Me voilà en face d'un des monuments de la science-fiction, le bien nommé "Bienvenue à Gattaca" ou simplement "Gattaca" en langue originale. Et je ne saurai par où commencer. Ma critique sera de toute manière trop courte. Commençons donc à partir du plus simple, avec l'histoire. Enfin, je dis "plus simple", mais il y a des choses plus faciles à faire que de partir avec le speech de départ pour l'expliquer, genre respirer, se gratter la tête, s'amuser à prendre son index pour un ver de terre (oui j'adore faire ça je suis un psychopathe !!). En parlant de ça, autant de choses faciles à effectuer de manière immédiate pour nous que notre héros devra faire de façon purement réfléchie. Bienvenue à Gattaca.
Futur non lointain. Echo sur le présent. Historiquement a-prouvé.
A la suite du désir perpétuel de l'homme de la recherche de la perfection, de l'être ultime, du sorte d'élu aussi bien spirituel que physique, le monde a désormais recours à l'eugénisme afin de confectionner in vitro des petits êtres tout mignons, tout parfaits, avec de beaux yeux bleus, des aptitudes géniales, mais d'un inhumain absolu, d'un contre-nature exacerbé et marquant. Vincent, notre héros, a eu la "malchance" de naître de façon normale/naturelle, c'est à dire par l'union de deux êtres, en l’occurrence par un rapport passionné résultant de l'amour de ses deux parents. Et on va déjà s'arrêter là. Nombreux sont les débats actuels liés à l'eugénisme, à l'intervention de plus en plus pro-imminente de la médecine sur la conception humaine. Il me semble même qu'il est actuellement possible de choisir la couleur des yeux, ou certaines autres caractéristiques purement esthétiques de son enfant. Le hic, et c'est ce sur quoi le film appuie bien profondément dans notre conscience, c'est que cela détruit le charme du hasard quant à la morphologie des nourrissons, supprime le libre-arbitre de l'enfant quant à sa condition physique qui impactera nécessairement sa vie, et supprime de ce fait toute notion de passion réelle et affirmée, jusqu'à la destruction pure et simple de la notion même de liberté. Car dystopie cinématographique oblige, on retire aux enfants du film toute propension à laisser libre-court à leurs sentiments purs, réduisant les risques de folie à leur minimum, leur capacité d'énervement, leur vocation à se différencier l'un de l'autre par des imperfections. Si le physique est différent, les intentions des ces nouveaux Hercule (dans le film j'entends, la cadre étant restreint) seront les mêmes : partir dans l'espace pour profiter d'un autre cadre de vie. C'est également l'objectif de Vincent, sauf que celui-ci revêt un caractère obsessionnel chez lui : depuis tout petit, il fait ses propres choix, se distinguant des autres enfants faussement divins. Et sa volonté la plus pure sera lui-aussi de partir dans l'espace par cette même navette.
Sauf que pour ce faire, il faut participer au programme d'entrainement de Gattaca.
Sauf que pour ce faire, il faut être un être des plus parfait, cette chance n'étant réservée qu'à une élite.
Sauf que pour ce faire, il faut être conçu par des médecins eugénistes qui auront enlevés de vous tout risque de problèmes une fois à bord de la navette.
Sauf que pour ce faire, et bien il ne faut pas être Vincent Freeman (/homme-libre).
Les personnes nées de manière naturelle étant damnées, ils sont condamnés à pratiquer les tâches les plus ingrates de la société (être des larbins de services voués à combler l'élite). Vincent va donc faire appel à Jerôme Morrow, un être aux aptitudes parfaites, mais définitivement cloué sur un fauteuil suite à un accident de voiture. Il fournira cheveux, poils de barbe, peau séchée, urine et même sang à Vincent lors des différents test et observations médicales, pour que celui-ci puisse accéder à son rêve. Cependant, un meurtre et une inadvertance au sein de l'institut vont tout remettre en question.
Des questions, le film en pose beaucoup, et je n'ai prétention dans cette critique que de parler du caractère semi-fictif contemporain du film. Donc je passerai l'histoire d'amour entre Vincent et Irène, interprété parfaitement par Ethan Hawke et Uma Thurman (que j'ai d'ailleurs trouvé jolie pour la première fois de ma vie), qui n'apporte pas grand chose à mon propos.
Le personnage de Jude Law, à savoir Jérôme, est simplement fascinant, touchant, mais parfaitement incompréhensible. Et c'est ce que j'ai adoré en lui. Que veut-il au final ? Rendre service ? Montrer qu'il est toujours utile ? Critiquer une société qui l'a lui-même monté de toutes pièces ? Rien de tout cela ne sera expliqué dans le film, du moins suffisamment pour moi. Mais une chose est sûre, Jude Law a tenu un de ces meilleurs rôles. Rien à dire. Et je ne suis pas fan à la base. Champagne.
Ce qui ressort du film, c'est que nous sommes face à un présent déguisé, où l'humain sera bientôt reconnu, épié, sauvegardé par la machine, qui le suivra à la trace. On a affaire à une société qui ne tolère en aucun cas l'erreur, qui ne peut même pas l'envisager (on remettra immédiatement la faute du meurtre sur un "non-valide", sans même inspecter les "valides"). Tout se doit d'être fixe, il n'y a aucune marge d'imprévisibilité acceptée. Je trouve que le film montre une autre variante d'une possibilité de régime ultrasécuritaire à la manière de l’indéboulonnable 1984. Les individus sont ainsi formaté avant même la naissance, puis tout au long de leur vie, souhaitant par la suite tous atteindre le même objectif. Si l'objectif de Vincent est le même, il ne constitue pas une fin en soi, un but ultime réservé à des personnes ultimes, mais un moyen pour atteindre le bonheur, de se retrouver en dehors d'un monde qui n'accepte plus comme on est, mais comme on devrait être. Et le fait que ce rêve d'évasion de la part du héros soit en même temps un rêve d'enfance marque la beauté du film. Car c'est par la passion, associée à la raison, que les choses se réalisent. C'est d'ailleurs ce que va comprendre Elise, dû à sa légère imperfection au niveau de son taux de possibilité de folie, qui va lui permettre de ressentir comme Vincent et de comprendre son désir profond d'aspiration humaine au bonheur, quitte à tout perdre.
Bienvenue à Gattaca est un chef d'oeuvre visionnaire : les plans du film sont d'un symbolisme assez pur, la musique est géniale , l'ambiance du film est très calme, permettant de déceler le malaise du film quant à un univers totalement aseptisé, les acteurs sont fous, fous, fous. SI je devais m'attacher à chaque détail du film, il y en aurait pour des heures et des heures : Elise qui récupère un cheveu sur le peigne, la course de natation des deux frères, la scène de l'escalier en forme d'ADN, le médecin ... Tout est symbolique, terrible. La fin, même attendue depuis le début du film, gardera son caractère de magnificence jusqu'à la dernière seconde. Et voilà, ce film fait peur, il est d'une actualité, en 2015, horriblement présente et prenante. Prenons garde mes amis, regardez ce film et ne jouez pas au Frankenstein, histoire que Bienvenue à Gattaca, en tant qu'oeuvre de fiction, ne soit jamais dépassé par la réalité.

Simon_Besançon
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le 13 janv. 2015

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Simon Besançon

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