Bloody Bird
6.5
Bloody Bird

Film de Michele Soavi (1987)

Avec Bloody Bird, Michele Soavi se lance dans la réalisation (c’est son premier film après ses stages chez Argento), et espère nous en donner pour notre argent avec Bloody Bird. C’est justement ce qui fait le capital sympathie du film : sa constante générosité, nous offrant un slasher adulte (et je n'entends par là qu'avec des adultes et plus ces petits cons de jeunes attardés qui se droguent et que la police doit rééduquer après) doté d’un suspense particulièrement efficace (c’est simple, un fois le huis clos lancé, tout le monde se met à bouger) dans les décors d’un opéra-rock pour le moins sexuellement explicite. Bref, des tas d’arguments pour dire que Bloody Bird est un film qui fait preuve à la fois de virtuosité et d'efficacité dans sa mise en scène pour mériter une place de choix dans les mémoires.


Certes, quand on voit la dégaine du tueur, on a tendance à penser « What the fuck ? ». Mais si on omet ce détail qui peut sembler grotesque de prime abord (le masque est celui d’un oiseau de proie, symbolique absurde qui ne surprend pas de la part du théâtre moderne sponsorisé par des subventions, mais qui finit par payer vu la sauvagerie ambiante), Bloody Bird a tout du slasher généreux et jubilatoire. Tout d’abord, il a la présence d’esprit de s’inscrire dans un cadre particulièrement exigeant : celui de la danse et du spectacle. Aucune faute n’est tolérée, si tu n'es pas là quand il faut, où il faut, tu es remplacé le jour même sans ménagement et tu peux vider ta loge. Une vie montrée comme particulièrement frustrante pour les acteurs (d'où une certaine empathie), qui sont ici issus de la rue et qui font ce travail pour s’alimenter. De son côté, le connard de service, archétype obligatoire du groupe confronté au tueur du film, est le metteur en scène, un artiste égocentrique qui rabaisse sans arrêt ses acteurs et qui ne cherche à mettre dans son spectacle qu’une dose monumentale de sexe et de meurtre (au nom de l’art, bien sûr, car il faut vendre en choquant, car en fait y a même pas de subventions). On lui ajoutera un caractère opportuniste tout à fait de rigueur quand arrivera le premier meurtre, où il fera carrément des déclarations comme quoi sa pièce se focalisera sur ce meurtre, histoire de faire de la pub à quelques jours à peine du spectacle. C’est dans ce climat tendu que débarque le fou furieux, ayant suivi notre héroïne jusque dans le théâtre, et qui se fait un devoir d’éliminer chaque membre du casting.


A partir de là, le film rentre clairement dans une phase jubilatoire, le caractère gore des meurtres devenant chaque fois plus ambitieux, et ne reculant jamais devant des effets gores bien sentis, et réalistes. Décapitations, tronçonneuse, perceuse à la Body Double et j'en passe, un vrai cahier des charges bien rempli comme on les aime, pour un slasher finalement viscéral et allant à l'essentiel (tous les rebondissements sont traités à la chaine sans baisse de rythme et en minimisant les digressions (on verra finalement peu les deux policiers en dehors)) même si ses actrices ont tendance à crier un peu trop facilement. La partie huis clos du film se résume à la simple survie de ses protagonistes, et réussit à être suffisamment rythmée pour ne jamais nous lasser du spectacle. Impitoyable avec tous ses personnages, Bloody Bird peut fièrement s’affirmer comme un divertissement horrorifique parfaitement cohérent, assez extrême dans sa violence et magnifiquement éclairé (le côté théâtre est plutôt bien exploité à ce niveau là, les ambiances de chaque lieu, et notamment des combles et de l'échafaudage sont bien travaillés pour créer les zones d'ombre nécessaires au suspense). Sans parler de son énorme potentiel sympathie due au style film d’horreur italien des années 80, avec ces mêmes petits tics qui ont fait le charme de projets comme Phénomena (musique marquante, montage nerveux mais très lisible, gros plans chiadés...). Très agréable à revoir quelques soient les circonstances, Bloody Bird est LA réussite de Soavi avec Dellamorte Dellamore, il serait donc vraiment dommage de passer à côté d’un classique en puissance aussi attachant.

Voracinéphile
7
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le 15 déc. 2015

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