Il est intéressant de voir To Kill A Mockingbird dans le sillage de La nuit du chasseur tant les thèmes abordés se rejoignent.

Le plus évident des thèmes abordés est celui lié à l'enfance. A travers une histoire de procès (Gregory Peck jouant Atticus Finch, le père de la toute jeune narratrice, est avocat et va défendre dans un bled rural profond un Afro-Américain injustement accusé de viol), on suit avant tout la découverte d'un monde profondément injuste, et aussi à la morale complètement inversée.

Ce qui fait peur pour les habitants de la bourgade dépeinte par le film, c'est l'étranger, la personne de couleur, ce Noir qu'on ne saurait accepter. Injustement accusé de viol alors qu'il est au contraire parfaite victime (et ce jusqu'au dénouement tragique du film), ce n'est jamais lui qui fait peur, mais plutôt ces hordes d'habitants propres sur eux mais prompts au lynchage, au parjure, résolument bornés et intolérants. Ce qui fait peur dans le film, ce n'est pas cet étranger, c'est plutôt ce paysan très américain mais complètement bourré, prêt à agresser des enfants pour exercer sa justice.

Mais il y a avant tout un profond progressisme discuté par le film. Atticus Finch est veuf et élève seul ces enfants dans des notions de tolérance extrême, de justice et de respect, seulement aidé par une nounou (noire elle aussi, et qu'il reconduira chez elle, chauffeur blanc d'une femme noire en plein 50s).
A la violence des régulières attaques (verbales comme physiques) des habitants, c'est par la non violence et le self control qu'Atticus répond, mais c'est aussi l'innocence des enfants qui est directement opposée à la cruauté du monde adulte.

Robert Duvall, dans le rôle qui l'a révélé, est d'ailleurs symbolique de cela : des gens simples mais doués d'une bonté à même de faire ce qui est Bien et Juste, faisant fi des a-priori et des différences. La scène finale en est extrêmement belle de symbolique, avec la narratrice comprenant instantanément (et sans un mot) ce que Duvall souhaite : un simple moment de légèreté visant au réconfort et à la sûreté d'autrui, dans un pur élan d'altruisme à même d'arracher des larmes même aux plus endurcis des spectateurs (© Rose Boch).

Si on pourra remarquer que l'émotion provient aussi / peut-être du fait de mettre en jeu des enfants qui sont, comme souvent au cinéma, synonymes de prise d'otage émotionnelle, To Kill A Mockingbird ne s'en appuie que très rarement, et brosse un portrait fin d'une Amérique alors réactionnaire sous couvert d'un profond libéralisme, mais surtout en grande contradiction avec elle-même, quitte à y sacrifier les générations suivantes.
Remy_Pignatiell
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le 20 oct. 2013

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