Birds of Prey and the Fantabulous Emancipation of One Harley Quinn (Cathy Yan, U.S.A, 2020, 1h48)

Après la débandade ‘’Suicide Squad’’ et le catastrophique ‘’Justice League’’, l’univers DC par Warner Bros semble être voué à l’échec. Un bordel pas possible s’est mis en place ces derniers temps, avec Ben Affleck abandonnant ‘’The Batman’’, quittant le multivers, et Henry Cavill qui laisse la cape de Superman pour aller jouer les ‘’The Witcher’’ sur Netflix. Quant à Jason Momoa, Il va reprendre son rôle dans ‘’Aquaman 2’’, tout comme Gale Gadot avec ‘’WonderWoman 1984’’ prévu pour cet été.


Un ‘’Suicide Squad 2’’ est également dans les tuyaux, sous la direction de James Gunn, viré de ‘’Guardians of the Galaxy 3’’ par Disney, puis finalement rembauché, mais seulement après son boulot pour Warner. Une semi-suite/reboot avec un nouveau casting. Bref, c’est un sacré bazar qui devient compliqué à suivre, faisant perdre tout intérêt pour les films à venir. En tête ‘’The Batman’’ de Matt Reeves, dont les premières images annoncent une catastrophe.


Puis en 2019 il y a eu ‘’The Joker’’ de Todd Philips, évoluant dans un univers à part des autres productions DC/Warner. Et voici donc en 2020 ‘’Birds of Prey’’, axé sur Harley Quinn, interprétée par Margot Robbie qui reprend son rôle de ‘’Suicide Squad’’, tout en évinçant complétement l’abominable, ridicule, nul et merdeux Joker par Jared ‘’Je SuIs Un ArTiStE’’ Leto.


Ça tombe plutôt bien puisque dans la déplaisante aventure ‘’Suicide Squad’’ la seule qui parvenait à tirer son épingle du jeu était Margot Robbie, malgré l’écriture du personnage par un puceau libidineux de 12 ans avec un accès illimité à youporn, dont la sexualisation outrancière était complètement gratuite.


‘’Birds of Prey’’ vient ainsi réparer cet affront. La réalisation de Cathy Yan tire un trait complet sur ‘’Suicide Squad’’ en passant totalement à autre chose, avec une ambiance complétement différente et un visuel qui tranche avec les délires numérico-bouillasses du film de David Ayer. Exit la bande sonore vintage forcée et hors ton, et les filtres cradingues qui donnaient envie de vomir. Non, ‘’Birds of Prey’’ ne retombe pas dans le même piège, et c’est avec une drôle de surprise qu’il s’avère dans son ensemble des plus jouissif.


Une grande partie de cette réussite est à mettre au compte d’une Margot Robbie habitée, qui porte clairement tout le projet sur ses épaules. Occupant également le poste de productrice, il est très clair qu’elle marque le rôle de son empreinte. Faisant preuve d’une espièglerie à tout épreuve, rendant le personnage sympathique, malgré sa nature schizophrène. Intelligemment écrite, elle est parfois touchante, ce qui amène des réflexions au-delà du simple divertissement.


Le scénario de Christina Hodson fait également la part belle à un humour plutôt réussi, enveloppé dans un ensemble très pop, et flashy sans être vulgaire. Harley Quinn est complétement désexualisée, loin du fantasme masculin primaire de ‘’Suicide Squad’’. Il en va de même des autres personnages féminins, qui ne forcent jamais le mode ‘’girl power’’, comme cette séquence particulièrement gênante à la fin de ‘’Avengers : Endgame’’. C’est fait ici avec un naturel salvateur.


Et ça fait du bien, puisque c’est étonnement fin, même si l’opposition mâles blancs dominants / femmes issues de minorités, fait partie des thèmes qui traversent le métrage. C’est traité avec intelligence et un ton décalé qui fait plaisir. Car c’est là l’une des grandes réussites de ‘’Bird of Prey’’ : son humour. Sans se prendre jamais au sérieux, il propose une aventure initiatique.


Harley Quinn s’émancipe du Joker, pour s’affirmer en tant que personne, une individue indépendante, qui réalise qu’elle peut être qui elle veut, et faire ce qu’elle veut. Et non être réduite à un objet précédé de sa réputation, et par le fait ‘’d’appartenir’’ à Mr J.


Avec son ambiance bonne enfant, contrebalancée par une grande violence, Cathy Yan insuffle à son film une âme et une identité propre, qui laisse de côté les délires chrétino/darko/gritty de Zack Snyder. L’ensemble est cool, agréable à suivre, et en plus l’histoire est loin d’être anecdotique, même si elle est assez classique dans le fond, elle prend une forme inattendue. Il est à regretter qu’il se soit planté au box-office, car DC/Warner semblait enfin avoir trouvé ici un style efficace.


Un autre élément qui joue clairement en la faveur du métrage, c’est la performance over-the-top d’Ewan McGregor, qui cabotine à mort, hallucinant et complétement assumé, il se fait plaisir et ça se voit. Son personnage, Black Mask, donne lieu à des séquences aussi hilarantes que frissonnantes. Notamment au travers de la bromance avec son homme de main, le psychotique Victor Zsasz, un personnage abject bien siphonné.


L’ubris dégagée par Ewan McGregor démontre une bonne humeur qui devient communicative. De plus, l’alchimie entre les personnages fonctionne parfaitement, et chaque interprète semble s'éclater. Sans tomber dans les clichés faciles, ‘’Birds of Prey’’ décline ainsi une galerie de personnage haut en couleur, au-dessus desquels trône bien entendu la merveilleuse Harley Quinn.


Une bonne surprise, complètement inattendue de la part d’une production DC/Warner, qui avait commencé à habituer a bien pire, accomplissant la performance de créer un désintérêt latent pour tous futurs projets du Studio. Il est à espérer qu’ils tirent des leçons de ce film, malgré son échec, certainement dû à la réputation pitoyable de ‘'Suicide Squad’’. D’autant plus que la promo du film s’est fait sur un visuel proche de ce dernier, bien que ça n’a vraiment rien à voir.


Il a souvent été dit que DC/Warner était à la bourre derrière le MCU, c’est vrai pour ce qui est du niveau qualité/quantité, ils sont à la masse. Mais ils peuvent néanmoins se targuer d’avoir à ce jour sorti deux films avec une super-héroïne en personnage centrale, écrits et réalisés par des femmes. Et même bientôt un troisième avec la sortie de ''Wonder Woman 1984’’.


À ce jour, l’univers Marvel qui compte 24 productions, n’a donné sa chance à aucune réalisatrice, ni à aucune super-héroïne de son catalogue. Pour une société de production qui se félicite d’être en avance sur les questions sociétales, la firme à la souris accuse un retard. La séquence ‘’girl power’’ de ‘’Endgames’’ (une fois de plus) apparaît dès lors comme un aveu de faiblesse.


‘’Birds of Prey and the Fantabulous Emancipation of One Harley Quinn’’, est à bien des égards une véritable réussite, dans son genre. C’est rondement mené, généreux en action, avec plein de bastons, une violence décomplexée, un visuel abouti, une bande son punchy qui colle parfaitement à l’ensemble, et fort d’un humour qui ne joue pas sur la punchline à deux balles. Au contraire même, le film se permet de capitaliser sur un comique de situation des plus efficace, qui fait mouche.


Avec sa violence toonesque des plus jouissive, qui rappelle la nature comics de cette adaption, le film partage un plaisir communicatif, porté par une réalisatrice qui semble s’éclater derrière sa caméra, et une star/productrice totalement habitée par son personnage. Car Margot Robbie est Harley Quinn.
Avec ‘’Joker’’ c’est sans doute, dans un style très différent, l’une des meilleures productions adaptées de DC, à ce jour.


-Stork._

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le 26 mars 2020

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