La première fois qu'on croise son regard, District 9 enchante, émerveille, en met plein les yeux et les oreilles. Une deuxième fois, on fait la mou, les bras croisés, les yeux et la tête rivés sur les imperfections.

Partant d'une intrigue originale où les extraterrestres ne sont pas des envahisseurs mais des réfugiés, les relations entre humains et « crevettes » se tissent en maillons mal imbriqués jusqu'au choc des cultures. Filmé, au départ, comme un reportage, la vraisemblance se fait progressivement ensevelir sous un scénario plus exigent que celui de Cloverfield. Pas question de se trimbaler une caméra amateur pendant 2h10. L'action se fera sentir avec moultes secousses, mais ne sera pas synonyme de vomitif.

Avec une bonne idée de départ qui se développe correctement et un anti-héros qui se retrouve acculé, il y a de quoi voir du neuf au sein des dialogues. Pourtant, ceux-ci sont conformes au cahier des charges du blockbuster Hollywoodien. « Cours, je les retiendrai ! », la larmichette à l'oeil, dans un sursaut d'orgueil alors que les organes se vident... Puis un « I love you honey, snif snif... » téléphonique... Bon allez, j'exagère peut-être (à peine), mais il est très dommage de constater que le film respecte un peu trop les poncifs musclés du genre. A la carte, certes, mais de manière trop appuyée pour qu'on n'ait pas le sentiment de regarder une connerie un tant soit peu mieux que le reste.

Vous voulez un méchant ? Vous aurez un méchant à l'air louche, l'œil torve, la barbe malfaisante (ça c'est pour l'hypallage) et la gueule enfarinée. En poussant mémé dans les orties, je peux même dire que c'est discriminant. Les blacks faisant régner la criminalité bling-bling sont parqués dans des bidonvilles (des camps, devrais-je dire), alors que les blancs, tout aussi détestables et malintentionnés, représentent les institutions a priori saines. D'apparence, certes, car on comprend bien vite que tout le monde trempe dans le goudron et les plumes.

Privilégiant le barouf, la surenchère, les explosions, le spectacle est présent, satisfaisant, et n'oublie pas de jouer la carte de la satire sociale. Pour accéder aux enjeux intestins du film, il faut regarder notre société à travers le prisme improbable d'un monde où des armes tirées de jeux vidéo sont utilisées par des immigrants du futur parlant le Sebulba et acceptant docilement les conditions des autochtones. Dit comme ça, c'est pas engageant, mais les thèmes de la clandestinité, sous couvert de crises politique et économique sont vraiment palpables et affreusement contemporains.

Pour clore, j'y ai (re)vu un blockbuster soigné, mais loin d'être exempt de défauts.
Adrast
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le 16 oct. 2011

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