Entre des gamins qui se tripotent la bobine, des singes qui prennent le pouvoir, un cimmerien musculeux, des mechas qui se mettent sur la gueule, un pilote qui montre sa lanterne à qui veut bien la voir ou des cowboys bien décidés à défendre chèrement les terres piquées aux peux-rouges des envahisseurs, le blockbuster ricain fait un retour estival en fanfare. Comme un symbole, parmi ces soldats du divertissement US, le 17 août, l’étendard étoilé sera arboré par Captain America. Plus patriotique, t’es un redneck texan. Dernière péloche des studios Marvel pré-Avengers après le récent Thor, Iron Man 2 ou Hulk (celui de Loulou), Captain America se farde d’ailleurs sans honte du futur projet phare de la maison aux idées (réalisé, on le rappelle, par Joss Whedon The Vampire Slayer) jusque dans son titre complet : Captain America – First Avenger. Ce qui apparaîtra peut-être à la plupart d’entre-vous comme un simple détail marketing visant à sensibiliser le grand public (vous savez ceux qui ne bitent que dalle à l’évocation de Civil War), en dit en réalité bien long sur le statut même du film et la volonté du studio d’introniser les personnages de son catalogue avant l’offensive générale prévue pour 2012. Car, s’il apparaît sans aucun doute comme le Marvel movie le plus réussi depuis Iron Man (le 1er hein…) – que celui qui n’a pas crié “pas dur en même temps” nous jette la première pierre – le long-métrage bouffe nonobstant dans la même gamelle que les trois péloches citées quelques lignes plus haut. Gar(d)e à vous Captain !

Iron Fist

A la manoeuvre de cette campagne militaire à 140 millions de dollars, le général Joe Johnston, spécialiste des effets visuels au début de sa carrière, devenu protégé de Spielberg par la suite, tantôt faiseur habile derrière Rocketeer ou le paraît-il très sympa Wolfman, tantôt emballeur de péloches anonyme. Le mauvais Jumanji, c’est lui, le médiocre Jurrassik Park 3, bah c’est lui aussi. Moins surprenante que celle de Kenny Branagh, et bien qu’il ne soit pas un bon gros Yes-man (Leterrier, Leterrierdites bonjour), sa nomination à la tête de pareille entreprise ne laissait que peu de doutes sur l’objectif du studio : un produit carré, formaté, énième rampe de lancement aux Avengers. Pas question de déconner. Pas maintenant. Car, comme le soulignait très justement Fabien dans son papier sur le dieu nordique, ces épisodes pré-Avengers ne se résument qu’à de longs premiers actes étirés sur 2 heures. Et Cap n’y fait pas exception. Alors oui, le background du perso est moins bazardé qu’à l’accoutumée mais on n’en apprend pas non plus que ça sur le passif de Steve et son acolyte Bucky. Une amitié qui d’ailleurs ne tient jamais la route, tout comme l’ensemble des enjeux humains évoqués par le film (cf la relation avec Peggy Carter un peu plus avant dans le texte). Mais bon on s’en fout après tout, on est venu pour voir le Cap se mettre sur la tronche avec Red Skull et ses sbires, non ? Ouais bah c’est là que ça pêche. Aussi. Car notre idôle des jeunes ne risque à aucun moment son intégrité physique (il a signé pour 5 films, pas question de l’abîmer, même pas un peu) annihilant tout effet empathique à son égard. Plus problématique encore, chaque scène d’action trouve son épilogue avant même d’embrasser un quelconque épisme. S’agirait pas non plus de faire de l’ombre aux Vengeurs, non mais ho ! Symptomatiques, les deux rencontres avec Crâne Rouge (Hugo Weaving du plastoc plein la face) sont expédiées sans ménagement. La première se solde par un rapide échange d’amabilités, une patate de chaque côté, pas de jaloux. La seconde, combat final, climax, clou du spectacle, est réglée en moins de temps qu’il n’en faut à un éjaculateur précoce pour accomplir sa basse besogne. Et le coït n’est pas meilleur à plusieurs. A quoi bon coller au fessier rebondi de Captain America une équipe d’Inglorious Basterds benetton (un renoi, un asiat, un français…) si c’est pour compiler leurs faits d’armes en 5 minutes. On a connu gang bang plus excitant. La love story hétérosexuelle n’est pas logée à meilleure enseigne. Johnston ne sait visiblement pas quoi en foutre ni comment la filmer. Du coup, il se débarrassera du truc via un conversation radio filmée. True story. Pas épargné par une DA parfois bien dégueulasse – certaines incrustations sur fond vert (dont le New-York reconstitué) ; une séquence de flashback immonde où Stanley Tucci (nouveau second couteau hollywoodien cabotin) fait état de son passif commun avec Red Skull (à noter que sur cette même scène, l’acteur, vu dernièrement dans Lovely Bones, se fat scalper sur chaque contrechamp, ça t’apprendra à en faire des caisses vilain !) – ainsi qu’une 3D inexistante (en plus d’assombrir l’image plus que de raison), Captain America accumule donc les tares génétiques propre à sa condition. Et pourtant, malgré les fautes de goût et autres insuffisances structurelles flagrantes, y’a pas de quoi convoquer la cour martiale.


Call Of Duty

En bon routier, Joe Johnston, même s’il se contente de respecter à la lettre la feuille de route, n’accouche pas d’une ignominie visuelle. Carrée, rien qui dépasse, la mise en scène s’efface, incapable d’imprégner une quelconque identité, mais a au moins le mérite d’être efficace. Pas de surdécoupage, shaky cam et autres effets à la mode chez les clippers. Quelques plans iconiques et puis s’en va. Bref, grosso-merdo ça fait le job, sans trop d’ambition mais avec métier. Dans le costume étoilé, Chris Evans transpire la classe, dans la droite lignée des premiers visuels et concept arts (bien loin des affiches finales dégueu). Si le Steve Rogers en mode Screeh Powers numérico-cancéreux tient – finalement – la route, le footballeur (américain) musculeux sous amphet – post transformation – qui dérouille du teuton au look de cyborg ou enfourche sa monture (…) mécanique, le tout dans une ambiance retro steampunk, faut bien avouer que ça affole gentiment les midinettes que nous sommes. Evans et ses pecs sont la vraie réussite de cette nouvelle adaptation, assurant sérieusement en boy scoot Superman-like, gendre idéal taillé dans la roche sauveur du monde libre (cela va de soi) sans jamais tomber dans le con-con tête à claque un peu gauche (Clark, si tu nous lis…). Steve, la gente féminine, c’est pas son truc, pas grave, il assume (si en lisant ses lignes vous pensez que Cap est gay, je ne vous félicite pas). A la différence de nombre de ses confrères costumés, Rogers n’est pas né super-héros, ça ne lui est pas non plus tombé dessus après s’être fait sucé le jong par une araignée radioactive ou un quelconque trauma. Non, Steve a choisi de devenir celui qu’il est, entretenant, forcément, un rapport tout particulier à la notion même de super-héros, au sens du devoir ainsi qu’au sacrifice. Il ne bronchera d’ailleurs même pas lorsque, privé de front par le Colonel Chester Phillips (Tommy Lee Jones, 64 ans et toutes ses dents), il se voit enrollé dans une campagne de communication promouvant l’effort de guerre et l’armée US, obligé de jouer la tête de gondole marketing militaire. The show must go on.

Multipliant les ponts avec Les Vengeurs – intro, conclusion (essayez d’avoir l’air surpris par la révélation finale), clins d’oeil à la mythologie Marvel (mais aussi à Indiana Jones ou Star Wars) – Captain America se borne à introduire (…) le film de Whedon, sans jamais s’écarter du cahier des charges édicté par Marvel Studios. Solide film de seconde équipe, ni plus ni moins, The First Avenger se laissera siroter sans trop de mal dans une salle climatisée (on ne saurait trop vous conseiller de préférer la copie 2D, histoire d’y voir quelque chose) en temps de chaleur estivale (ou d’intempérie aoûtienne, ça marche aussi). A des années lumières des efforts de Raimi ou Del Toro, le film de Johnston nous épargne tout de même la crise existentielle dans le fast-food ou la petite affaire dans l’armure (“ça doit rouiller en plus” me signale @PanFr). A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire paraît-il…

*Chronique rédigée lors de la sortie en salles
larchiviste
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le 29 mars 2013

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