Cellule 211
7.2
Cellule 211

Film de Daniel Monzon (2009)

Un drame carceral rude et apre made in Espagne. Une perle du genre. No prision !

Un joli film à l’espagnole. Comme quoi, parfois, il fait bon se tourner vers des productions européennes hors France. Et pour le coup, il s’agit pour moi d’un petit coup de cœur de l’année pour un petit film de gangsters. En revanche, il s’agit d’un ‘grand’ film carcéral à l’espagnole. Je suis ici pour l’expliquer.


L’on est plongé directement dans le feu de l’action. L’absence totale de musique nous immerge instantanément dans la tension nerveuse du long-métrage. Jamais je n’ai décroché de mon canapé. J’en suis resté scotché.
De ce sujet original (Juan débute un jour plus tôt son travail de gardien dans une prison de haute sécurité, mais rien ne se passe comme prévu : une émeute dérape et se transforme en affaire politique) arrive une intrigue décoiffante, autant dans son déroulement que pour le final qui a l’art de sortir des sentiers battus.
Original, prenant et engagé, le récit prend forme pour ne jamais nous lâcher.
Tonitruante, l’ambiance, calquée sur les enchaînements de situation, nous fait comprendre que le pire vient d’arriver et que rien n’est réparable.
Un très beau scénario calqué sur la toujours actuelle société politique espagnole, entre l’ETA et criminels envoyés au bagne. Une très belle leçon de justice et de violence. Mais qui aura raison ?


Pour comprendre la politique de « Cellule 211 », l’excellente interprétation du duel de personnages Malamadre, le chef de l’insurrection-Juan, gardien qui se fait passer pour bagnard et des seconds couteaux bien campés (à l’image d’Antonio Resines -principalement connu pour avoir joué dans la série « La famille Serrano »- dans le rôle d’Utrilla, un gardien qui violente régulièrement les détenus), ne fait que renforcer l’idéal politique que mène le réalisateur.
De ce point de vue, les deux acteurs principaux que sont Luis Tosar (Malamadre) -carrière espagnole à l’appui, « Celos », « Lena », « Ne dis rien », mais aussi internationale, « Miami vice » de Michael Mann, « Cargo » avec Daniel Brühl- époustouflant, magnétique et électrisant face à Alberto Ammann (Juan, alors au mauvais endroit au mauvais moment)-alors débutant, repéré à la télé à partir de la saison 2 de « Narcos »-, convaincant à souhait, ne fait que renforcer le sentiment de David contre Goliath, ici le combat permanent du prisonnier lambda vs l’Etat qui ne bouge ses lois que pour ses propres intérêts. D’autre part, ce duel (Tosar-Ammann) se bat pour un idéal, ici figuré par des très bons seconds couteaux espagnols à l’appui, la liberté.
Avec également Carlos Bardem, le frère de Javier, dans le rôle d’un des fidèles de Luis Malamadre.
Un casting de haute volée dirigé à la perfection : la crème des acteurs du moment (merci Monsieur le réalisateur).


Daniel Monzon filme donc ce coup d’éclat caméra au poing pour plus de réalisme documentaire. S’il s’affranchit des vieux codes du film de gangsters (plans larges et musique au diapason ou déferlement de violence dans un monde où la pègre règne) en proposant, par endroits, des gros plans bluffant de réalisme sur la gueule Luis Tosar, c’est pour mieux nous imprégner de l’ambiance qui règne dans ce pénitencier de haute sécurité.
Ainsi, et sur le plaidoyer de ce film contre la violence (« Cellule 211 » n’est pas ce film social qu’on pourrait croire, mais un film sur la violence et notre bestialité ou certaine humanité qui est ici remise en cause), Daniel Monzon, le petit spécialiste du film de gangsters à l’espagnole (« El niño », « Yucatan ») depuis ce film-ci, propose une mise en scène de caractère appuyé par un militantisme de tous les instants contre l’ETA.
Tout cela provoque ce film engagé dont la force réside dans l’interprétation (du formidable duel Tosar-Ammann) et la tension nerveuse du film, bigrement mise en avant par cette mise en scène calculée, froide et glaciale par moments.
« Cellule 211 » reste également un film d’actualité avec son sous-thème (derrière le sujet de la violence), le nombre de prisonniers qui va en s’accentuant dans les prisons, espagnoles comme françaises.
« Cellule 211 » est donc une perle du genre dont le propos appuie avec force l’universalité du message du film, la liberté et l’espoir, sous couvert de politique et de ‘guerre civile’.


Pour conclure, « Cellule 211 », dont on ressort essoufflé, champion du box-office espagnol en 2009 avec plus de 2 millions d’entrée, est cette belle surprise réglée, forgée et façonnée par Daniel Monzon avec le transcendant Luis Tosar. Un très beau film carcéral.


Spectateurs-joueurs, si vous passez par la case prison, n’oubliez pas de passer votre tour… !


PS : cette attraction de l’année a reçu huit prix dont 6 Goya : celui du meilleur film et du meilleur réalisateur pour Monzon, du meilleur acteur (pour Tosar, bien évidemment), du meilleur second rôle féminin, de la meilleure révélation masculine (Alberto Amman) et de la meilleure adaptation. Quoi de plus logique ?

brunodinah
8
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le 11 nov. 2020

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