Comment a-t-on pu reconnaître la moindre autorité morale à une nation qui a porté le feu nucléaire à deux reprises sur son ennemi sans aucune bonne raison ? Un crime de guerre reste un crime tout court. Et un dessin animé comme celui-ci prend le parti de l'affirmer tout en douceur, sans pathos racoleur ni rancœur acerbe. Un tour de force en soi. En suivant l'histoire intime d'une jeune dessinatrice un peu distraite, dont la famille réside à Hiroshima, on a l'occasion d'approcher par la petite porte du tendre la réalité de la guerre, sans jamais porter aucune accusation rageuse. Ce qui commence comme une chronique tranquille de la vie à la campagne avant-guerre prend petit à petit l'aspect d'un journal des privations et des inquiétudes, à mesure que les raids aériens américains s'intensifient, que la nourriture se fait rare et que disparaissent les jeunes hommes de ce village jadis si paisible. En parallèle, le spectateur occidental aura l'occasion d'approcher les coutumes de la société traditionnelle et de découvrir, perplexe, l'étrangeté de la psyché japonaise. Comme Silent voice, ce dessin animé donne l'occasion de béer d'incompréhension devant les réactions des personnages, opaques, à mille lieues des habituels ressorts des histoires qui se racontent de ce côté du monde. En prime, les décors sont d'une folle délicatesse et les objets du quotidien bénéficient d'un traitement poétique qui fait chaud au cœur. Sans compter que le scénario ménage habilement de jolies surprises, jamais téléphonées, qui finissent par former un paysage à la fois lumineux et poignant dont on ressort le cœur serré, en se sentant partie prenante des destins qui se déroulent dans les modestes recoins de ce monde. Un véritable baume.