Waouh. C'est le premier mot qui m'est venu à l'esprit au sortir de la séance de Little Men. Waouh parce que ça faisait belle lurette qu'un film étiqueté "Coming-of-Age " ne m'avait plus autant désarçonné.
D'emblée, ce qui frappe, c'est le sens de l'observation du réalisateur. Ce dernier, médecin légiste émérite des relations humaines, dissèque avec brio le corps d'une amitié adolescente sclérosée par les turpitudes du monde des adultes à portée de fusil.
Posant les jalons de son cinéma dans une Grosse Pomme en pleine mutation économique, Ira Sachs sublime et poétise les artères d'une ville déjà maintes et maintes fois chantée (Woody, on te salue). Ici chaque image de pellicule distille une retenue et une délicatesse désarmantes, ici chaque dialogue est finement pesé et mesuré. L’homéostasie cinématographique est maintenue par l’infini tact de la B.O de Dickon Hinchliffe (Tindersticks). Tout ça ressemble un peu à cette très jolie fille, votre béguin de l'année, qui cherche à vous éconduire de sa voix à peine audible tout en essayant de ne pas heurter votre sensibilité. Sourire contrit. Il est de ces douceurs qui vous détruisent.
Mais là où Ira Sachs se démarque d'un Richard Linklater par exemple, c'est dans la finition. Quand Linklater fera le choix de l'optimisme léger, Sachs optera plutôt pour la vision douce-amère. Ce qui permet à Little Men de bénéficier d'une des plus belles fins qu'il m'ait été donné de voir.