déroule installe immédiatement la menace qu'il représente et surtout sa puissance. Son rapport à Gamora, son background, la finalité de ce qu'il entreprend, la qualité de ses expressions faciales et l'acting de Josh Brolin : tout fonctionne. Au point où on finit par se demander si Thanos n'est pas le véritable protagoniste de ce film. Habile.
Au final, le gros point noir est (comme d'habitude chez Marvel...) la réalisation. Les Frères Russo ne sont pas connus pour être de grands esthètes ou des poètes mais on n'échappe toujours pas à une mise en scène en pilote automatique. Ça récite ses gammes mais n'attendez rien de plus. On pourra rétorquer que c'est le propre des blockbusters et que ça n'est pas ce que l'on demande à un film Marvel mais merde, au vu de ce qui se passe dans l'intrigue, il y a un quand même un grave goût d'inachevé, de gâchis. Un film va bien plus rester dans les mémoires pour ses fulgurances de réalisation et visuelles que pour son intrigue. Infinity War se trouve donc être très efficace dans son exécution, implacable dirais-je même, très cartésien, mais c'est la mort de la prise de risque. Même la musique d'Alan Silvestri est oubliable ! Un comble !
J'ai beau finir sur une mauvaise note, j'ai passé un excellent moment devant Avengers Infinity War. J'ai été pris par l'intrigue, par le sentiment de désespoir qui s'en dégage malgré les piques humoristiques habituelles dans l'écurie Marvel (certaines séquences sont pour le coup vraiment très drôle, il y a du progrès depuis Thor Ragnarok), et l'incertitude sur le déroulé des événements est perceptible. Fatalement, si le film ne frise pas l'excellence, c'est en raison de son concept même : trop de personnages (même bien traités), trop long, trop riche, trop tout...
Si on part du principe que la réalisation est conforme à ce que doit être un blockbuster, et bien je pense qu'on pouvait difficilement espérer mieux de la part d'Avengers Infinity War.
En ce qui concerne la scène post-générique, je ne peux m'empêcher de m'inquiéter pour ce qu'elle annonce dans Avengers 4... En plus, elle atténue le ton de la fin du film. Pour le coup, Marvel aurait eu meilleur intérêt à ne pas mettre de scène post-générique...