Dans les années 1970, Akira Kurosawa traverse la période la plus noire de son existence. Après l'accueil désastreux de "Dodes'kaden", les producteurs japonais ne lui font plus confiance. De plus, son état de santé s'aggrave. C'en est trop, il a atteint le point de rupture et tente de se suicider en se tranchant la gorge. Fort heureusement, cette tentative échoue mais il n'est pas tout à fait prêt à refaire des films.

C'est quelques années plus tard qu'il va être approcher par le studio soviétique Mos Film, lui proposant d'adapter, comme il l'a toujours voulu, l'autobiographie d'un explorateur russe. Cette invitation sera l'opportunité d'une résurrection personnelle pour le cinéaste. Il va donc partir en Russie afin de tourner cette adaptation, inaugurant ainsi une longue série de collaborations avec des producteurs étrangers comme Georges Lucas ou Steven Spielberg, qui vont lui permettre d'achever tranquillement la dernière partie de sa carrière cinématographique.

Basé sur une histoire vraie, le long-métrage narre les aventures de Vladimir Arseniev, un capitaine-explorateur qui va vivre un épisode marquant de sa vie à partir de l'été 1902. Alors qu'il partait en expédition avec son équipe, afin effectuer des relevés topographiques dans la région de l'Oussouri, il fait la rencontre de Dersou Ouzala, un petit homme trappu aux yeux bridés : l'anti-héros par excellence. Mais pourtant, il recèle de nombreuses qualités qui font de lui un héros fascinant. Depuis la mort de sa femme et de sa fille, ce vieux chasseur hors-pair d'origine mongol vit seul dans la taïga sibérienne qu'il connait comme sa poche.

D'abord intriguée et méfiante, l'équipe d'exploration va vite adopter Dersou et le nommer "guide officiel". Celui-ci les impressionne par sa maîtrise de la Nature qui l'entoure, en leur faisant éviter tous les pièges de la forêt boréale et en leur procurant facilement de la nourriture. Pour lui, les éléments ont une âme, exactement comme les Hommes et doivent être traités avec respect. Chacun d'eux a une place dans le système qui lui ait réserver et qu'il doit conserver. Peu à peu, une amitié indéfectible se lie entre Vladimir Arseniev, le représentant de l'Homme, et Dersou Ouzala, le représentant de la Nature. Une amitié fondée sur la tolérance, la fascination et le respect mutuel.

Après d'éprouvantes péripéties romanesques, l'expédition se termine et les 2 amis se séparent douloureusement.
Se déroulant 5 ans plus tard, la 2ème partie va nous mener au tragique dénouement, symbolisant la profonde amertume du cinéaste envers la société moderne et contrastant l'apparente harmonie de cette relation amicale utopique.

A travers ce passionnant récit d'aventures épiques, la Nature est représentée comme une force terriblement puissante, capable de détruire l'Homme la méprisant. Ce conte et poème écologique prône la réconciliation primordiale de l'Homme avec la Nature ainsi qu'avec ses éléments et ses êtres, faute de quoi l'Homme se condamne à un lent suicide ...

Et je conclurai sur les déclarations du maître japonais résumant brièvement ses intentions et l'humble message qu'il a voulu nous transmettre :

"La relation entre l'être humain et la nature va de plus en plus mal... Je voulais que le monde entier connût ce personnage de russe asiatique qui vit en harmonie avec la nature... Je pense que les gens doivent être plus humbles avec la nature car nous en sommes une partie et nous devons être en harmonie avec elle. Par conséquent, nous avons beaucoup à apprendre de Dersou."

D'une simplicité déroutante, l'auteur nous a démontrer que ce sont finalement les choses les plus simples, qui s'avèrent être les plus belles.

Critique de "Les Salauds Dorment en Paix" : http://www.senscritique.com/film/Les_Salauds_dorment_en_paix/critique/28596557
TheStalker

Écrit par

Critique lue 581 fois

10
2

D'autres avis sur Dersou Ouzala

Dersou Ouzala
Kobayashhi
9

Oh Captain, My Captain !

Dersou Ouzala, c'est d'abord la renaissance du Phoenix Kurosawa qui après l'échec cuisant de Dodes'kaden a tenté de se suicider, fort heureusement, ce fut un échec. Il nous revient 5 ans après avec...

le 2 sept. 2013

89 j'aime

5

Dersou Ouzala
Sergent_Pepper
8

Taïga con dios.

[Série "Dans le top 10 de mes éclaireurs : Ochazuke] Lorsqu’on jouit d’une filmographie aussi dense et prestigieuse que celle de Kurosawa, le défi pour se renouveler et poursuive son œuvre peut...

le 24 janv. 2015

88 j'aime

11

Dersou Ouzala
oso
9

Un coeur de tigre pour une âme vagabonde

Exploiter l’adversité que réserve dame nature aux intrépides aventuriers pensant amadouer le sol de contrées qui leur sont inhospitalières, pour construire l’attachement réciproque qui se construit...

Par

le 14 déc. 2014

58 j'aime

8

Du même critique

Le Fossoyeur de films
TheStalker
7

Il creuse, il creuse et comble un vide ...

Bonjour à tous ! Ici TheStalker et aujourd'hui j'ai déterré pour vous un sujet qui nous concerne tous, ô sens critiqueurs et internautes de tout horizons : Nous allons parler d'un des plus...

le 21 mai 2014

41 j'aime

10

Her
TheStalker
10

La magie de l'émotion.

Ouahh !! Que dire ? Si ce n'est que je viens tout juste de vivre ma plus belle expérience dans une salle obscure. Le jour des mes 16 ans, j'ai eu la chance de contempler la petite merveille du...

le 22 mars 2014

34 j'aime

5

La Haine
TheStalker
8

La banlieue c'est pas rose, la banlieue c'est morose ...

"La Haine" est un excellent film d'auteur français réalisé et sorti en 1995 par Matthieu Kassovitz. Pour son 2ème long-métrage, le cinéaste va observer et scruter un microcosme assez peu représenté...

le 15 mars 2014

26 j'aime

10