Difficile de critiquer l’Histoire avec un grand H. Adapté d’une pièce de théâtre, déjà jouée par André Dussolier et Niels Arestrup, Diplomatie raconte cette nuit du 24 au 25 Août 1944, où Paris a failli être intégralement détruite sous ordre du général Dietrich von Choltitz, répondant aux directives d’Hitler.
A la limite du huit-clos, Volker Schlöndorff offre ici une bonne œuvre de ciné-théâtre. On distingue sans difficulté que le long métrage émane d’une pièce de théâtre. De longs discours, une importance particulière apportée à la locution, un rythme suffisamment lent pour développer les arguments de chaque parti. La crainte de s’endormir en pleine séance s’estompe bien vite tellement on se prend au jeu. C’est le destin de toute une ville dont il est question, et c’est de l’Histoire, la vraie, que découleront les conséquences. Mais Paris tiens encore debout aujourd’hui, plus de 60 ans après. La conclusion est donc connue de tous, du moins je l’espère, dès lors il ne sert plus à rien de développer le suspens puisque nous savons déjà comment cela se termine. C’est donc le chemin pour y parvenir qu’il est intéressant de développer ici, ainsi que la psychologie des différents protagonistes, en particulier les deux personnages principaux.
Le film ne déborde pas d’intensité comme a pu le faire "La Vénus à la Fourrure", ni d’autant de suspens. Pour combler ce manque, ce sont les deux interprètes de renom qui ont la lourde tâche de porter cette histoire sur les épaules. Bénéficiant d’un capital sympathie aussi grand que leur talent, on prend plaisir à voir les deux hommes se renvoyer la balle à coup d’argument, telle une partie de tennis de table. Le scénario n’offrant que peu de marche de manœuvre, on fait l’impasse sur ses défauts de réalisation, préférant apprécier la beauté d’écriture des dialogues et la construction des personnages, qui sonnent justes.
C’est malgré tout un souci de taille. Des films adaptés de pièce de théâtre, ce n’est pas la première, on a eu le droit récemment au quintuple césarisé Les garçons et Guillaume, à table, qui, même sans voir la pièce de théâtre d’origine, fonctionne extrêmement bien au cinéma. Mais on a surtout des films comme Le Dîner de con et Le père noël est une ordure, qui n’apportent probablement pas grand-chose portés à l’écran mais qui offrent la part de fou rire que l’on attend d’eux. Seulement ici ce n’est pas une histoire drôle, et l’importance d’une adaptation cinématographique est essentiellement l’apport d’un point de vue, d’une prise de partie, quasiment inexistante ici. La grande question qu’amène la situation est primordiale et importante. La vie d’une personne peut-elle valoir plus que celle de milliers d’autres ? Mais c’est une question philosophique récurrente, à laquelle bien peu de personnes seraient capables de répondre. En cela quelques répliques deviennent prévisibles et même si cette parcelle historique se prête à merveille à un tel questionnement, on s’interroge sur l’intérêt de porter la pièce à l’écran.
1h30, c’est la durée du film. Peut-être était-ce trop court pour développer un enjeu de cette taille ? Lorsqu’on en apprend un peu plus sur les motivations du général nazi, il n’est pas difficile d’aborder de nouveaux axes scénaristiques fort intéressant. Les éléments qui interviennent dans le choix de détruire ou non Paris se multiplient et offrent de nouvelle possibilités quant à l’approfondissement psychologique des deux héros.
Quoiqu’il en soit, il en résulte un récit maîtrisé de bout en bout malgré ses lacunes, grandement compensées par l’immense talent des deux acteurs. Avec simplicité, le réalisateur nous incite à sortir conquis de la salle. Intéressant, émouvant, rien de transcendant mais l’artifice fonctionne et on se laisse facilement prendre au jeu.