Il y a l'univers, l'univers est là.
Et puis, il y a le design. Le design est là. Les objets sont là.
Le mimétisme fonctionne car il est équilibré.


Les traces sont fraîches.
L'archéologie de ce monde n’était d’ailleurs pas si aisé à rater. Toute la construction des décors et des ambiances du premier opus avait déjà été disséquée des centaines de fois, les machines, les bruits, les profilages, les tests, les lumières... Chaque élément de l'univers est bien pensé.
Pour le design, cette production est marquante et touchante lorsqu'elle devient référentielle. L'ombre du premier Blade Runner est assumé.
Peut-être de façon trop révérencieuse. Se justifiant parfois. Alourdissant quelques plans sur des détails, faisant du clin d'oeil masqué une sauce un peu grasse alors qu'on attendais de l'acidité.


Maintenant,


des quelques questionnements qui jalonnent le film - sans jamais l'éclairer - émerge sa nature profonde. Toutes les interrogations des personnages sont comme des bouteilles à la mer, jetées dans un vaste océan et dont il est difficile de tirer autre chose que des embryons de pensées.
Elles donnent une couleur intellectuelle au film sans jamais vraiment produire de réflexion.
Ainsi le racisme, la copie, la solitude, l'esclavage, l'enfermement, la vérité, la déterminisme, ou ce que fait tel personnage, les rapports sociaux conflictuels, l'obsolescence, les enjeux des découvertes réalisées... ne sont pas simplement agissant sur le personnage, ils sont montrés en tant que tel, expliqués pédagogiquement.
Ainsi, les dialogues sont presque toujours des démonstrations où tout ce qui devait être dit l’est.


L'effet est immédiat.
L'impossibilité qui nous est laissé de ne pas comprendre, ou en tout cas de ne pas comprendre trop vite ce qui se passe est agaçante. Ce qui devrait nous surprendre, nous est expliqué comme dans un cours. Ce que nous devions analyser, nous est donné avec la notice. Ce qui pouvait être notre enquête, devient un documentaire sur celui-ci, et la poésie, elle, devient une donnée.


De l’errance lente - ces plans lancinants qui n’en finissent pas - le film prend des accents métaphysique et amène l’univers un peu libre de vivre de lui même. La profondeur vient de ces séquences où le doute est permis.
Cette suite devient banale dès qu'elle n'est plus hantée, dès qu’elle devient bavarde, qu’elle explique, qu’elle donne à voir au lieu de laisser voir. La fatuité rend tout factice.
Peut être une manière de faire ressentir au spectateur le "hors sol" d'un répliquant.
Mais simplifier la lecture d’une oeuvre, en donner toute les clefs, transforme les portes en fenêtre. Sans doute que l'ancien Blade Runner était un film d'anticipation qui voulaient nous convaincre de la réalité d'un futur, celui-ci est un film mimétique qui nous parlent de notre présent et de la difficulté d'y voir du vrai.
Cette suite est comme une publicité holographique du film lui même. Les temps forts sont comme suspendus, et l’on voit les visages se défigurer dans une nappe de synthétiseur. Comme si l’émotion devait être décomposée, déshumanisée, répliquée.


Et de 2019 à 2049, ou de 2001 à son hommage "interstellaire", d’une guerre des étoiles à la guerre des mondes... les dernières productions d’Hollywood cherchent à s'ancrer dans la continuité des mythes. Mais elle n'ont pas cette audace leur permettant de ne pas être de simples copies.


Que nous reste-t-il ? Il ne nous restera qu’un doute dans cette recherche de l'âme, si creuse qu'il est même difficile d'en faire le tour, est peut être la solution pour comprendre ce qui manque au film. Je pourrais l'expliquer et parler de ces souvenirs que nous partageons tous et que nous n'avons pas nous même vécu, qui passent par des images, des icônes (traité par le support photographique de la même manière dans Terminator II) mais je préfère éviter une nouvelle démonstration et penser que la science fiction manque aujourd’hui un peu de poésie.


*Le sonore est à l’image du "cinéma de suite"… une dose du son d’origine et une extension modernisée et plutôt stéréotypée. C’est un peu Vangelis sous Inception, avec plus de subtilité toutefois, le minimalisme aidant.

Critique_noir
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le 6 janv. 2018

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