Candy
7.2
Candy

Film de Neil Armfield (2006)

Once upon a time there was Candy + Dan

Mais quel est donc ce film inconnu qui trône si haut dans mon top 10 ? Il n’est pas forcément aisé d’expliquer pourquoi Candy me touche autant qu’il le fait, pourquoi il me bouleverse à chaque visionnage, car ce film est avant tout un amour personnel et il n’est absolument pas dit que vous l’aimiez autant que moi.

Candy, après tout, est un film d’apparence classique, puisqu’il s’agit d’une histoire d’amour ! Il s’agit de l’histoire de Candy et de Dan, un couple fou amoureux partageant une dépendance prononcée pour l’héroïne. Durant tout le film, nous allons suivre l’évolution de ce couple, de leur vie ensemble, de leur amour, de leur relation qui évidemment sera troublée par cette dépendance. C'est un film d'amour, ou du moins un film qui parle de l'amour, des responsabilités, de l'organisation de la vie en couple, et presque de la vie tout simplement, mais dans un contexte de drogue. C'est en ceci que le film se démarque des films les plus connus sur la drogue.

Plus largement, Candy est un film qui prend soin de parler de la dépendance avec une grande justesse. La dépendance à la drogue, bien sûr, mais également la dépendance liée à la passion amoureuse. Ah, cet état d’hébétude né de l’amour, cette insouciance qui pousse à milles folies, et qui entraînera notre pauvre Candy à suivre Dan dans le chemin de la drogue… Ah, ce paradis amoureux, cette vision enchanteresse de la vie, cette force indescriptible parfaitement illustrée par les scènes dans la piscine. Candy, rien que le titre du film est celui de l’une des deux dépendances de Dan, notre narrateur. Candy, cette petite sucrerie, qui rend sa vie tellement meilleure.

Mais l’insouciance illusoire est un des thèmes les plus forts de ce film. Dan et Candy sont à la fois beaux et tristes à voir. Ils forment un couple magnifique, ils dégagent une telle passion, et pourtant leurs décisions n’en finiront pas de surprendre. Mais comment les blâmer ? En faisant passer leur couple et la drogue avant tout le reste, ils sont énergiques, ont une complicité incroyable, s’échangent des sourires amoureux terriblement vrais et sont noyés dans une passion très forte… Oui, mais nos deux amants sont pauvres, miséreux, vivent dans la crasse, mais la drogue les maintiendra dans une illusion de paradis. Mais si cela est un Paradis, alors qu’est-ce que la Terre, et qu’est-ce que l’Enfer ? Oh wait… Le paradis créé par la drogue ne tarde pas à montrer son revers, son infâme coup de poignard dans le dos.

When you can stop, you don't want to, and when you want to stop, you can't...

Candy arrive à se montrer très intense et très fort. Le rythme est géré de manière particulière puisqu’il est assez imprévisible. Le ton donné par le récit peut changer radicalement entre deux scènes, et les pics d’intensité peuvent laisser place à des passages plus calmes. Pourtant, je trouve que tout cela est géré à la perfection, arrivant à constamment nous laisser captivés par cette petite vie de couple.

D’autant que dans ses moments intenses, je trouve que Candy en impose. Il arrive à nous frapper là où ça fait mal, nous mettant en parfaite empathie avec les personnages. Choquant, bouleversant, Candy est un film véritablement poignant qui nous emmène dans une spirale infernale dont il ne semble pas y avoir d'issue. Le film capte tellement bien les émotions de son couple central que le spectateur ne peut qu’être en phase avec celles-ci. Cela est très largement aidé par la performance incroyable des acteurs principaux. Parfaitement habité, torturé, passionné, déchiré, Heath Ledger est incroyable dans le rôle de Dan et signe ici à mes yeux sa plus belle performance, terriblement juste. Abbie Cornish montre ici qu’elle est une actrice au grand talent (et qui pourtant doit se résigner à des rôles secondaires à présent), sa Candy est exceptionnelle, impressionnante, elle brille de mille feux. Elle est d’une constante justesse.
Mais la caméra de Neil Armfield est loin d’être en reste ! Le réalisateur, grand inconnu au bataillon, a de nombreuses idées de mises en scène et arrive à placer dans son film des plans que je trouve magnifiques. Il sait exactement comment filmer pour rajouter de l’intensité. Certaines scènes sont pour moi inoubliables, tellement fortes tant émotionnellement que visuellement.
De plus, il est à noter que l’utilisation des effets sonore est excellente et que les musiques collent toutes à merveille.

Candy est donc un voyage dans le monde de la drogue en compagnie de deux losers magnifique. On y voit la magie de l'amour, la magie d'un bonheur magnifique, comme on y voit la tragique réalité de leur vie, ce qu'elle peut avoir d'atroce, dans un désir de rester surtout très proche de la réalité. Candy ne fait pas dans le too much, dans le tragique pour être tragique ou le beau pour être beau. Non, il est simplement vrai, et c’est cette véracité qui crève l’écran. Candy est une artiste, et le film Candy est assurément le tableau de leur couple.

Je trouve l’ensemble vraiment bien écrit, tant au niveau des thématiques qui sont toutes très bien traitées que dans les petites idées qui permettent aux scènes de frapper encore plus forts. De plus, une l’impression poétique se dégage de l'ensemble. La poésie, un des thèmes du film puisque Dan est un poète raté, souligné par sa lecture du poème « I carry your heart with me » de E.E. Cumming. La poésie du film, oscillant entre le doux rêve et l’horrible cauchemar, illustre encore une fois la magnifique insouciance et la terrible réalité. Un contraste très bien rendu à l’écran, souligné par les belles images de la réalisation de Neil Armfield. La photographie et le travail sur l'éclairage sont souvent de qualité, mais à part lors de quelques plans, ce n'est pas ce que l'on retiendra le plus.

Vous n’aimerez donc pas forcément Candy autant que moi, car il n’est peut-être pas de ceux qui seront unanimement acclamés, mais il me touche personnellement profondément. Je trouve ses thématiques passionnantes et son traitement proche de la perfection. Les émotions des personnages m’atteignent, je vis leur vie avec eux, je suis complice de cet amour et de cette dépendance. Je vis ce film avec passion, de la première scène à la dernière, que je trouve d’ailleurs particulièrement géniale alors que je l’avais trouvée décevante au premier visionnage. La dernière scène, c’est pour moi le coup de génie du film, pas de too much, quelque chose de simple, franc, mais qui confère au film un aspect de douce tragédie contemporaine. Je ne détaillerai pas ici, mais c’est avec plaisir que je vous en parlerai par MP si vous ne voyez pas ce que je lui trouve de si fort. En tout cas, c’est une fin que j’applaudis particulièrement.

Candy n’est peut-être pas un chef d’œuvre absolu, ni peut-être pas un chef d’œuvre tout court, mais c’est mon chef d’œuvre personnel. Un film qui résonne en moi, qui fait écho en moi, je me sens en osmose avec cette vision de l’amour et de la vie. Un film qui m’évoque de nombreux souvenirs, des événements de vie, et qui encore aujourd’hui m’accompagne dans mes souffrances comme dans mes joies. Candy, c’est un peu mon compagnon de route, que je regarde quand je suis heureux, quand je suis malheureux, et qui à chaque fois m’évoque tellement de choses. Et aujourd’hui quand je le revois pour une énième fois, c’est peu dire s’il m’a bouleversé à nouveau.

Thousands of birds, the tiniest birds, adorned her hair. Everything was gold.

Peu importe comment vous l’aimez, quelle note il mérite, 7, 8, 9, 10, je m’en fiche un peu. L’important c’est qu’il s’agit là d’un véritable beau film, terriblement humain dans ses plus beaux et ses pires versants. Un film sincère. J’espère qu’il vous touchera si vous le regardez grâce/à cause de moi. Assurément pour moi le plus beau film sur l’amour, à égalité avec Eternal Sunshine of the Spotless Mind, et le plus beau film sur la drogue. Un film qui donne à peu près autant d'espoirs que de désespoirs.

Ha, ha, fucking ha, you are so funny Dan.
GagReathle
10
Écrit par

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Créée

le 15 oct. 2010

Modifiée

le 2 févr. 2014

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