Sous son apparente simplicité, l'entretien-bricolage mis en boîte par Michel Gondry est tout de même assez ardu. C'est que Noam Chomsky, considéré comme l'un des intellectuels les plus importants du monde contemporain, développe une pensée dont il a jeté les bases il y a plus de 60 ans, aussi maîtrise-t-il son sujet.
Linguiste, grammairien, philosophe et militant politique, Chomsky se prête avec souplesse au dispositif artistique d'un Gondry faux candide et parfois perdu, ou frustré de ne pas trouver les bons mots pour s'exprimer. Le rôle que le cinéaste s'attribue nous permet de nous sentir moins seul, quand, soudain largué, on trébuche sur un mot qu'on ne comprend pas (ou plus), et dont il faut rechercher la définition pour en retrouver le sens.
La "grammaire générative" ou "la continuité psychique" exposées par Chomsky nous permettent de reconsidérer notre perception du monde, ce qui est inné ou pas, offrant à notre pensée ébahie de nouveaux champs de réflexion.
Et puis l'homme au seuil de la vie parle aussi de son épouse récemment décédée, la linguiste Carol Doris Schatz, des croyances humaines (religions, astrologie), de ses enfants, du plaisir de côtoyer ses amis, de son enfance, du sionisme, de l'engagement politique.
Ludique et presque primitive, la mise en scène de Gondry qui tend à illustrer par des représentations naïves les conversations successives, apporte une légèreté salutaire au film. Certaines illustrations sont parfois très belles et offrent à cette production atypique la part de rêve dont on a toujours besoin.