Message d'adieu de Roger Moore à la franchise James Bond, cet ultime épisode de l'acteur qui a le plus incarné double zéro sept aurait pu me réconcilier avec la dynastie Moore. Aurait pu si les erreurs n'avaient pas été trop nombreuses. Cependant, ne soyons pas mauvaise langue, les problèmes ne viennent pas de mister Moore, au top, même moi, pourtant anti-moorien primaire, je reconnais son talent et sa maitrise du célèbre agent secret dans ce numéros. De plus j'ai passé un véritable bon moment. Cela viendrait il du fait que je n'ai vu aucun James Bond depuis 5 mois ? Je ne peux nier qu'après une légère overdose, une période sans 007 ne m'a pas fait de mal et reprendre avec ce dernier Moore n'était pas pour me déplaire, car je savais que déçu ou non, ça serait la dernière fois que je verrai l'agent britannique avec ces traits.

Dangereusement Votre apparaît comme un adieu, comme une porte qui se ferme. Roger Moore, connu principalement pour son humour gagne ici en flegme et en élégance (quelle est loin l'époque du marcel et du jean pour Vivre et Laisser Mourir). Une certaine retenue même, une forme de deuil quelque part. Mais c'est aussi un message d'adieu à Lois Maxwell, la célèbre Moneypenny, qui joue ici la secrétaire de M pour la dernière fois. Si ses joutes verbales avec 007 ont perdus de leurs superbes dans l'épopée Moore, elle retrouve ici une certaine importance, du moins dans le premiers quart du film. Un retour plaisant pour celle qui fut LA Moneypenny (étant à mes yeux un des meilleurs duo du cinéma avec Connery dans le costume de Bond).
En dehors de cela la continuité est de mise, avec le même M que dans Octopussy, ainsi que Q, toujours fidèle au poste, véritable pierre angulaire d'un film Bond pour les fans. Nous retrouvons même Walter Gotell dans le rôle du général Gogol (éternelle vision d'un URSS à double facette). Tous sont encore très bons.
Globalement d'ailleurs les acteurs ont tous un excellent niveau, ça ne serais pas mentir que de rappeler à quels points tous les personnages sont bien interprétés et que les seules choses que l'on peut reprocher viennent du scénario et non de l'interprétation. Mais nous y reviendrons plus tard.

A la fois époque qui se termine avec le départ de Moore, cet épisode se veut également une transition. Transition et héritage à la fois. C'est très complexe. Je m'explique : on a le droit à pas mal d'élément très "Moorien" mais qui sont cependant nettement diminué par rapports à ce que nous avons connus avant. Une façon de dire "Rappelez vous, on la jouait ainsi" tout en évitant d'en faire trop, ce qui avait déplus aux fans.
Je pense notamment aux scènes amusantes et surtout la (très) longue course-poursuite avec les policiers. Si je comprend la volonté qu'a les officiers à arrêter un potentiel criminel, je pige nettement moins que Bonds préfère faire péter la moitié de la ville à coup de camion de pompier, prendre une petite heure au poste pour joindre ces supérieurs aurait été largement suffisant. C'est surtout l'occasion de nous montrer un policier un peu béta, comme le shérif Pepper dans Vivre et Laisser Mourir et L'Homme au Pistolet d'Or. Pourtant, il fait moins stupide, et moins inutile. Mais ça n'excuse pas cette longue scène, risible tant le film aurait gagné à ne pas l'avoir (encore plus quand on songe à la longueur de l'histoire).
De la même manière, je le dis de façon très rapide. Comme ce fut mentionné au préalable, Moore est moins dans le délire pur et dur que dans les épisodes précédents. Bien qu'encore amusant, il est plus en retenu, nous offrant un Bond que l'on aurait aimé voir plus tôt et qui permet de "faire croire" qu'il a toujours été ainsi.
Les gadgets aussi sont là. Chez le Bond Moorien ça a toujours fait le yoyo entre beaucoup et quasiment pas de gadget. Là c'est peu de gadget mais rassemblé au début du film, ce qui permet de voir rapidement.
On a aussi le droit à une course poursuite en ski, très bondien comme thème, mais je vous rassure "pas trop" ... Il n'a qu'un seul ski.
Le héros, crapule géniale se sentant supérieur à tout le reste de l'humanité est également au programme. Là encore on reste dans la thématique très proche de l'époque de Moore. Faut il préciser cependant que pour sa part Connery avait plus le droit au super-criminel qu'au "génie" du mal ?

Pourtant, malgré cet héritage et ce bon jeu de la part des acteurs, Dangereusement Votre ne se limite pas à ça. C'est d'abord une bande son de très bonne qualité qui a excellemment bien vieilli. Une des trois meilleure des 14 premiers opus. Des thèmes forts, de bonne musiques d'ambiances, bref un bon point.
Niveau effet spéciaux, si on a encore le droit à l'incrustation foiré, ce n'est pas ce qui m'a le plus choqué. Ca passe relativement bien et on évite même les explosions en tout genre. Non là aussi le service FX a plutôt bien bossé, reconnaissons le. On devrait juste leur demander de voir avec le service qui gère le son, car pour la première fois depuis des années il y a une scène où on entant TROP bien le dialogue des figurants. A tel point que j'ai cru qu'ils étaient dans l'intrigue principal. C'est dire ! Une petite erreur pour certain. A mon sens, le genre de faute inacceptable dans un film ! [Il s'agit de la scène où Bond suit Stacey qui sort d'une visite dans le bureau de son patron].
Le scénario est des plus impressionnants. Il est très bien fait ! Avouons le, il souffre du grand maux de tous les James Bond : C'est du WTF le plus total ! Pourtant, et c'est là le génie des scénaristes, nous changeons de pays, passons des micro-processeurs, aux courses de chevaux jusqu'au faille sismique le tout sans que ça ne gène nullement le spectateur. Excellent, n'est il pas ? Je suis des plus sérieux à ce propos, les transitions sont souples, fluides, d'une grâce sans nom qui est vraiment incroyable. Malgré que le film soit un peu long, cette prise de temps permet de rendre ceci plus crédible, quitte à provoquer un ennuie par moment (scène de course avec les flics, ou arrivé de Bond dans la "mine"), au moins ça permet de respect l'engagement fictif entre les auteurs et le spectateur pour "faire croire que c'est vrais". Bravo gentlemen, mission réussi !
Bien entendu, nous n'évitons pas de nombreux défauts habituels aux films de James Bond. Le méchant bien méchant par exemple. Du coup il a un charisme propre d'une moule tant cette méchanceté pure, d'un manichéisme des plus total le rend creux. Alors que pourtant, sa relation passionnelle avec May Day aurait put offrir un back-ground des plus intéressants. A la place il n'est qu'avarice, que désirs d'argent plus que haine. Les meurtres faciles qu'il réalise ne le rende que plus lisse, lui enlevant toute exception par rapports aux précédents ennemis de Bond. Il n'évite pas non plus le fameux coup de « je vais vous tuer » et plutôt que de lui tirer dessus, le laisser dans une voiture pour qu'il se noie, ou dans un ascenseur qui brule. Ca peut paraître puérile de s'énerver de cela, mais vraiment, c'est des plus agaçants. Souvent, dans les Bond, les méchants se montrent trop clément avec le héros. Ou alors ils mettent en place des plans bien étranges. En réalité c'est toujours une faille pour montrer à quel point Bond est grand et fort. Mais là, on en abuse tellement et de manière tellement grossière que ça ne marche jamais, on ne fait que ce dire que Zorin et ses hommes sont une belle bande d'incapable. Bref, encore un méchant de pacotille, ça devient agaçant.
D'ailleurs, à partir du moment où son plan échoue, il ne fait que perdre d'avantage les pédalles, ou du moins le scénario les perd. S'affolant totalement l'histoire perd toute logique et même tout intérêt, on sait déjà que dans les 10 prochaines minutes, James va sauver Stacey, qu'il couchera avec elle à la fin mais qu'entre temps, le méchant (Zorin) va mourir en parti à cause de lui, sans que Bond ne le tue réellement (en tombant dans le vide par exemple), le tout saupoudré de WTF le plus total, allant d'un ballon dirigeable stoppé par une simple corde à deux idiots qui gardent de la dynamite dans leurs mains. Il faut dire que si l'ennuie commence à se faire sentir au bout de 2 heures de film, ces 10 dernières minutes suffisent à donner envie de passer rapidement au prochain chapitre des films James Bond tant on retrouve tout la médiocrité des fins de cette période.
En plus de la longueur, de l'incohérence et de la médiocrité de quelques scènes, le film souffre également de l'habituel sexisme de Bond. Je dois avouer qu'à première vu on pourrait penser que non. May Day étant une adversaire redoutable, épaulée par plusieurs jeunes filles bien en forme, James, quant à lui se faisant une jolie collègue, tout semble aller pour le mieux. Même Stacey a l'air plutôt bien. Mais, à partir de la scène de la maison de Stacey, tout dérape. Celle-ci devient totalement inutile, se contentant de regarder l'agent secret se battre et ne cessant de répéter en boucle « James, Jaaaaaaaaaames ! » le tout avec une inutilté qui n'a d'égale que son peu d'intelligence (elle n'entend pas un ballon dirigeable arriver plein gaz derrière elle …).
L'autre gros défaut est la sous-exploitation de pas mal de bon thème bien sympa. Achille Aubergine, le détective français ? Liquidé dès sa première scène alors que le personnage semblait intéressant. Vous me direz qu'avec un nom pareil, c'est un perdu pour un gagné … Godfrey Tibbett, entant qu'allié de Bond aurait pu tenir un peu plus, il avait un bon charisme pour un vulgaire faire-valoir et une utilité qui dépassait cette simple fonction. Idem pour 003, l'agent mort qui a pris la puce que Bond se charge de retrouver au début. Une bonne idée pour brosser la mythologie bondienne qui est finalement peu développée. Et je n'ai pas encore parlé de Pola Ivanova, l'agent du KGB, rival de Bond qui, en arrivant, semble être destiné à devenir son allié, sa complice. En réalité, ça ne permet qu'une scène rapide, sans aucune forme d'intérêt. Alors que ça aurait pu être tellement bon ! Echec, mais amis, échec ! On comprend à peine pourquoi les Russes donnent la médaille de Lénine à Bond tant ils ont peu été impliqués dans cette histoire. Certes, ils devaient être au premier plan, mais pourtant, ils ont totalement disparu de l'écran !

Pour résumer, Dangereusement Votre est une belle façon de clore un énorme chapitre de la saga Bond. Bien que long, le scénario avance avec aisance, malgré quelques touches d'ennui et une cohérence qui fait défaut. Les acteurs jouent bien mais les personnages manquent souvent de nuance voir de temps d'apparition. Le film perd également au fur et à mesure la complexité de son scénario en voyant rapidement se réduire la liste des personnages agissant (au tout début, M, Moneypenny, Q, Tibbet et Aubergine sont tous avec Bond sur l'enquête).
Le fait de sous exploité à la fois des idées possibles (alliance avec les russes, alliés de Bond plus utiles, personnage 003), mais aussi des idées qui avaient été mises en place mais sous-utilisés (relation Zorin-May Day, Ivanova plus utile, Stacey véritablement combattante) rend cependant le visionnage dure, dans le sens qu'on sent qu'on passe à coté de quelque chose de bon.
Le film en réalité est une succession de bon moment ponctué, de temps à autre de petites erreurs, si au début elles sont relativement rare, plus le film avance plus on remarque des mauvais choix scénaristiques et techniques qui conduisent à finir en apothéose avec une longue erreur de près de 15 minutes.
Donc, même si ce film n'est pas trop mauvais, et qu'il reste un bon Roger Moore, il est loin de valoir ce qu'il aurait du être. Good bye Mister Moore, welcome Mister Dalton !
mavhoc
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le 17 juil. 2013

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