D’un sujet qui exigeait une frontière poreuse entre temps de l’apparition publique et temps de la vie privée au nom d’une reconquête de l’intimité, Oliver Hirschbiegel tire une œuvre surchargée d’effets esthétiques et mélodramatiques parfaitement réalisés, mais au clinquant excessif. Un ralenti sur la princesse faisant de la course à pied, un gros plan sur une casserole en train de bouillir, rien de tout cela ne fait sens, accole de façon maladroite un style de type publicitaire à la réalité sensible. L’ombre médiatique qui plane sur Diana suffisait à incarner la paranoïa d’une femme subissant davantage son destin qu’elle ne le dirige selon son bon désir. Et du désir, que dire sinon qu’il brille par son extrême banalité ? Le film s’inscrit dans la très actuelle vague artistique dont l’objectif est de contrebalancer le destin extraordinaire de grands hommes et de grandes femmes par une plongée dans leur quotidien morose : une princesse normale qui cuisine des pâtes, commande Burger King et regarde le football avec son amant. Réussir cette entreprise d’humanisation demande une capacité à proposer, derrière le fard médiatique et historique, une profondeur émotionnelle. Sur ce point, Diana n’est pas Jackie, et son mélodrame souffre de tous les écueils du genre, n’ayant pas grand-chose à raconter, exception faite d’un enchaînement de scènes tantôt touchantes tantôt blafardes, aux répliques assez mal écrites. Après la banalité du Mal que portait La Chute, remarquable huis clos dans les entrailles de la folie nazie en plein déclin, Hirschbiegel capte la banalité de la vie de princesse avec un éclat moins certain. Pourtant, reconnaissons au film une lucidité quant à son approche mélodramatique : la clausule fonctionne, tout comme la relation entre les deux protagonistes principaux. Le principal problème réside dans la déviation que Diana fait subir à son récit : en se concentrant sur la passion amoureuse au sein d’une société qui l’interdit plutôt que sur cette même société empêchant deux amants de construire un destin commun, il recycle les artifices de la romance et généralise la grandeur qu’un tel sujet offrait. À l’image de ce très beau plan-séquence initial au terme duquel Diana se retourne, comme terrifiée à l’idée que son ombre médiatique la poursuive, mouvement en forme de cassure que la caméra traduit à merveille par un subit travelling arrière ; or il n’en est rien, car on apprendra plus tard que ce n’est pas tant son ombre que l’héroïne guettait mais l’élu de son cœur.