Dersou Ouzala par Megillah
Texte écrit autre part transvidé ici comme un organe qui glougloute du formol:
Exit intellectualisme, bienvenue vieux chasseur hezhen et typographe russe à la Kurosawa. Un film de rien, simple, de la forêt, du vent partout, un homme qui vit en symbiose avec le bâton qu'il finit par abandonné, faute de forces, faute de la date de péremption ; un golde dont on s'approche avec tranquillité et qu'on évoque de belle façon. On pourrait avoir la naïveté de croire le saisir; on peut, mais c'est tellement vain. Du brute qui m'a grugé un peu les cornées sans pour autant les liquéfier. La détresse de son immobilisme citadin que cause l'interdiction de couper son bois soi-même dans un parc, de tirer à la carabine alors qu'on a des yeux pourris par nos remords rayés. Translittération : "Capitane!" Combien de fois il le dit, le nom capitaine? Et puis les supplications de la fin. Un chasseur qui pense à pourvoir en riz des gens qu'il verra jamais, qui tire une corde pour faire tomber la bouteille parce que pourquoi tirer la bouteille? C'est une intelligence que j'ai absolument pas et ça a quelque chose de fascinant. Surtout, c'est un film dénué de rébellion et de colère. Russie, début du XXe : lac où on doit couper des roseaux pour pas crever de froid parce que la nuit tombe; bâtir une yourte en vitesse; un radeau; tirer sur une malédiction; "Why man live in box?"; des plans fixes d'une solitude infinie accroché à son âge comme un clou rouillé; et l'amitié qu'on plante en terre pour qu'elle reste debout un peu plus longtemps. Des racines, de bonnes racines et seulement ça. Des arbres, une grande Sauvage russe aux cheveux torrentiels : quelque chose qu'on a entendu tellement souvent, jusqu'à l'ennui, jusqu'à la haine, mais aucune sagesse ‒ un peu d'amitié. Alors, je vous le demande : pourquoi, cette fois, ça a fonctionné?