J'attendais avec impatience la "suite" du Blade Runner de Ridley Scott sorti il y a 35 ans et je n'ai pas été déçu.
Le film de Villeneuve est incontestablement une splendeur visuelle. Les décors, les extérieurs, l'atmosphère proposés sont époustouflants et son futur anticipé (même si de science-fiction) m'a semblé, certes cauchemardesque, mais assez vraisemblable. Je me suis senti propulsé en 2049 (voire 2249) pendant tout le temps du métrage et, malgré la longueur de celui-ci (164 minutes), je n'ai pas vu le temps passer, tant mes yeux étaient sous le charme. J'étais, en même temps, captivé par cette sombre et tortueuse histoire qui, 30 ans plus tard, renoue avec et prend la "suite" de celle de Blade Runner.
K / Ryan Gosling, un "réplicant" (d'une nouvelle génération, plus obéissante, de "réplicants" créée par Wallace Corporation, une multinationale toute puissante sur Terre... et dans neuf autres mondes !) blade runner de profession, est chargé de retrouver l'enfant mis au monde par une "réplicante" trente ans auparavant ; c'est le seul exemple d'un enfantement réussi par une "réplicante" à ce jour et comme tel, il 1. incarne l'espoir des uns (le groupe rebelle de libération des "réplicants", et qui estime les "réplicants" plus humains que les humains), 2. éveille l'inquiétude des autres (la police humaine de Los Angeles qui redoute qu'on ne puisse plus distinguer les hommes des "réplicants" si ceux-ci deviennent capables d'engendrer) et, par dessus tout, 3. attise la convoitise de Wallace Corporation qui veut mettre la main dessus pour (via son analyse poussée, voire sa dissection) retrouver le secret perdu de cet enfantement par des "réplicantes".


Même si le scénario peut paraître alambiqué et n'enrichissant pas vraiment l'histoire du film initial, il est complètement renouvelé par la façon dont Villeneuve l'exploite et le met en scène. Ainsi son long métrage prolonge celui de Ridley Scott sans lui être ni comparable ni inférieur.
Blade Runner 2049 est certainement lui aussi un chef d'oeuvre. Esthétiquement superbe, le film est assez froid et touche rarement au coeur, mais c'est le sujet (glaçant) qui veut ça. Dans un monde de "réplicants" sans âme (?) mais hyper perfectionnés, où la frontière entre hommes et robots s'estompe de plus en plus, on ne sait plus distinguer qui de quoi et l'être humain de l'objet manufacturé... confusion qui, déjà, est une porte ouverte à toutes les horreurs (globes oculaires arrachés, ventre féminin lacéré parce qu'infertile, etc.).
Excellent dans le rôle du blade runner K, Ryan Gosling incarne idéalement cette froide ambiguïté. Il est supposé être un "réplicant" (fabriqué et identifié par un n° de série : KD6-3.7). Mais... ne serait-il pas, en fait, lui-même cet être unique, né du ventre d'une "réplicante", que sa supérieure hiérarchique du LAPD (Los Angeles Police Department) l'a chargé de détruire ? La mère de l'enfant étant morte en couches, K cherche à retrouver le père (Rick Deckard / Harrison Ford, un blade runner retraité) pour le questionner et savoir ce qu'il est advenu de l'enfant, lequel s'est mystérieusement évanoui dans la nature.
Le moteur du film est la double enquête menée par K (qu'est devenu l'enfant ? Et lui, n'est-il que ce qu'il a toujours pensé être ?), un K peu à peu déchiré par une sorte de dilemme (dans quel camp se situe-t-il, celui de l'ordre actuel ou de la révolte ?).
K n'obtiendra de réponses à ses questions qu'après des affrontements qui lui coûteront tout ce à quoi il tient, ce voyage au bout de la douleur restant toujours, amère consolation pour lui, d'une sidérante beauté visuelle, à l'image de ces flocons de neige qui, si souvent durant le film, virevoltent dans le ciel mais s'évanouissent dès qu'on cherche à s'en emparer.


Quand le générique final défile à l'écran et que, d'un 2049 de science-fiction, on redescend vers notre 2017 bien réel, on éprouve pour le moins un certain vague à l'âme... tout en gardant à l'esprit certaines interrogations, qui trouveront peut-être leurs réponses dans un troisième épisode.
N'importe ! Blade Runner 2049 est en lui-même un chef d'oeuvre, et son aura devrait grandir avec les années.

Fleming
9
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le 9 oct. 2017

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Fleming

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