Zach est un ado pas très jouasse.Son père est décédé et sa mère,proviseur,est mutée,quittant New York pour Madison,obscure bourgade du Delaware où il ne se passe jamais rien.Enfin,en principe car Zach ne tarde pas à sympathiser avec Hannah,sa charmante voisine.Seulement,la jeune fille a pour père R.L. Stine,célèbre auteur de livres d'horreur,et les monstres enfermés dans ses bouquins vont s'échapper,semant une pagaille monstre,c'est le cas de le dire,à travers la ville lors d'une nuit d'enfer.Il se trouve que la collection "Chair de poule",constituée de romans horrifiques pour la jeunesse,existe bel et bien,ainsi que l'écrivain R.L. Stine,qui l'a rédigée dans les années 90,obtenant un énorme succès.Une série télé en a même été tirée dans les nineties.Cette adaptation met astucieusement en scène l'auteur lui-même,confronté à la révolte de ses créatures malfaisantes.Le film a fait l'objet de beaucoup de soin à tous les niveaux de fabrication.Rob Letterman,qui avait déjà dirigé Jack Black dans "Les voyages de Gulliver" en 2010,assure un rythme effréné et filme avec virtuosité des séquences d'action vertigineuses.Il s'appuie sur des effets spéciaux haut de gamme.Certes,on sent le numérique,mais les incursions des monstres dans le monde réel restent très impressionnantes.Danny Elfman a composé une excellente musique,collant aussi bien à l'ambiance anxiogène du film qu'à sa dimension humoristique.Quant à la photo de Javier Aguirresarobe,elle a une texture automnale magnifique évoquant le Maine de Stephen King,ce qui n'est pas un hasard,et ses images nocturnes,de toute beauté,rappellent le look du fantastique eighties.Les scénaristes Scott Alexander et Larry Karaszewski ont fait du bon boulot,trouvant le difficile équilibre entre comédie poilante et horreur flippante.Leur script est très référencé sans que ça ne soit une facilité aux fins de remplissage ni que ça ne devienne lourd et parasite l'histoire.Une histoire bien gérée,aux multiples rebondissements s'enchaînant harmonieusement.Evitant l'accumulation,ils font apparaître séparément les créatures agressives et ménagent à la plupart suffisamment d'espace pour exister,jusqu'à un final délirant qui les verra toutes réunies.Les dialogues sont jubilatoires et les scènes d'action tombent au bon moment,ce qui crée une homogénéité pas évidente sur le papier.Entre autres références,on cite bien sûr King,dont Stine est en quelque sorte la version "littérature pour jeunes",mais aussi "Gulliver",Letterman nous refaisant le ligotage au sol de Black,cette fois aux prises avec des nains de jardin.On pense également à "Gremlins",avec ces monstres déchaînés détruisant méthodiquement une ville le temps d'une nuit,et tout le bestiaire classique est convoqué,alignant pantin maléfique,nains agressifs,abominable homme des neiges,momie,clown,robots flingueurs,abeilles tueuses,chien enragé,loup-garou et même une mante religieuse géante.De surcroît se profile une réflexion sur la nature des auteurs de fantastique et celle de leurs lecteurs.Pourquoi des gens écrivent-ils des trucs aussi torturés et effrayants,et pourquoi d'autres les lisent-ils?Le cas de Stine est ainsi épluché,sans qu'on connaisse la part de vérité contenue dans cette explication,le décrivant comme un enfant à part et rejeté,qui s'est réfugié dans l'horreur afin de se venger d'un monde auquel il se sentait inadapté.Le cas des consommateurs semble plus simple.La peur fait partie de la psychologie de l'être humain,et s'y confronter à travers la fiction permet de la gérer en en faisant quelque chose d'amusant,sans prendre de risques concrètement.Jack Black,assez sombre,prouve qu'il n'est pas qu'un comique et interprète magistralement un personnage borderline et ambigu.Le jeune Dylan Minnette est parfait en héros malgré lui,alors qu'Odeya Rush apporte une vivacité bienvenue à Hannah,tandis que la révélation de la vraie nature de celle-ci amènera une jolie touche poétique au film.Et puis il y a Ryan Lee,irrésistible dans le rôle de Champ,le boulet du collège,en décalage permanent avec les autres protagonistes.