Chez Andrew Dominik, l'environnement criminel ne voit pas émerger de figures réjouissantes, juste des individus dépassés et désabusés. Aucun risque qu'un seul spectateur envie ceux qu'on voit dans Cogan. Et bien qu'ils soient interprétés par de solides interprètes (Brad Pitt, Scoot McNairy, James Gandolfini ou Ray Liotta), le constat est sans appel : aucun n'échappera à la dure réalité.
Au milieu de tous, Cogan bien sûr. Et même (surtout?) lui ne mérite pas d'éloges. Pour peu qu'il soit peut-être plus clairvoyant, cela ne le rend pas moins pathétique que les autres.
À la sortie de Cogan, une chose m'interpelle. La constante présence du politique derrière le film noir au premier plan. Il propulse le film vers un désenchantement bienvenu, éloigné du panache immoral alimentant les fresques mafieuses de Scorsese par exemple. Et c'est bien le revers de son propre discours que le film se prend.
L'ajout des discours politiques en arrière-plan appuie certes le message désespéré du film, mais semble également grossier tant son recours systématique n'était pas nécessaire. Cette utilisation redondante finit même par lasser, tant elle semble sous-titrer ce qui n'exigeait aucune explication. De même que le monologue final, aussi juste soit-il, amplifie d'autant ce sentiment de réflexion extraite au forceps du film. Ce qui passe soit pour de la maladresse soit de la prétention.
Fort heureusement, le réalisateur reste terriblement bon dans son domaine d'expertise. Cogan regorge de très belles idées de mise en scène (snorricam sur une portière de voiture qui s'ouvre et se ferme), et il y a de l'élégance dans la façon avec laquelle Andrew Dominik filme cette Amérique essorée par les mensonges et les espoirs déçus.
Néanmoins, il me semble qu'un film comme Comancheria (Hell or High Water en VO) parvenait à de meilleurs résultats en se montrant plus subtil sur son sous-texte.